A N. 1173. met & vouloir embraffer la religion Chrétienne. I Ce prince l'ayant appris entra dans une furieufe colere, & affembla les feigneurs, qui furent tous d'avis de ne point negliger cette affaire; qu'il n'y alloit pas feulement de l'autorité. royale, mais de l'honneur du nom Chrétien & de l'interêt de l'égli fe. On envoya donc deux feigneurs au maître des Templiers nommé Eudes de faint Amand, pour lui demander fatisfaction de cet attentat, que l'on difoit avoir été commis par un certain frere Guil laume du Mefnil, borgne, méchant homme, violent & emporté ; mais qui l'avoit fait avec la participation de fes confreres. Le maître du Temple répondit: Qu'il avoit mis le coupable en penitence; & qu'il l'envoieroit au pape en cet état. Que ce- AN. 1173. pendant il défendoit de la part du pape que personne ne fut affez hardi pour mettre la main fur ce religieux: à quoi, fuivant fon humeur hautaine, il ajoûta plufieurs paroles infolentes. Enfuite le roi étant venu à Sidon fit tirer par force de la maison des Templiers frere Guillaume du Mefnil qu'il mit en prifon àTyr; & cette affaire penfa renverser le royaume de Jerufalem: tant ce royaume étoit foible, ou les Templiers puiffans. Le roi Amauri fe juftifia auprés du prince des Assassins, à qui il fit connoître fon innocence: mais la mort qui l'enleva peu de tems aprés ne lui permit pas d'executer le deffein qu'il avoit, de communiquer cette affaire avec tous les princes pour reprimer les excés des Templiers & des Hofpitaliers. Il n'y avoit pas foixante ans que ces religieux étoient inftituez, & ils avoient déja tellement de- Vie-Salad-M.5; generé, que les écrivains Chrétiens & les Mahometans, d'ailleurs peu conformes en leurs jugemens, s'accorderent à les dépeindrec omme les plus mechans de tous les hommes. Dans leurs brigandages ils n'épargnoient pas plus les Chrétiens que les Infideles, avec lefquels ils ne gardoient ni traité ni parole. Le roi Amauri mourut de dyfenterie G.Ty.c.35. l'onziéme de Juillet 1173. la douzième année de fon regne & la trente-huitiéme de fon âge, & fut enterré prés de fon frere dans l'églife du faint fepulcre. iv.xxI. 6.1.6.2. Son fils Baudouin IV. lui fucceda à l'âge de treize ans; & fut facré dans la même église le dimanche quinziéme de Juillet, par le patriarche Amau AN. 1173. 32 XLIII. Afaffins.. Sup. l. LX. n. ri affifté de plufieurs prelats. Le comte de Tripoli eut la regence du royaume pendant le bas âge de Baudouin... Les Affaffins dont il eft fi-fouvent parlé dans nos hiftoires, étoient une fecte de Mufulmans dont l'origine remontoit jusques à l'an 278. de l'hegire,, Elmac. p. 174. 891. de Jesus-Christ. Car alors un prétendu prophete nommé Carmat, s'éleva. en Arabie vers Coufa, & attira un grand nombre de fectateurs, jeûnant, travaillant de fes mains, & faifant la priere cinquante fois par jour. Il promettoit d'établir un Iman ou Pontife de la famille d'Ali, prêchant la devotion à ce prétendu faint, & la revolte contre les califes pour venger fon fang. Il déchargea fes fectateurs des obfervances les plus penibles. de la religion, leur permettant de boire du vin, de manger de toute fortes de viandes ; & par cette licence jointe à l'efperance du butin, il forma une armée immense,& fit de grands ravages fur les ter res du calife. Il mourut laiffant douze principaux difciples en l'honneur des douze Imans defcendus d'Ali, & eut plufieurs fucceffeurs, dont le plus meux fut Abou-Taher, qui aprés avoir ravagé les Elmac. 194. provinces avec une armée de cent mille hommes, & enlevé les caravanes de pelerins, prit la Meque en 317. 929. fit égorger les pelerins dans le temple, emporta la pierre noire qui étoit l'objet de leur dévotion, & fit ceffer le pelerinage pendant douze ans, comme j'ai dit en fon lieu. Depuis les Carmatiens étant devenus plus foibles, diffimulerent leur religion fe mêlant avec les autres Muful Sup.liv. Lv.n.1. fa mans; ce qui les fit nommer Batenis, c'est-à-dire, Id. p. 236. , XLIV. Voïage de BenBenjamin. p.32. jamin. Le Juif Benjamin parle de ces Affaffins dans la relation de fes voyages, qui finit en 1173. Il les palce prés du mont Liban, & dit : Qu'ils fe rendent terribles en tous lieux, parce qu'ils tuent les rois en trahifon. Ce Juif étoit de Tudele en Navarre, & étant parti de Sarragoffe il parcourut la Catalogne & le bas Languedoc-; puis il s'embarqua à Marfeille & paffa en Italie. Il marque en chaque lieu le nombre des Juifs & leurs plus fameux docteurs. I dit que Rome eft la capitale de l'empire des 10 Th p.2.4. p. 28. 1.30. 4.31. p. 38. p. 41. ce, Chrétiens, qu'il y a environ deux cens Juifs en- à Pera. Benjamin paffa enfuite dans les ifles de l'Archipel, & trouva en Chipre des Juifs que les Rabbanistes nommoient Epicuriens, c'est-à-dire heretiques. Il marque Antioche comme étant encore une grande ville, & ayant un patriarche. Il trouva prés de Sidon des Drufiens, gens fans religion, & qui croient la metempsycofe. A Cefarée & à Naploufe qui eft Sichem, il trouva des Cuthéens ou Samaritains, dont il décrit les fuperftitions particulieres, leur en attribuant même de fabuleufes. Il dit que Jerufalem étoit une petite ville, mais fort peuplée, de Jacobites, de Syriens, de Grecs, de Georgiens & de Francs; & il n'y trouva que deux cens Juifs, teinturiers en laine & logez à un coin |