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la fuite mettant toi au licu de vous, car l'usage AN. 1159. étoit établi depuis long-tems de nommer au pluhonneur celui à qui on parle. Or l'empereur difoit que le pape en lui écrivant devoit fuivre l'ufage de fes prédeccffeurs, ou qu'il devoit luimême obferver le ftile des anciens empereurs.

epift. 6.

Radev. p. 563.

26.

Le pape répondit à la lettre de l'empereur, fe plaignant qu'il manquoit & au refpect qu'il lui devoit & à la foi qu'il lui avoit jurée, en se faisant rendre hommage par les évêques, & défendant aux legats du faint fiége l'entrée non-feulement des églifes, mais des villes de fon royaume. Il concluoit en le menaçant de la perte de fa couronne, s'il ne Append. ad devenoit plus fage. L'empereur repliqua encore plus ficrement, foutenant qu'il ne tenoit fa couronne que de fes predeceffeurs, & il ajoûta : Du tems de Conftantin S. Silveftre avoit-il quelque part à la dignité royale ? C'eft ce prince qui a rendu à l'églife la liberté & la paix ; & tout ce que vous avez comme pape vient de la liberalité des cmpereurs. Lifez les hiftoires vous y trouverez ce que nous difons. Et pourquoi n'éxigerons - nous pas l'hommage de ceux qui poffedent nos regales puifque celui qui n'avoit rien reçu des hommes Matth. xvII. paya paya le tribut à Cefar pour lui & pour S. Pierre ? Qu'ils nous laiffent donc nos regales, ou s'ils jugent qu'elles leur font utiles, qu'ils rendent à Dieu ce qui eft à Dieu, & à Cefar ce qui est à Cefar. Nos églifes & nos villes font fermées à vos cardinaux, parce que nous ne croyons pas qu'ils viennent prêcher l'évangile & affermir la paix,

mais piller & amaffer de l'or & de l'argent avec une avidité infatiable. Quand nous les verrons tels que l'églife defire, nous ne leur refuferons pas le falaire & la fubfiftance. Vous bleffez l'humilité & la douceur en propofant aux feculiers ces questions peu utiles à la religion: car nous ne pouvons nous difpenfer de répondre à ce qu'on nous dit, quand nous voyons que l'orgueil, cette bête detestable,. s'eft gliffée jufques à la chair de S. Pierre. Ce que que l'empereur dit icy que le pape tient tout ce qu'il a de liberalité des princes, ne fe raporte qu'au temporel, comme la fuite du difcours le fait affez voir; & fuppofe toûjours la prétenduë donation de Conftantin.

AN. 1159.

Rodev. 11. c. 19.

Les efprits s'échaufoient de plus en plus; & l'on prétendoit même avoir intercepté des lettres du pape, par lesquelles il excitoit à la revolte Milan & quelques autres villes. Alors Henri Cardinal du titre de S. Nerée, qui avoit été à Ausbourg un des mediateurs de la paix entre le pape & l'empereur, écrivit à Eberard évêque de Bamberg, qui Sup. n. 25. avoit travaillé avec lui à ce traité en la même qualité, pour l'exhorter à combattre par fes confeils pour l'honcur & la liberté de l'églife. Car, ajoûtet-il, tant que les affaires feront gouvernées par des feigneurs laïques, qui ne favent ni les canons ni les regles de la religion, la paix ne pourra s'affermir. L'évêque de Bamberg répondit, qu'il étoit fenfiblement affligé de ce commencement de divifion : toutefois il excufe l'empereur; foûtient que le mal vient de ce que perfonne ne veut fai

AN. 1159.

Id. c. 201.

Id. c. 29.

Le

XXXI.

pape

détour

voïage d Espagne.

que

re les avances de la reconciliation. Or il prétend c'eft aux Romains comme les mieux inftruits à prevenir les autres, & à les inftruire avec douceur. Il écrivit au pape ufant d'une liberté refpectueufe & lui dit : Il est à craindre que les paroles dures de part & d'autre venant à fe choquer, ne produifent un feu qui s'étende loin dans le facerdoce & l'empire. Et enfuite: Il me femble qu'il n'eft pas expedient de tant pefer les paroles & d'en tant demander raison. Il vaut mieux éteindre le feu au plus vîte que de disputer de quel côté il est venu. Ecrivez tout de nouveau à l'empereur d'un ftile doux & le ramenez avec vôtre bonté paternelle, il eft difpofé à vous rendre toute forte de refpect.

L'évêque de Bamberg qui écrivit ces lettres étoit un prelat diftingué par fa doctrine & la pureté de fes mœurs. Il avoit une telle affection pour l'étude de l'écriture fainte qu'il en meditoit continuellement les divers fens, même à la guerre ; & en faifoit fa confolation au milieu des foins dont il étoit occupé pour les affaires publiques. Car l'empereur avoit une confiance particuliere en fes confeils & partageoit avec lui la conduite de fes états: auffi le prelat étoit connu pour fingulierement affectionné au bien & à l'honneur de l'empire.

Henri roi d'Angleterre invité par le roi de ne le roi de Fr. du France Louis le Jeune vint à Paris en 158 & Chr. Gervas y fut reçu magnifiquement. Ils confirmerent le Matth. Paris. mariage qu'ils avoient conclu entre leurs enfans: c'est-à-dire entre Henri, fils aîné du roi d'Angleterre âgé de trois ans, & Magucrite fille

an. 1158.

cod.

du roi de France, qui venoit de naître.

AN. 1159.

ep.25

Il y a grande apparence que ce fut en cette occafion qu'ils refolurent d'aller ensemble en Espagne faire la guerre aux infidelles. Le roi Louis affembloit déja fes troupes & faifoit les preparatifs de fon voïage, quand pour y mieux réüffir il envoïa demander au pape Adrien fon confeil & fa faveur : c'est-à-dire une bulle d'indulgence pour exciter les François à ce voïage. Le lui réponpape dit loüant fon zele, mais reprenant fon empreffement. Il ne paroît, ajoûte-il ni, prudent ni fûr d'entrer dans un païs étranger, fans avoir demandé l'avis des feigneurs & du peuple du païs : au lieu d'attendre qu'ils vous en euffent prié eux-mêmes. C'est pourquoi nous vous confeillons de favoir auparavant leur volonté : autrement il feroit à craindre que vôtre voïage ne fût fans fruit, qu'il ne leur fût même à charge & qu'on ne nous accufât de legereté. Car vous devez vous fouvenir, que vous entreprîtes autrefois avec le roi Conrad le voïage de Jerusalem, sans avoir conful- sup. liv. 1x11. té ceux qui étoient fur les lieux, ni pris affez de précaution. Vous favez le mauvais fuccés de ce voïage, & les reproches que s'attira l'église Romaine pour vous l'avoir confeillé. Toutes ces confiderations nous ont fait differer l'exhortation au peuple de vôtre roïaume, que Rotrou évêque d'Evreux nous demandoit de vôtre part : nous l'envoïerons quand vous ferez prêt à partir à la priere deş gens du païs. Mais nous vous avons accordé dès-à-prefent nos lettres de protection, con

2.22

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XXXII. Ordre Calatra

Roder vil.

Mariana. XI C.

C.

tre ceux qui voudroient attaquer vôtre roïaume pendant vôtre absence. La lettre est dattée du dix-huitième de Février apparemment de l'an 1159. & porte créance en faveur de l'évêque d'Evreux, dont le pape loüe la vertu & la prudence. Il étoit fils de Henri comte de Varvic, & avoit été difciple de Gilbert de la Poirée, puis archidiacre de Rouen, dont il fut enfuite archevêque.

Vers le même tems commença en Espagne un nouvel ordre militaire. Le bruit s'étant répandu que les Arabes venoient attaquer avec une grande armée la petite ville de Calatrave en Castille : les Templiers qui en tenoient la forteresse craignirent de ne la pas pouvoir deffendre, & la remirent au roi Sanche II. Ce prince étoit alors à Tolede où fe trouva Raimond abbé de Fitere de l'ordre de Cifteaux avec un de fes moines nommé Diego Velasquez, homme noble qui avoit porté les armes, & été élevé dans fa jeunesse auprès du roi. Ce moine voïant le roi en peine du danoù se trouvoit Calatrave, conseilla à son abbé de la demander au roi ; & l'abbé qui d'abord y avoit repugnance se laissa perfuader, la demanda & l'obtint, contre l'opinion de quelques-uns qui trouvoient la propofition impertinente. L'abbé avec fon moine alla auffi-tôt trouver Jean archevêque de Tolede, qui approuvant leur dessein y contribua de fes biens, & fit prêcher que tous ceux qui iroient au fecours de Calatrave auroient le pardon de tous leurs pechez. C'est le premier exemple que je fache d'une indulgence pleniere

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