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cré par le miniftere d'un prêtre indigne ou crimi- AN. 1178. nel. Plusieurs témoignerent qu'ils leur avoient oui dire, que l'homme & la femme fe rendant le devoir conjugal ne pouvoient être fauvez. D'autres leur foûtenoient en face qu'ils avoient dit que le batême ne fert de rien aux enfans, & plufieurs autres blafphêmes abominables.

Comme Raimond & Bernard difoient que c'étoit de faux témoins, on les preffa de confirmer par ferment leur confeffion de foi: mais ils le refuferent, difant que N. S. dans l'évangile défend Matt.. v. 34° abfolument de jurer. On leur reprefenta que faint Heb. v1. 16. Paul dit que le ferment eft la fin de toute difpute; Pfcix. & qu'il releve le ferment de Dieu touchant le facerdoce de fon fils. On allegua plufieurs autres paffages de l'écriture, pour montrer qu'il eft permis de jurer à cause de la foibleffe de ceux que nous voulons perfuader. Enfin ces heretiques ne s'apercevoient pas, qu'ils avoient eux-mêmes appofé un ferment dans la confeffion de foi qu'ils avoient donnée par écrit, en disant: Par la verité qui est Dieu nous croirons ainfi. Et ils ne favoient pas que c'est jurer que d'apeler en témoignage de nos discours la verité & la parole de Dieu, comme fait l'apôtre quand il dit: Nous vous difons par la pa- 1. Thess. xv. 14. role de Dieu, & ailleurs: Dieu m'eft témoin, Rom. 1. 9. Ce font les refléxions du légat Pierre dans la lettre dont eft tiré ce recit. Raimond & Bernard parurent suffisamment convaincus par tant de témoins, & plufieurs autres fe préparoient encore à dépofer contre eux : toutefois pour user de mi

AN. 1178, fericorde fuivant l'efprit de l'églife, le legat les exhorta à abjurer leur herefie, & à fe faire abfoudre de l'excommunication prononcée contre eux par le pape, par les archevêques de Bourges & de Narbonne, l'évêque de Toulouse & le legat luimême. Mais ils le refuferent & demeurerent dans leur endurcissement. C'est pourquoi les deux legats les excommunierent de nouveau avec les cierges allumez, en prefence de tout le peuple furieufement animé contre ces herétiques, comme il le marquoit par fes acclamations continuelles. C'est ce que témoigne le legat Pierre dans fa lettre adreffée à tous les fideles: où il leur enjoint d'éviter Raimond & Bernard & leurs complices, comme excommuniez & livrez à fatan, & de les chaffer de leurs terres. Le comte de Toulouse & les autres feigneurs du païs promirent par ferment devant tout le peuple de ne point favorifer les herétiques.

XIV.

Fin de Saint Anthelme évêque de Bellai.

Vita. ap. Sur. 26.

Juin c. 18. Sup. liv. Lxx. n. 6s

C. 7.n.4.

Cette année 1178. fut la derniere de S. Anthelme évêque de Bellai. Depuis fon épiscopat il ajoûta plûtôt à fes aufteritez corporelles qu'il n'en diminua. Il faifoit l'office divin non dans fa chapelle › mais dans la cathedrale avec les chanoines, pour s'en acquiter avec plus de dignité. Il disoit la messe prefque tous les jours, ce qui ne lui étoit auparavant permis que rarement. Ce font les paroles de l'auteur de fa vie. C'eft que chez les Chartreux il n'y avoit gueres, même le Dimanche, que la meffe conventuelle, comme font entendre les ftatuts de Guigues. Anthelme eut grand foin de

du

C. 20.

purifier fon clergé & aprés les exhortations chari-
tables, il dépofa fix ou fept prêtres concubinaires. Vita G. 19.
Humbert comte de Savoïe avoit fait emprifon-
ner un prêtre, que le faint évêque fit delivrer mal-
gré le prévôt; & comme il s'enfuyoit les gens
prévôt le tuerent. Deplus le comte avoit des pre-
tentions fur quelques terres de l'églife, qu'il difoit
être de fon domaine; Anthelme l'exhortoit à s'en
defifter, & à faire fatisfaction pour le meurtre du
prêtre fous peine d'excommunication; mais le com-
te le menaça de fon côté, disant qu'il avoit pri-
vilege du pape pour ne pouvoir être excommu-
nié. Anthelme ne laiffa pas de l'excommunier &
en sa presence ; ce qui le fit entrer en fureur, &
les assistans disoient qu'une telle temerité meri-
toit la mort. Mais le prélat loin de s'en effrayer
repeta l'excommunication en termes plus forts;
s'eftimant heureux s'il eût fouffert le martyre pour
une fi bonne caufe. Le comte fe plaignit au pa-
pe de l'infraction de fon privilege, & le pape or-
donna à faint Pierre de Tarentaife qui vivoit enco-
re, & à un autre évêque de faire abfoudre le com-
te Ou de l'abfoudre eux-mêmes au refus de l'évê-
que de Bellai, dont il connoiffoit la fermeté. Les
évêques s'acquitterent de leur commiffion & pref-
ferent Anthelme d'obéir au pape & d'appaiser le
prince; mais il répondit: Celui qui est lié jufte-
ment ne doit point être delié qu'il n'ait fatisfait
la penitence à celui qu'il a offenfé. Saint
Pierre lui-même n'a pas reçû le pouvoir de lier
ou de délier ce qui ne le doit pas être. Soyez donc

par

c. 228

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affûrez que je ne me relâcherai point de la fentence que j'ai prononcée. Les deux prélats se retirerent fans ofer paffer outre; mais le pape l'ayant appris, donna l'abfolution au comte & le fit favoir à Anthelme.

Il en fut tellement touché, qu'il quitta fon fiege & fe retira dans fa cellule de la Chartreufe; mais fur les plaintes de tout le pays le clergé de Bellai obtint des lettres du pape en vertu defquelles il le fit revenir : & le comte de Savoïe ne fe tint point abfous & n'ofa entrer dans l'églife, jufques à ce que s'étant humilié devant le faint prélat, il reçut fon abfolution. Comme il ne fe corrigeoit point & n'accompliffoit pas fes promeffes, ils fe brouillerent encore ; & toutefois le comte dans les tems même qu'il haïffoit & menaçoit le prélat, ne laiffoit pas de le respecter. En effet Anthelme s'étoit acquis par fa vertu une merveilleufe autorité. Tout l'ordre des Chartreux le regardoit comme fon fuperieur, & tous les prieurs étoient fous fa dépendance; auffi veilloit-il avec un grand zele fur ce faint ordre pour y prevenir le €. 24. moindre relâchement. Quand il fe trouvoit dans des conciles ou dans des effemblées pour affaires temporelles, il n'y avoit ni évêque ni autre de quelque rang qu'il fut qui ne lui cedât: la cour de Rome elle-même le refpectoit. Auffi ne feignoit il point de reprendre en qui que ce fut ce qui étoit reprehenfible; & comme on voyoit que fes corrections n'avoient pour principes que la charité, la plûpart les recevoient volontiers.

6.23.

pe

Mais il avoit une grande indulgence pour les AN. 1178. cheurs penitens & mêloit fes larmes avec les leurs. Pendant la maladie dont il mourut on l'exhor- c. 25. toit à pardonner au comte de Savoïe avec lequel il étoit encore en differend; mais il répondit: Je n'en ferai rien, s'il ne fe défifte de fon injufte prétention, s'il ne promet de ne jamais rien demander à cette église, & ne se reconnoît coupable de la mort de ce prêtre. Perfonne n'ofoit rapporter ce discours au comte, qui étoit dans le même lieu il n'y eût que deux Chartreux qui s'en chargerent; & le comte touché de Dieu fondit en larmes, vint trouver le faint homme, reconnut fa faute, renonça à la prétention & demanda pardon. Anthelme lui impofa les mains & pria Dieu de lui donner fa benediction à lui & à fon fils. Comme le compte n'avoit qu'une fille, on crut que le prelat fe méprenoit & on voulut lui faire dire la fille; mais il repeta plufieurs fois le fils ; & en effet il en vint un au comte peu de tems aprés la mort d'Antelme. Elle arriva le vingt-fixiéme de Juin 1178. la quinziéme année de fon épiscopat. Il avoit vécu plus de foixante & dix ans, & l'église honore fa memoire le jour de fa mort. Son fucceffeur Martyr. R. 26: dans le fiege de Bellai fut Rainald tiré comme lui de la grande Chartreufe, qui fix ans aprés eut pour fucceffeur Arnaud auffi Chartreux.

jun. Gall. Chri

to. 2. p. 364.

X V.

Fin de fainte

Environ trois mois aprés mourut fainte Hildegarde abbeffe du mont faint Rupert prés de Mayen- Hildegarde. ce, dont les revelations avoient été approuvées par Sup. liv. LXIX. le pape Eugene III. trente ans auparavant. Elle Mmm

Tome XV.

n. 37.

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