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A N. 1173.

met & vouloir embraffer la religion Chrétienne. I
envoya un des fiens à Amauri III. roi de Jerufalem,
lui faire des propofitions fecrettes, dont la princi-
pale étoit que fi les Templiers, qui avoient des
châteaux prés de fon état, vouloient remettre deux
mille écus d'or que fes fujets leur payoient tous les
ans, comme une efpece de tribut, & les traiter de-
formais charitablement, ils fe feroient bâtifer. Le
roi Amauri reçut avec joye cette ambassade, & leur
accorda la décharge des deux mille écus,refolut d'in-
demnifer lui-même les Templiers s'il en étoit befoin.
Aprés donc avoir retenu long-tems l'envoyé du
prince des Affaffins, il le renvoya avec un de fes gar-
des pour le conduire. Mais quand il eut paffé Tripoli,
comme il étoit prêt à entrer fur les terres de fon maî-
tre, il furvint des Templiers l'épée à la main, qui
tuerent cet envoyé, fans aucun égard à la foi publi-
que
ni à la fauve garde du roi.

Ce prince l'ayant appris entra dans une furieufe colere, & affembla les feigneurs, qui furent tous d'avis de ne point negliger cette affaire; qu'il n'y alloit pas feulement de l'autorité. royale, mais de l'honneur du nom Chrétien & de l'interêt de l'égli fe. On envoya donc deux feigneurs au maître des Templiers nommé Eudes de faint Amand, pour lui demander fatisfaction de cet attentat, que l'on difoit avoir été commis par un certain frere Guil laume du Mefnil, borgne, méchant homme, violent & emporté ; mais qui l'avoit fait avec la participation de fes confreres. Le maître du Temple répondit: Qu'il avoit mis le coupable en penitence;

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& qu'il l'envoieroit au pape en cet état. Que ce- AN. 1173. pendant il défendoit de la part du pape que personne ne fut affez hardi pour mettre la main fur ce religieux: à quoi, fuivant fon humeur hautaine, il ajoûta plufieurs paroles infolentes. Enfuite le roi étant venu à Sidon fit tirer par force de la maison des Templiers frere Guillaume du Mefnil qu'il mit en prifon àTyr; & cette affaire penfa renverser le royaume de Jerufalem: tant ce royaume étoit foible, ou les Templiers puiffans.

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Le roi Amauri fe juftifia auprés du prince des Assassins, à qui il fit connoître fon innocence: mais la mort qui l'enleva peu de tems aprés ne lui permit pas d'executer le deffein qu'il avoit, de communiquer cette affaire avec tous les princes pour reprimer les excés des Templiers & des Hofpitaliers. Il n'y avoit pas foixante ans que ces religieux étoient inftituez, & ils avoient déja tellement de- Vie-Salad-M.5; generé, que les écrivains Chrétiens & les Mahometans, d'ailleurs peu conformes en leurs jugemens, s'accorderent à les dépeindrec omme les plus mechans de tous les hommes. Dans leurs brigandages ils n'épargnoient pas plus les Chrétiens que les Infideles, avec lefquels ils ne gardoient ni traité ni parole. Le roi Amauri mourut de dyfenterie G.Ty.c.35. l'onziéme de Juillet 1173. la douzième année de fon regne & la trente-huitiéme de fon âge, & fut enterré prés de fon frere dans l'églife du faint fepulcre. iv.xxI. 6.1.6.2. Son fils Baudouin IV. lui fucceda à l'âge de treize ans; & fut facré dans la même église le dimanche quinziéme de Juillet, par le patriarche Amau

AN. 1173.

32

XLIII.

Afaffins..

Sup. l. LX. n.

ri affifté de plufieurs prelats. Le comte de Tripoli eut la regence du royaume pendant le bas âge de Baudouin...

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Les Affaffins dont il eft fi-fouvent parlé dans nos hiftoires, étoient une fecte de Mufulmans dont l'origine remontoit jusques à l'an 278. de l'hegire,, Elmac. p. 174. 891. de Jesus-Christ. Car alors un prétendu prophete nommé Carmat, s'éleva. en Arabie vers Coufa, & attira un grand nombre de fectateurs, jeûnant, travaillant de fes mains, & faifant la priere cinquante fois par jour. Il promettoit d'établir un Iman ou Pontife de la famille d'Ali, prêchant la devotion à ce prétendu faint, & la revolte contre les califes pour venger fon fang. Il déchargea fes fectateurs des obfervances les plus penibles. de la religion, leur permettant de boire du vin, de manger de toute fortes de viandes ; & par cette licence jointe à l'efperance du butin, il forma une armée immense,& fit de grands ravages fur les ter res du calife. Il mourut laiffant douze principaux difciples en l'honneur des douze Imans defcendus d'Ali, & eut plufieurs fucceffeurs, dont le plus meux fut Abou-Taher, qui aprés avoir ravagé les Elmac. 194. provinces avec une armée de cent mille hommes, & enlevé les caravanes de pelerins, prit la Meque en 317. 929. fit égorger les pelerins dans le temple, emporta la pierre noire qui étoit l'objet de leur dévotion, & fit ceffer le pelerinage pendant douze ans, comme j'ai dit en fon lieu. Depuis les Carmatiens étant devenus plus foibles, diffimulerent leur religion fe mêlant avec les autres Muful

Sup.liv. Lv.n.1.

fa

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mans; ce qui les fit nommer Batenis, c'est-à-dire, Id. p. 236.
Inconnus. Ils commencerent à être defignez par
ce nom, & à fe fortifier en Perfe l'an 483. 1090.
Hacen leur chef ayant été menacé par le fultan
Gelaleddoulet, commanda à un de fes fujets en
prefence de l'envoyé du fultan, de fe precipiter du
haut d'une tour, & à un autre de fe tuer, ce qu'ils
firent auffi-tôt. Alors Hacen dit à l'envoyé: Dites
à vôtre maître que j'ai foixante & dix mille hommes
prêts à en faire autant. Les Batenis ainfi cachez,
& déterminez à tout commencerent à attenter
fur la vie des princes; & en tuerent plufieurs, fans
qu'on pût fe garentir de leurs trahifons. Entre un
grand nombre je remarquerai feulement Hamaded-
din Zengui fultan d'Alep, qui fut ainsi tué l'an 540.
1145. Comme les Batenis n'avoient ordinairement
d'autres armes qu'un poignard, on les nomma Haf-`
fiffins, d'où nous avons fait le nom d'Affaffins. Nos
hiftoriens ont nommé leur chef le vieillard de la
montagne, traduifant mot à mot le titre qu'on lui
donnoit en Arabe. -

,

XLIV.

Voïage de BenBenjamin. p.32.

jamin.

Le Juif Benjamin parle de ces Affaffins dans la relation de fes voyages, qui finit en 1173. Il les palce prés du mont Liban, & dit : Qu'ils fe rendent terribles en tous lieux, parce qu'ils tuent les rois en trahifon. Ce Juif étoit de Tudele en Navarre, & étant parti de Sarragoffe il parcourut la Catalogne & le bas Languedoc-; puis il s'embarqua à Marfeille & paffa en Italie. Il marque en chaque lieu le nombre des Juifs & leurs plus fameux docteurs. I dit que Rome eft la capitale de l'empire des 10 Th

p.2.4.

p. 28.

1.30.

4.31.

p. 38.

p. 41.

ce,

Chrétiens, qu'il y a environ deux cens Juifs en-
tre lefquels font des officiers du pape Alexandre,
dont le plus diftingué eft un jeune homme nommé
Rabbi Jehiel fon intendant. Il dit que le
pape est
le grand évêque de toute la religion Chrétienne.
Benjamin s'étant embarqué à Otrante passa en Gre-
& vint à Constantinople, où regnoit l'empe-
reur Manuel. Là, dit-il, eft le pape des Grecs, parce
qu'ils ne fuivent pas la religion du pape de Rome;
& il parla avec admiration de la richeffe des églises.
Il compte
à Conftantinople environ deux mille
Juifs Rabbanistes, & cinq cens Caraïtes, entiere-
ment feparez les uns des autres. Les Caraïtes font
ceux qui s'attachent uniquement au texte de l'écri-
ture, rejettant les traditions des Rabbins; que
les Rabbanistes reçoivent. Il dit que les Juifs logeoient

à Pera.

Benjamin paffa enfuite dans les ifles de l'Archipel, & trouva en Chipre des Juifs que les Rabbanistes nommoient Epicuriens, c'est-à-dire heretiques. Il marque Antioche comme étant encore une grande ville, & ayant un patriarche. Il trouva prés de Sidon des Drufiens, gens fans religion, & qui croient la metempsycofe. A Cefarée & à Naploufe qui eft Sichem, il trouva des Cuthéens ou Samaritains, dont il décrit les fuperftitions particulieres, leur en attribuant même de fabuleufes. Il

dit

que Jerufalem étoit une petite ville, mais fort peuplée, de Jacobites, de Syriens, de Grecs, de Georgiens & de Francs; & il n'y trouva que deux cens Juifs, teinturiers en laine & logez à un coin

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