AN. 1165. .XIX. Sens & vint à Paris, puis à Bourges, où S. Thomas de Cantorberi qui l'avoit accompagné jufqucs-là, prit congé de lui pour la derniere fois. De. Bourges le pape vint à Clermont. L'évêque de Londres lui répondit : Aïant reçeu vôtre ordre, très-cher pere, avec le refpect convenable nous avons auffi-tôt été trouver le roi, l'évêque d'Herford & moi : quoi qu'il fut déja dans le pais de Galles à la tête de fon armée. Il a reçû vôtre correction avec action de graces, & a répondu avec beaucoup de modeftie. Premierement il déclare, qu'il n'a jamais ceffé de vous aimer comme fon pere & d'obéir à vos ordres : que fi depuis long-tems il ne vous a pas rendu tant de refpect, c'eft qu'après vous avoir aidé au befoin de tout fon pouvoir, il a reçû des refus presque en tout ce qu'il vous a demandé. Toutefois il demeure ferme dans vôtre obéiffance, & déclare qu'il n'empêchera perfonne par force d'aller à Rome, ni ne l'a empêché jusques ici. Quant aux appellations, il pretend avoir droit d'empêcher aucun clerc de fortir de fon roïaume pour aucune cause civile, s'il n'a auparavant effare de s'y faire rendre justice. Il favoit bien que l'empereur étoit schismatique, mais jufques à present il n'a pas fû que vous l'euffiez excommunié. Il dit qu'il n'a jamais chassé l'archevêque de Cantorberi:c'est pourquoi comme il s'eft retiré de lui-même il peut rentrer dans fon églife quand il lui plaira, en fatisfaifant au roi fur fes plaintes, & gardant les coûtumes roïales qu'il a lui-même jurées. Si quelque églife églife, ou quelque perfonne ecclefiaftique fe plaint AN. 1165.. d'être maltraitée, il eft prêt à y fatisfaire au jugement de toute l'églife. Voilà les réponses du roi, fur lefquelles nous vous prions de confiderer quelle fin vous voulez mettre à cette affaire. Car le roi croit faire beaucoup pour fa juftification, en se raportant de tout ce qui a été dit au jugement de l'églife de fon roïaume. C'est pourquoi nous vous fupplions de moderer vôtre zele pour un temps, de peur qu'en prononçant un interdit ou une excommunication, vous n'aïcz la doulcur de voir unc infinité d'églifes renversées, & le roi avec un peuple innombrable éloigné fans retour de vôtre obéiffance. Il vaut mieux qu'un membre, même bleffé, demeure attaché au chef avec efperance de guérison, que d'en être feparé & retranché du corps pour toûjours. Quoi, fi vos remontrances ne font pas bien reçûës, faut-il defefperer de la grace de Dieu, pour les faire mieux recevoir en un autre tems? Le fang roïal se laisse vaincre quand on lui a cedé quelque chofe, il faut le gagner par la douceur & par la patience. Permettez-moi de le dire, c'eft la charité fincere qui me fait parler : fi la fin de cette affaire eft que l'archevêque de Cantorberi demeure en exil perpetuel, dépouillé de fes biens, & que l'Angleterre, ce qu'à Dieu ne plaife, ne vous obéïffe plus : vous verrez qu'il eût mieux valu fouffrir pour un tems, qu'ufer d'une fi grande feverité. Je croi bien que plufieurs d'entre nous demeureront dans vôtre obéïflance malgré la perfecution : mais il fe trouvera quelqu'un qui AN. 1165. reconnoîtra l'antipape & recevra de fa main le pal lium pour le fiege de Cantorberi: il s'en trouvera qui lui obéïront pour ufuper nos ficges. Plufieurs forment déja de tels projets, & defirent le trouble pour s'en prévaloir. Ce n'eft pas nôtre interest particulier qui nous touche, mais le trifte renversement de l'église dont nous fommes menacez, & qui nous feroit defirer la mort plûtôt que d'en être fpectateurs. Ainfi parloit l'évêque de Londres. Le roi d'Angleterre ou plûtôt le même évêque en fon nom écrivit dans le même fens au college des cardinaux. Il reprefente ce qu'il a fait pour le . p. 41. pape Alexandre, & que loin de fe faire prier pour le reconnoître, il lui a artiré les autres. Il fe plaint que le pape le traite de perfecuteur de l'église, & protefte qu'il ne laiffe pas de vouloir demeurer dans fon obéiffance & fe conferver fon affection, pourvû qu'il le traite comme les autres papes ont traité les prédeccffeurs enfin il déclare qu'il fe raportera toûjours au jugement du clergé & des feigneurs de fon roïaume, dont il veut feulement conferver les droits & les anciennes prérogatives. c. ep.98. Le pape avoit auffi écrit aux évêques de l'obéïssance du roi d'Angleterre de deçà la mer, favoir à l'archevêque de Rouen, à l'archevêque de Bourdeaux & à leurs fuffragans, se plaignant de ce que leur roi avoit communiqué avec Reinold archevêque de Cologne, & envoïé des députez à l'empereur Frideric. Sur quoi Rotrou archevêque de Roüen écri vit en ces termes à Henri prêtre cardinal: Nous répondons avec toute affurance pour le roi d'Angleterre, qu'il n'a fait à l'empereur aucun ferment ni aucune promeffe par lui ni par fes envoïez, d'adherer à l'antipape. Âu contraire nous sommes certains que dans ce traité de mariage, quelque inftance que fiffent les Allemans pendant trois jours, il n'a jamais voulu rien accorder, qu'après avoir mis pour premiere condition fa fidelité envers l'église & le roi de France. Ainfi Rotrou desavouë par avance les envoïez d'Angleterre à l'empereur, qui n'étoient pas encore revenus. Ce traité de mariage étoit entre Henri le Lion duc de Saxe, & Mathilde fille aînée du roi d'Angleterre. AN. 1165. 1. ep. 102. Le pape aïant reçû la réponse de l'évêque de Londres en parut fatisfait, & le remercia du soin qu'il prenoit d'entretenir son roi dans l'attachement 1. p. 41; à l'églife: le priant d'y travailler de plus en plus avec l'archevêque de Rouen, l'évêque d'Herford & l'imperatrice Mathilde. La lettre eft dattée du vingt-deuxième d'Août 1165. & du licu nommé alors le Gras de Mercure, qui étoit une embou. V.Baudr.Gradus. chure du Rhône près de Maguclone. XX. Retour du pape Car le pape continuant toûjours fon voïage paffa de Clermont au Pui en Auvergne, puis à Alexandre à RoMontpellier, où il demeura jusques à la N. Dame me. d'Août. Dc-là il écrivit au roi de France, pour le A&a. ap. Bar.to. prier que fi quelque évêché ou quelque abbaïe x. Conc. p. 1336. venoit à vaquer dans fon roïaume, il en fit pourvoir Thomas de Cantorberi: pour le faire subsister lui & les fiens, cn attendant qu'il fit sa paix avec ep. 71. le roi d'Angleterre. Le pape écrivit aussi au roi de AN. 1165. France en faveur du nouvel évêque de Chartres 1338. ep. $7. 1. qui l'étoit venu trouver de fa part. C'étoit Guillau to. x. Conc. p. 1347. ep. 87. f. 490. me aux Blanches-mains quatrième fils de Thibaut IV. comte de Champagne & beau-frere du même roi. Le comte fon pere voulant lui procurer dès fon enfance des dignitez ecclefiaftiques, pria S. epift. 271. Bernard d'y emploïer fon credit: mais le faint abbé s'en excusa : disant que ces charges font dûës à ceux qui peuvent & veulent les exercer dignement, & qu'il n'eft pas permis même aux adultes Gall Chr. to. 2. d'en avoir plufieurs. Guillaume aux Blanchcs-mains fut premicrement prevôt de S. Cyr à Provins, puis Robert II. évêque de Chartres étant mort le vingttroifiéme de Septembre 1164. il fut élû l'année fuivante pour remplir ce fiége: mais le pape Alexandre lui donna difpenfe de fe faire facrer pendant Rob. de Monte cinq ans, à cause de sa jeuneffe. C'étoit donc pour lui que le pape écrivoit au roi fon beau-frere ; & dans la même lettre il l'exhortoit à foutenir la cause de l'églife, fans fe laiffer ébranler par les follicitations de l'empereur Frideric. Elle eft dattée de Montpellier le dix-neuviéme d'Aouft, Continuat Ai- Le roi Louis & tout fon roïaume reçût alors une grande joïe, par la naissance d'un fils qu'il defiroit depuis long-tems. Il demandoit pour cet ef fet les pricres de toutes les perfonnes picufes ; & au chapitre general de Citeaux ce prince vint fe prefenter à l'affemblée ; fe profterna les mains étenduës & ne voulut point fe lever qu'ils ne fe fussent mis en pricre, & ne l'euffent affuré de la part de Dieu an. 1165. mpini.c. ult. Al her. an. 1165. |