AN. 1176. Son conference. Mais comme l'affaire étoit difficile, à Avant que ment par tous les feigneurs Allemans qui étoient AN. 1176. prefens. On convint de part & d'autre que la conference du pape avec l'empereur fe feroit à Boulogne. D'un autre côté le pape fit prier Guillaume roi de Sicile de lui envoyer quelques-uns des grands de fa cour, pour affifter à cette conference ; & le roi chargea de cette commiffion Romuald archevêque de Salerne & Roger comte d'Andri grand coneftable & grand justicier de la Poüille & de la terre de Labour. à Ve こ Le pape partit d'Anagni le fixiéme de Decembre & vint à Benevent, où il demeura depuis Noël jufques à l'Epiphanie. Il attendit un mois le vent favorable au port de Guaft fur la mer Adriatique avec les galeres du roi de Sicile. Enfin le mercredi des cendres neuviéme de Mars 1177. aprés la meffe & la diftribution des cendres, il s'embarqua avec cinq cardinaux & les envoyez du roi de Sicile fur onze galeres de ce prince; & le dimanche fuivant ils arriverent à Zara en Dalmatie, où ils furent reçus avec d'autant plus de joye que jamais pape n'y étoit entré. On lui prepara un cheval blanc fur lequel il monta fuivant l'ufage de Rome, & on le mena ainfi en proceffion par le milieu de la ville jufques à la grande église dediée à fainte Anaftafie vierge & martyre dont le corps y repofe, cependant on chantoit les louanges de Dieu en Sclavon qui eft la langue du pays. Quatre jours aprés le pape partit de Zara & arriva à Venise le vingt troifiéme de Mars. Il alla defcendre au monaftere de faint Nicolas au Lido ; & le lendemain le duc & 1 duc de Venise vint le recevoir avec le patriarche AN. 1177. d'Aquilée & tous fes fuffragans,& un grand peuple en quantité de barques. Aprés s'être mis humblement aux pieds du pape, ils le menérent en proceffion à l'églife de S. Marc, ou ayant fait fa priere il donna la benediction au peuple; puis le duc le conduifit dans la barque an palais du patriarche où il logea. Le jour de l'Annonciation à la priere du duc & des grands, il celebra la meffe folemnellement avec les cardinaux dans l'église de S. Marc. L'empereur Frideric étoit cependant à Cesene, où ayant appris que le pape étoit à Venise, il lui envoya l'archevêque de Magdebourg, l'évêque élu de Vormes & fon protonotaire, pour le prier de changer le lieu de la conference; parce que Chriftien fon chancelier ne croyoit pas pouvoir être en fureté à Boulogne, à caufe des maux qu'il y avoit faits pendant la guerre. Le pape répondit : C'est de l'avis de nos legats & des Lombards, que l'empereur a reglé que le lieu de la conference feroit à Boulogne; nous ne pouvons donc le changer fans le confentement des Lombards & des cardinaux qui font en ces quartiers-là. C'eft qu'une partie des cardinaux étoient allez pat terre en Lombardie avant que le pape s'embarquât avec les autres. Le pape ajoûta: Toute fois pour accelerer la paix, nous irons inceffamment jufques à Ferrare avec nos freres les cardinaux, pour y refoudre avec les recteurs des Lombards ce qui fera le plus convenable; &.il marqua le Dimanche de la paffion dixiéme d'Avril pour le jour du rendez-vous à Ferrare. Cependant Tome XV. Hhh AN. 1177. III. are. voulant fatisfaire le peuple qui accouroit de tous cotez avec empressement pour le voir, il celebra solemnellement la Meffe à faint Marc le quatriéme dimanche de carême, prêcha aprés l'évangile, & aprés la meffe donna au duc de Venife la rofe d'or. Le pape partit de Venife la même semaine fur onze galeres, & remontant le Pô arriva en fa ville de Ferrare le dimanche de la Paffion. Le lendemain y arriverent le patriarche d'Aquilée, les archevêques de Ravenne & de Milan avec les évêques leurs fuffragans, les recteurs des villes de Lombardie, les marquis & les comtes. Ils s'affemblerent le lendemain dans la grande église dediée à faint George avec une multitude innombrable de peuple, le pape leur dit : Vous favez, mes chers enfans, la perfecution que l'église a foufferte de la part de l'empereur qui devoit la proteger; vous favez que l'autorité de l'églife Romaine en a été affoiblie, parce que les pechez demeuroient impunis & les canons fans execution, outre les autres maux ; la deftruction des églifes & des monafteres, les pillages, les incendies, les meurtres & les crimes de toutes fortes. Dieu a permis ces maux pendant dix-huit ans; mais enfin il a appaifé la tempête & tourné le cœur de l'empereur à demander la paix. C'est un miracle de fa puiffance qu'un prêtre vieux & defarmé ait pû resister à la fureur des Allemans & vaincre fans guerre un empereur fi puiffant, mais c'est afin que tout le monde connoiffe qu'il eft impoffible de combattre contre Dieu. Or quoique l'empereur nous ai fait demander la 2 paix à Anagni pour l'églife, & pour le roi de Sicile, AN. 1177. Aprés que le pape eut parlé, les Lombards qui ich |