Gervas.

XI. Guillaume de Champagne archov. d Sens.

Sup. liv. L XXI.
n. 17
An. 1165.

An. 1169.

point parce qu'il se pressoit de retourner. En
effet voïant le mauvais procedé du roi d'Angle-
terre,
si-tôt

que
le terme prescrit par

le

pape fut passé, il reprit le chemin de Rome & laista Vivien en France.

Gratien alloit à Rome avec le nouvel arche: vêque de Sens. C'étoit Guillaume aux Blanchesmains, beau-frere du roi Louis le jeune, qui dès

l'année 1165. avoit été élu évêque de Chartres . Robo de Monte, mais le pape Alexandre l'avoit dispensé pendant

cinq ans de se faire sacrer , comme j'ai dit. Durant
cet intervalle l'archevêché de Sens vint à vaquer
en 1168. par le décés de Hugues ; & Guillaume

fut élu pour lui succeder, fans quitter l'évêché Idem 1168. Chr. de Chartres, que le pape Alexandre lui permit

de garder encore deux ans. Il fut sacré arche-
vêque de Sens le dimanche vingt-deuxiéme De-
cembre de la même année par Maurice évêque
de Paris. Outre l'autorité que lui donnoit sa

naissance & la dignité de son siége ; il n'y avoit fo. Sarife of personne dans le clergé de France plus prudent 3. ap. Ing.hi. & plus éloquent , au jugement de Jean de Saris

beri son fucceffcur au siège de Chartres. Guillau-
me étoit aprés le roi de France le plus grand pro-
tecteur de l'archevêque de Cantorberi : & il eut

à la negociation des nonces Gratien & Vi.
vien avec le roi d'Angleterre.

Ce prince aïant donc apris que l'archevêque
Ordonnance da de Sens alloit à Rome , aparemment recevoir son

pallium, & Gratien avec lui, en fut extrême-
ment allarmé: apprehendant que le pape ne don-

S. Petri vivi. 1168.

.

III. ep. 30. 34.

part à

X.

R. d Angl. contre

AN. 1169.

vita p

nât à cet archevêque la legation de ses états de deça la mer. Car il n'y avoit personne qu'il craignit davantage que ce prélat dans l'église Gallicane , & Gratien dans l'église Romaine. : Il envoïa donc en Angleterre Geofroi Ridel ar- 111. ep.65 Gerchidiacre de Cantorberi, & Richard archidiacre var. ann. 1169. de Poitiers avec d'autres officiers , pour ordonner à tous les évêques de s'assembler à Londres, & d'y jurer l'observance d'un nouvel édit qui portoit en substance. Si après la S. Denis on trouve quelqu’un en Angleterre chargé de lettres du pape ou de Thomas archevêque de Cantorberi portant interdit , qu'il soit pris & qu'on en fasse aussi-tôt juftice comme d'un traître. Si quelque évêque, abbé ou autre clerc ou laïque veut observer l'interdit : qu'il soit chassé du païs avec tous ses parens ,

sans qu'ils emportent rien de leurs biens qiii seront mis en la main du roi. Tous les clercs qui ont des revenus en Angleterre seront avertis d'y revenir dans la S. Hilaire , c'est-à-dire le quatorziéme de Janvier : autrement ils ne pourront plus esperer d'y rentrer , & leurs révenus seront mis en la main du roi. Défense d'appeller au pape ou à l'archevêque. Si un laïque vient d'Outremer ou s'il se

presente pour s'embarquer, on s'informera soigneusement s'il ne porte rien qui foit contre l'honeur du roi ; & en ce cas il sera mis en prison. Défense à aucun clerc ou religieux de passer en Angleterre sans permission du roi. Le denier S. Pierre ne sera plus païé au pape , mais levé, soigneusement gardé au trésor du roi & emploïé par son ordre. Tous

An.1169.

8. 60.

lcs vicomtes d'Angleterre feront jurer l'observas tion de cette ordonnance.

Les laïques furent contraints à faire ce ferment, mais les évêques , & les abbez refuserent même de se trouver à l'assembléc de Londres indiquée par les officiers du roi. Au contraire l'évêque de Vinchestre déclara publiquement , qu'il obéiroit toute sa vie aux ordres du pape & de l'archevêque de

Cantorberi, auquel il avoit promis fidelité & Sup. liv. Ixvu. obéissance ; & il ordonna à son clergé de faire de

même. Telle fut la fermeté de ce venerable vieillard, qui avoit autrefois resisté si courageusement au roi Etienne son frere. Il fut imité par l'évêque d'Excestre qui se retira dans une maison religieuse jusques à ce que la tempête fut passée. L'évè. que de Norvic, nonobstant la défense du roi, excommunia le comte Hugues en présence des offi-, ciers , suivant l'ordre qu'il en avoir reçu : puis il descendit du jubé, mit sa crosse sur l'autel & dit qu'il verroit qui étendroit les mains sur les biens de son église: & se retira dans le cloître avec les moines. L'évêque de Chestre se mit en sûreté dans la partie de son diocese habitée

par

les Galois. La nouvelle de ces violences étant venuë en France , plusicurs évêques en écrivirent au pape, accusant Gilbert évêque de Londres d'en être l'auteur. Ces prélats furent Guillaume archevêque de

Sens, Maurice évêque de Paris, Matthieu de 111. ep. 86. 89. Troïes , Guillaume d'Auxerre,Baudouin de Noron,

Ils disent que Gilbert irrité de n'avoir pas étè élû archevêque de Cantorberi, menace de faire en sor

isl. ep. 88.

Ill. ep. 41.

to. I. conc.

Greg. lib. x11.

ep. 15.
Suf. liv. xxxvI.

te par l'autorité du roi , que la chaire archiepisco- An. 1169.
pale soit transferée à Londres. Il prétendit en effet
qu'avant le tems de S. Gregoire , & l'irruption des
Anglois païens , Londres étoit la metropole de la
grande Bretagne. Il est vrai que dans le concile
d'Arles tenu sous Constantin l'an 314.les deux évê- 1430. B;
ques de cette province sont Eborius d’Yorc & Re-
stitut de Londres, & le premier projet de S. Gregoi-
re fut d'établir les deux metropoles d'Angleterre à
Londres & à Yorc : mais S. Augustin son disciple
établit d'abord son siége à Cantorberi. Les évêques n.37. *. 40,
de France loüent ceux d'Angleterre de la fermeté
avec laquelle ils ont resisté à Gilbert , & aux offi-
ciers du roi , qui vouloient les faire renoncer à
l'obéissance de Thomas leur archevêque. Enfin ils
prient le pape de reprimer ce schismatique, & les
autres que Thomas a excommunicz.

Cependant le roi d'Angleterre voulant re-
noüer la negociation , ou du moins gagner du S. Denis.
tems, manda le nonce Vivien , & lui promit
avec serment qu'il suivroit son conseil & l'or-
dre du pape pour rendre la paix à l'église. Sur
cette parole Vivien croïant la paix déja faite, écrivit
à l'archevêque de Cantorberi de se rendre à Paris

, le premier dimanche après la S. Martin , c'est-à-dire le seiziéme de Novembre , parce que ce jour-là les deux rois devoient avoir une conference à S. Denis , où le roi d'Angleterre devoit se rendre, sous prétexte d'un pelerinage de devotion. Tho- I. ep. 10. mas répondit à Vivien, que la commission étant finie , il n'avoit dû aller trouver le roi d'Angleterre

Рp iij

XI.
Conference de

AN. 1169. qu'avec grande circonspection. Pour moi, ajoûte

t'il, je ne suis plus obligé à me rendre à vos ordres,
& je ne comprens pas sur quelle assurance vous
avez été si facile à m'appeller. Je ne laisserai pas
par respect pour le s. liége & par amitié

pour
vous, de me trouver à votre rencontre vendredi à
Corbeil , pour aprendre de vôtre bouche ce que
nous devons esperer de ce voïage. C'est que Tho-
mas connoissoit mieux que Vivien les artifices du
roi d'Angleterre. Thomas fut aussi pressé par le
roi de France & d'autres personnes sages de ve-
nir à cette conference.

Vivien s'étant donc rendu à S. Denis , pressa le roi Henri de tenir la parole , mais il se dédit , enforte que Vivien lui reprocha publiquement la duplicité , & l'artifice dont il avoit usé pour le surprendre ; & dit depuis à Thomas qu'il n'avoit jamais vû un si grand menteur. Au retour de faint Denis le roi Henri pafsa prés de Mont-martre où Thomas l'alla trouver ; & par l'entremise de Rotrou archevêque de Rouen , de Froger évêque de Sécz & de quelques autres , le pria pour l'amour de Dieu & du pape de lui rendre à lui & aux fiens fa paix , les bonnes graces , & les biens qui leur avoient été ôtez: offrant de lui rendre tout ce qu'un archevêque doit à son prince. Le roi répondit , quc de fa part il remettoit de bon cour tous les sujets de plainte qu'il pouvoit avoir contre l'archevêque ; & quant à ce que le prélar voudroit proposer contre sui , il s'en tiendroit au jugement de la cour du roi de France , de l'église Gallicane ou de l'école

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