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accordée par autre que par le pape.

a

Le roi de fon côté donna à l'abbé & au monaftere de Fitere la ville & le château de Calatrave : l'abbé Raimond & le moine Diego y vinrent, mais les Arabes ne l'attaquerent point: toutefois plufieurs qui étoient venus au fecours se rangerent fous l'ordre de Cisteau avec un habit plus convenable aux exercices militaires, & commencerent à faire des courfes fur les Arabes & leur livrer des combats avec un heureux fuccez. Alors l'abbé Raimond retourna à son monaftere, d'où il amena les troupeaux & les meubles, n'y laissant que les infirmes, & les personnes necessaires pour le fervice de la maison. Il fut fuivi d'environ vingt-mille hommes, qui vinrent peupler Calatrave, & étant mort quelque tems après il fut regardé comme faint. Tels furent les commencemens de l'ordre de Calatrave en 1158. Il fut confirmé en 1164. par le pape Alexandre III. fous le premier

maître nommé Garcia.

An. 1159.

xxxIII.

Hugues de

Champ fleuri

chancelier deFran

ce.

epift. 20.

Hugues de Champ-fleuri chancelier du roi de France avoit efficacement travaillé à l'union du roi fon maître avec celui d'Angleterre, comme il paroît par une lettre du pape Adrien, où il lui en témoigne fa fatisfaction; & par plufieurs autres on void le foin qu'il prenoit de lui procurer & lui conferver des benefices. Hugues étoit chanoine de Paris & d'Orleans, & le pape ordonna à l'un & à l'autre chapitre de lui conferver les revenus de p.11. fa prebende en quelque lieu qu'il fût. Par une autre lettre il prie Thibaut évêque de Paris de

epift. 11.14.

ef.24.

AN. 1159.

ces.

cp. 10.

lui doner le premier perfonat ou dignité qui vaquera dans fon églife; & par un autre il ordonne aux chanoines de Paris d'accorder au chancelier Hugues la premiere dignité dans leur églife, & les premieres maifons dans leur cloître qui viendront à vaquer. Le pape lui confirma auffi la poffeffion du grand archidiaconé d'Arras dont il avoit été pourvû par l'évêque Godefroi; mais parce que l'évêque en lui donnant ce benefice l'avoit fait p. 12, 16. jurer de lui refigner la chancellerie, le pape l'abfout de ce ferment comme illicite. Le pape fe plaint encore à l'évêque d'Arras de ce qu'en donnant à Hugues l'archidiaconé, il lui avoit ôté une. églife dont il étoit en poffeffion. Il en ordonne la restitution, & prie l'archevêque de Reims d'y tenir la main. Ce font les premiers exemples que jai remarqué de difpenfes du pape pour la refidence ou la pluralité des benefices; & de recommandations ou mandats, pour engager les ordinaires à promettre des benefices avant qu'ils vaquaffent. Or la fuite en fera voir l'importance. Hugues de Champ-fleuri fut pourvû de l'évêché de Soiffons après le decés d'Anfeulfe arrivé le dix-neuf de Septembre 1159. & demeura toutefois chancelier de France,

p.17. 18. 19.

Gall. Chr.

XXXIV. Pierre Lombard

Rob. de Mote.

La même année 1159. mourut Thibaud évêque maître des fenten- de Paris ; & par fa mort l'évêché & la regale étant venuë en la main du roi, il dona la chevecerie année.1158. qui en faifoit partie aux religieufes d'Hiere, pour Gall. Chr. to. en jouir toutes les fois que le ficge feroit vaquant. C'est le premier titre que j'aïe remarqué où il foit.

2. p. 434..

Gall. c. 16. n. 2.

univ.

to. 2. p. 326.

fait mention expreffe de la regale du roi de France. Le fucceffeur de Thibaut fut Pierre Lombard : à AN. 1156. qui l'on dit que Philippe archidiacre de Paris Prev. lib. frere du roi Louis ceda fon droit, aïant été élu Rob. an. 1159. évêque. Mais Pierre ne tint pas long-tems ce siége: puis qu'il paroît par des actes autentiques, que Maurice fon fucceffeur étoit évêque de Pa- Duboulai hift. ris dès l'an 1160. Pierre étoit né près de Novarre en Lombardie : après avoir étudié à Boulogne, il vint en France, étant recommandé à S. Bernard par Rob. de Monto l'évêque Luques, qui le prioit de pourvoir à fa fubfiftance, pendant le peu de tems qu'il demeureroit en ce roïaume pour fes études. Saint Bernard y pourvût pendant que Pierre fut à Reims ; & quand il vint à Paris, il le recommanda de même à Gilduin abbé de S. Victor, fuppofant qu'il ne devoit pas y faire un long féjour. Mais Pierre fit un tel progrès dans les fciences, principalement dans la théologie, qu'il devint le plus fameux docteur

de l'école de Paris.

Il cft principalement connu fous le nom de Maître des fentences, à caufe de l'ouvrage qu'il a compofé fous ce titre; parce que c'eft un recueil de paffages des peres, dont il concilie les contradictions apparentes, à peu près comme Gratien dans fon decret. Cet ouvrage de Pierre Lombard eft un corps entier de théologie, divifé en quatre livres, & chaque livre en plufieurs diftinctions. Dans le premier il traite de la Trinité & enfuite des attributs dans le fecond, de la création, & premierement des anges, puis de l'ouvrage des fix

1161.

Bern. op. 410

jours: de la création de l'homme & de fa chûte, AN. 1159. & à cette occafion de la grace & du libre arbitre,

du peché originel & du peché actuel. Dans le troifiéme livre il traite de l'incarnation, & à l'occasion des perfections de J. C. il parle de la foi, de l'efperance & de la charité, des dons du S. Efprit & des commandemens de Dieu. Dans le quatriéme il traite des facremens en general & en particulier; & fur l'euchariftic il ne manque pas de prouver la prefence réelle. A l'occafion de la penitence il parle du dift. 14. purgatoire, & à l'occafion de l'ordre il traite de la fimonic. Il finit par la résurrection, le jugement dernier & l'état des bien-heureux. Telle eft la matiere du livre des fentences,

dift. 10. 11.

des

L'auteur y raisonne peu, & y dit peu de chofe de lui-même ; ce n'eft prefque qu'un tiffu des paffages peres, particulierement de S. Auguftin. Quoi que le livre foit court à proportion de la matiere, il ne laisse pas d'y avoir plufieurs questions qui pa21. dist, 2. 3. &c. roissent aujourd'hui peu neceffaires : comme la plûpart de celles qu'il traite fur la nature des anges & Tur leur peché, & qu'il ne réfout que par des vraifemblances. Comme quand il traite de l'ouvrage des six jours, & fuit les principes de la mauvaise phyfique qui regnoit alors, fuppofant par exemple le firmament folide & les petits animaux produits de corruption, Il eft vrai que fur ces matieres il ne parle qu'en doutant & ne donne que des opinions. D'un autre côté il y a des matieres importantes que l'auteur ne touche point, favoir de l'église, de la primauté du pape, de l'écriture,

dift. 14. 15.

AN. 1159.

III. dift. 35.

de la tradition, des conciles. En rapportant les autoritez de l'écriture, l'auteur fe fonde fouvent fur des sens figurez tirez de S. Gregoire, ou d'autres peres : mais qui étant arbitraires, ne peuvent faire de preuve folide. Comme quand il dit que dans l'ancienne loi les fimples croyoient fur la foi des micux inftruits, parce qu'il eft dit dans l'hiftoire de Job que les afnes paiffoient auprès des bœufs. L'au- Job. 1. 14. teur fuppofe ordinairement ces fens figurez comme connus & reçus de tout le monde. Dans la matiere des facremens il cite plusieurs autoritez que Gratien a auffi raportées dans fon decret; & les v. dift. 70 fauffes decretales comme les autres.

On s'étonera moins que le maître des fentences ait traité des queftions qui nous paroiffent inutiles, fi l'on confidere l'état des études de fon tems. Depuis plus d'un fiécle on étudioit ardemment la philofophie d'Ariftote, particulierement fa logique; & l'application que quelques docteurs voulurent faire des principes de ce philofophe aux mysteres de la religion, en fit tomber plufieurs dans les erreurs : comme nous avons vû par les exemples de Rofcelin, d'Abailard & de Gilbert de la Poirée. Le maître des sentences prit une autre route; & fans citer Ariftote ni s'abandonner au raisonnement humain, il s'apliqua à rapporter les fentimens des peres, renfermant dans un petit volume leurs témoignages, pour épargner au lecteur la peine de feuilleter un grand nombre de livres. C'eft ainfi qu'il s'en explique lui-même ; & il dit Prefas que fon but a été de combattre ceux qui s'atta

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