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AN. 1160.

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mencement de fon regne il découvrit fa pensée. H
promettoit de rétablir la grandeur de l'empite, &
de foûmettre facilement à Rome toute la terre
pourvû que
le pape
lui aidât; en excommuniant
ceux à qui l'empereur declareroit la guerre. Il ne
trouva pas alors un pape difpofé à une telle ini-
quité : c'eft pourquoi il en a voulu faire un qui lui
fût dévoué. Et enfuite :

Tous les jugemens doivent être libres, mais fur tous les jugemens ecclefiaftiques, au licu qu'en celui-ci ce n'a été que violence d'une part & artifice de l'autre. Les juges affemblez en prefence d'une armée, menacez, intimidez ont precipité leur fentence. On pretend avoir prouvé que l'élection de Victor a été la premiere & la plus canonique:mais comment l'a t'on prouvé ? Le doïen de S. Pierre & deux chanoines au nom de tout le chapitre, & les recteurs du clergé de Rome l'ont affirmé avec serment, le refpect de Rome & d'autres citoïens ont offert de jurer de même, mais on n'a reçu que le ferment des ecclefiaftiques, parce que l'affaire a paffé par leurs mains. Qui eft affez aveugle pour ne pas voir un artifice fi groffier? Tout le monde sait de quelle confideration font, principalement dans l'élection du pape, ces recteurs que l'on fait tant valoir. Perfonne ne croira qu'ils y aïent cu part comme ils fe vantent; mais je veux qu'ils aïent été prefens au commencement de la querelle: ont-ils fuivi Roland jufques à fon facre pendant douze jours? Le chapitre de S. Pierre l'a-t'il vû, & le prcfet qui cft exilé & à qui il n'eft pas permis d'entrer

dans Rome; lui & les autres citoïens ont-ils approché AN. 1160. des terres du roi de Sicile & du lieu où s'eft fait ce facre ? On les a donc dispensez exprès du ferment, parce qu'ils ne l'auroient pas fait, pour ne pas bleffer leur confcience,ou dumoins leur reputation. Au refte, qu'eft devenu ce grand nombre de la plus faine partie des cardinaux? Ont-ils été corrompus par l'argent que les fenatcuts ont confessé avoir reçû, pour promettre avec ferment la promotion d'Octavien, & qui a éte deftiné par le peuple à la reparation des murailles? De ce grand nombre il n'eft refté que trois cardinaux, dignes d'être jugez par les Allemans dans leur camp. Guillaume de Pavic cardinal de S. Pierre-aux-liens a été informé de tout : pourquoi ne l'a-t-on pas interrogé au concile de Pavic? c'eft qu'il n'auroit pas parlé en faveur de Victor ; & il a exprès gardé le filence dans ce tumulte où il ne voïoit que de l'emportement: fachant que ce que l'on y faifoit ne pouvoit préjudicier à la liberté de l'églife. Mais fi l'élection de Victor a été fi canonique, pourquoi tous les évêques cardinaux hors ces trois n'ont-ils point affifté à fon facre? & qui en a empêché les évêques de Tofcane qui y étoient appellez, finon la crainte de commettre un facrilege ? J'admire que tout le monde fuit le pauvre Alexandre, & qu'on aime mieux fouffrir l'éxil avec lui, que rcgner en s'attachant à fon adverfaire. Tous les ordres des cardinaux toute la cour Romaine cft avec lui. Ils ne craignent point la fentence du concile de Pavie, au contraire ils ont prononcé anathê

a

CC

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Sup. n. 42.

Sup.n.29.

me contre l'empereur même fon idole, & tous fes adorateurs.

Je paffe aux foufcriptions de ce concile, où faute d'évêques on fait paroître des comtes, & on met au premier rang des évêques dont l'élection est. nulle ou rejettée. Rainald chancelier de l'empereur s'eft dit archevêque de Cologne, quoi qu'il foit certain que fon élection a été condamnée par le pape Adrien ; & je ne voi pas pourquoi il a differé de fe faire facrer par fon Victor, fi ce n'eft qu'il craint fa chûte prochaine. Gui comte de Blandrate a tenu la place de l'archevêque de Ravenne : quoique fon fils qui eft un bon jeune homme, mais dont l'élection a été caffée, ne puiffe paffer pour archevêque. Qui n'en voit le ridicule? c'est un jeu de theatre plûtôt qu'un concile. Que dirai-je de ce grand nombre, quoi que faux, de roïaumes & de provinces ramassées dans ces fouscriptions pour imposer aux ignorans? Nous sommes bien-heureux que l'empereur a en plus de honte d'exiger des injuftices que ce concile de les fouffrir.

que

J'eftime que ceci suffit
ceci fuffit pour perfuader l'archevê-

de Reims de recevoir Alexandre : à condition

de differer, s'il le juge à propos, à publier fon confentement, car je fuis bien perfuadé qu'il ne reconnoîtra pas l'antipape. Il ne faut rien précipiter dans les affaires importantes. L'évêque de Pavie & l'évêque de Plaifance ont été follicitez outre mefure pour le parti d'Octavien, mais ils n'ont cedé ni l'un ni l'autre, parce qu'ils craignent Dieu.

Toutefois l'empereur les preffe, & Dieu le permet AN, 1160. afin que leur exemple encourage ceux qui font plus éloignez. Et enfuite : Quoique l'archevêque de Cantorberi foit, comme vous favez, confidcrablement malade, toutefois la neceffité de cette affaire l'a obligé de partir, pour fe trouver à l'affemblée des évêques & du clergé de tout le roïaume; & rendre réponse au roi, qui l'a confulté sur ce qu'il doit faire. On dit que l'évêque de Vinchestre & celui de Durham prendroient volontiers, s'ils ofoient, le parti d'Octavien ; au contraire l'archevêque d'Yorc & nôtre tréforier foûtiennent Alexandre de toutes leurs forces, & c'cft le parti du plus grand nombre & des plus honnêtes gens. Ainfi parloit Jean

de Sarifberi.

XLVIII.

connu en France

Fo. Sarifb. epift.

Philippe abbé de l'Aumône de l'ordre de Ci- Alexandre reteaux au diocéfe de Chartres dont j'ai déja parlé, & en Angleterre. contribua beaucoup à faire reconnoître le pape Alexandre en France & en Angleterre. Comme fa vertu lui donnoit une grande autorité, le papc lui avoit écrit de travailler à cette affaire, & il lui repondit en ces termes : J'ai presenté vôtre lettre au roi d'Angleterre, qui l'a reçûë agréablement, & après avoir déliberé avec les fiens & avec nous il vous a reconnu pour pape : il vous presente par nous fon obéïffance, & vous envoïera dans peu fes deputez: mais il a voulu que je vous en écriviffe le premier, afin que vous apreniez ses intentions plus fecrettement & plus promptement : J'ai envoïé vôtre lettre generale aux évêques d'Angleterre par un homme fidelle, avec Gilbert évêque

AN. 1160.

epift. 65.

d'Herford & Hilaire de Chichestre, fort affec-
tionnez à vôtre perfonne & à vôtre cause. Je fuis.
allé tout de fuite vers le roi de France, qui comme
prince catholique vous eft auffi très-affectionné;
& vous l'auroit déja montré par les effets, fi plu-
fieurs affaires importantes ne l'en avoient empêché.
Il vous envoïc par mon miniftere une lettre de
compliment: mais qui doit demeurer fecrete, juf-
ques à ce que les deux rois affemblez vous don-
nent une declaration publique de leur obéïffance,
ce qui fe fera inceffamment, parce qu'ils font prêts
à faire la paix entre eux. Et enfuite : Sachez que
tous les archevêques, les évêques & les autres
prélats confentent à vôtre élection.

L'affemblée de l'église Anglicane se tint en effet.
On y lut plufieurs pieces, par lefquelles les deux
papes prétendoient foûtenir leur droit: on lût en-
fuite les canons ; & il survint des témoins que l'on
n'attendoit point qui rendirent la verité plus mani-
fefte. L'affemblée toutefois ne forma aucun juge-
ment, refervant la décision au roi: mais elle dreffa
fon avis, que l'archevêque Thibaut envoïa au roi
par
Rainald fon archidiacre & Guillaume de Ner
fon chapelain. Enfuite l'archevêque aïant reçû là
réponse du roi, fit un mandement adreffé à tous
les évêques d'Angleterre : par lequel il leur décla-
re, qu'Alexandre eft le pape legitime, reçû par
l'églife Anglicane & la Gallicane, & qu'Octa
vien eft condamné avec fes fauteurs, comme
manifeftement fchifmatique. C'eft pourquoi il
leur ordonne de rendre refpect & obéiffance au
pape Alexandre.

Lo

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