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Vinchestre ; le dimanche de l'octave de Pâques AN. 1194. dix-feptiéme d'Avril. Depuis ce tems, l'archevê- Roger. p. 738. Hubert eut en Angleterre la principale auto

que

rité aprés le roi, qui le fit fon chancelier, fon grand jufticier, regent du royaume en fon abfence; & Goduin; obtint pour lui du pape Celestin, la légation d'Angleterre.

Le pape avoit reçû de grandes plaintes contre Geofroi archevêque d'Yorc, frere naturel du roi Richard; tant de la part du chapitte de la cathedrale, que de plufieurs abbez, dont il y en avoit deux de l'ordre de Prémontré. On accufoit l'archevêque de négliger fes fonctions, pour s'appliquer à la chaffe & aux autres amusemens de la nobleffe; de n'avoir fait depuis fa promotion ni ordination des clercs, ni dédicaces d'églises, ni benedictions d'abbez, ni tenu de fynodes. De medire volontiers des clercs & des abbez, & de les excommunier legerement. De ruiner les libertez & les bonnes coutumes de fon église. De mépriser les appellations à Rome, & avoir fait mettre en prifon plusieurs perfonnes pour y avoir appellé;d'avoir excommunié ou privé de leurs benefices des chanoines après leur appel. On difoit encore, que ce prélat n'avoit aucun égard aux privileges des papes, & qu'au contraire, ils nuifoient à ceux qui les produifoient devant lui. Que loin d'executer les jugemens des déleguez du faint siege, il s'en offenfoit ; & chaffoit avec violence ceux que ces juges avoient remis en poffeffion. Qu'il refufoit les perfonnes capables prefentées pour remplir les églises Tome XV.

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XLV. Plaintes contre

Geofroi archer d'Yerc.

Celeft. ep. S.

ap. Roger. p. 7493

AN. 1194.

vacantes, & y mettoit de fa feule autorité des enfans ou des perfonnes décriées; ou s'en appliquoit les fruits fans qu'elles vacaffent. Que fouvent en conferant les benefices il les coupoît ou les chargeoit de pensions à fon profit, & qu'il faisoit payer l'abfolution des cenfures.

Roger. p.749.750

Surces plaintes le pape donna commission à faint Hugues évêque de Lincolne, avec un archidiacre & un prieur, d'aller à Yorc & d'en faire des informations exactes.S'il fè presente, dit-il, des accufateurs legitimes, vous les écouterez & nous envoyerez leurs dépofitions clofes fous vos feaux; affignant aux parties un terme competant pour fe prefenter au faint fiege. S'il n'y a point d'autres accufateurs contre l'archevêque que la commune renommée, vous lui prefcrirez la purgation canonique, avec trois évêques & trois abbez ; & s'il ne peut y fatisfaire, vous le fufpendrez de fes fonctions, & nous l'envoyérez pour être inftruit de fes devoirs. S'il propofe quelque reproche contre fes accufateurs, vous nous l'envoyerez auffi fous vos feaux. Mais fi pour éluder nôtre mandement avant que d'avoir reçû votre citation, il appelle ou se met en chemin pour venir à Rome, vous lui donnerez un terme de trois mois, pour se prefenter en perfonne devant nous ; à faute de quoi vous le déclarerez dés lors fufpens de toute fonction. La lettre eft dattée de Rome le huitiéme de Juin 1194.

L'évêque de Lincolne & fes deux collegues s'acquitterent fidelement de leur commission. Ils

vinrent à Yorc le dimanche aprés l'épiphanie hui- AN. 1195.

tiéme Janvier 1195. & ayant affemblé dans la cathedraleles abbez & tout le clergé du diocese,ils informerent fur tous les articles contenus dans leur commission, en presence des clercs de l'archevêque, qui dirent, qu'il avoit apellé & pris le chemin de Rome. Les commiffaires y envoyerent les informations, donnant à l'archevêque un délai de six semaines au-delà des trois mois accordez par le pape; & marquant à ses adversaires pour terme de leur comparution devant le pape le premier jour de Juin de la même année 1195.

XLVI. Fermeté de S: Hugues de Ling

Sure 17. Nove

Il n'y avoit perfonne en Angleterre plus capable d'executer une telle commiffion que S. Hugues de Lincolne, dont la vertu étoit connue de tout le colue, monde, particulierement fon attachement inviolable à la justice, fon zele pour la défense des oprimez & fon courage intrepide pour refifter aux puiffances. Auffi les papes fous lefquels il vêcut lui déleguerent les affaires les plus importantes de toute la province,comme dit l'auteur de fa vie ; & il ajoû- vita c. 23: aps te, que le S. prélat avoit reçû de Dieu une telle grace pour difcerner le juste de l'injuste; que les plus habiles jurifconfultes difoient, n'avoir jamais vû fon pareil pour la décifion des caufes les plus difficiles, quoi qu'il n'eût point étudié cette fcience. Ceux qui avoient de bonnes causes étoient ravis de l'avoir pour juge, ne craignant de fa part ni negligences, ni foibleffe pour se laiffer ébranler aux menaces ou aux prefens.

Le roi Richard aprés fon retour en Angleterre 1

AN. 1195. paffa en Normandie & fit la guerre au roi Philippe, qui étoit entré sur ses terres. Ayant besoin d'argent pour foûtenir cette guerre, il envoya en Angleter re l'archevêque, j'entens Hubert de Cantorberi, avec ordre d'affembler les évêques & les autres prélats, & leur demander un fubfide. Saint Hugues ayant examiné l'affaire attentivement, & trouvant qu'elle tourneroit à la charge du pauvre peuple, répondit qu'il ne confentiroit point à l'execution de cet ordre, & il fe trouva un autre évêque, qui ayant oui les raifons qu'il déduisoit amplement, fe rangea à fon avis. L'archevêque le trouva fort mauvais & retourna promptement porter fes plaintes au roi ; qui outré de colere dit à un de ses courtifans: Autant que tu aime ma vie, je te commande de ruiner entierement Hugues & l'évêque qui s'eft attaché à lui. Ce dernier évêque fut donc chaffé de son siege, tous ses biens confisquez, & il demeura quelque tems banni du royaume. Enfin par le fecours de fes amis, il fut reçû à fe jetter aux pieds du roi, implorant fa clemence & promettant de ne jamais s'opposer à fes volontez.

Mais quand il vint des gens armez pour traiter de même l'évêque de Lincolne, avant qu'ils euffent touché à rien, il les fit tous dénoncer excommuniez au fon des cloches dans les paroiffes voisines. Sa magnanimité les étonna, & ils fe retirerent fans rien faire car on craignoit terriblement les cenfures du prélat, qui fouvent étoient fuivies de morts fubites & affreufes, de poffeffions

*

AN. 1195

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'du demon, ou d'autres marques fenfibles de la ven-
geance divine. Toutefois craignant en cette occa-
fion d'attirer fur fon troupeau les effets de l'indi-
gnation du roi, il alla le trouver, quoi qu'éloigné,
prenant le peril fur lui. Comme il approchoit de
la cour quelques gens de bien vinrent au-devant,
le priant de fe retirer, & ne fe pas prefenter au-
roi, de peur que fa mort n'attirât la colere de
Dieu fur le royaume, comme la mort de faint Tho-
mas. Mais il n'acquiefça pas à cette propofition;
& comme un de ceux qui la faifoit s'offroit pour
médiateur, il lui répondit : Quoi, vous voulez que
je m'épargne pour vous mettre en danger, vous
& vos enfans? Auffi-tôt il entra chez le roi, & fa→
chant qu'il entendoit la meffe à la chapelle, il y
alla, & s'approchant du roi, il lui dit hardiment :
Donnez-moi un baifer. Vous ne l'avez pas merité
répondit le roi. Je l'ai merité,reprit l'évêque, par-
ce que je fuis venu de loin vous trouver. Vous me
devez un baifer ; & il le tiroit avec force
par fon
manteau. Le roi fe baiffa en fe foûriant & lui donna:
le baifer.

2

Les évêques & les autres assist̃ans, voyant Hugues triompher ainsi du roi, étoient hors d'euxmêmes d'étonnement; & le roi voyant fa fermeté, & que laiffant la place des évêques, il s'étoit mis prés de l'autel pour prier avec plus de liberté; commença à le refpecter du fond du cœur, & quand on lui prefenta l'inftrument de paix, il le fit premierement porter à l'évêque de Lincolne. On attribua à cet honneur qu'il avoit rendu au faint prélat

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