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ler la convention que nous avions faite : nous leur défendîmes de la part de Dieu d'inveftir personne de la chape, finon du confentement de tous ; & à Roland de la recevoir. Et comme au mépris de cette proteftation ils fe mettoient en devoir de le revêtir, avant qu'ils l'euffent fait, nous revêtîmes nôtre élû à la priere du peuple Romain, fur l'élection de tout le clergé & du consentement prefque de tout le fenat, de tous les capitaines, les barons & les nobles ; nous l'intronifâmes dans la chaire de S. Pierre, & nous le menâmes au palais, avec les acclamations du peuple & toutes les folemnitez requifes. Les cardinaux du parti contraire se retirerent au château de S. Pierre, & y demeurerent enfermez plus de huit jours: puis en aïant été tirez par des fenatcurs, ils fortirent de Rome; & étant au château nommé la Cifterne, entre Aricie & Terracine, ils y revêtirent de la chape le chancelier Roland; & le dimanche suivant, ils le facrerent. Auffi-tôt ils envoïerent par toute l'Italie, pour détourner les évêques de venir au sacre de nôtre élu, les menaçant d'excommunication & de déposition ; & toutefois il a été facré le premier dimanche d'Octobre. Tel eft le recit des cardinaux du parti d'Octavien : où ce qui eft à remarquer c'est qu'ils conviennent eux-mêmes, que Roland avoit été élû le premier, & par la plus grande partie des cardinaux, & facré le premier.

AN. 1159.

XL.

L'empereur Frideric aïant reçu les lettres des deux partis, réfolut par le confeil des feigneurs Députation de d'affembler un concile : croïant en avoir l'au

l'empereur à Alexandre.

Rader. II. c. 54.

AN. 1159.

torité à l'exemple des anciens empereurs, comme Juftinien, Theodofe & Charlemagne, & pour cet effet il envoïa citer les deux prétendus papes, par deux évêques, Daniel de Prague & Herman de C. ss. Verden. La lettre de l'empereur au pape Alexandre le nommoit feulement Roland chancelier, & étoit aussi adreffée aux cardinaux qui l'avoient élû. Il y difoit, que pour remedier au fchifme il avoit résolu de tenir à Pavie une cour ou affemblée generale dans l'octave de l'Epiphanic: où il avoit appellé tous les évêques de l'empire & des autres royaumes, favoir d'Angleterre, de France, de Hongrie, de Dannemarc: afin que cette grande affaire fût terminée par un jugement ecclefiaftique, fans que les féculiers en priffent connoiffance. Il ordonnoit donc à Roland, & aux cardinaux de fon parti de la part de Dieu & de toute l'églife de venir à cette affemblée: offrant de les y faire conduire en fûreté par les deux évêques deputez & par le comte Palac. 56. tin. Dans la lettre circulaire aux évêques pour les appeller au concile, l'empereur difoit: Ayant affemblé les évêques Italiens & Allemans, avec les feigneurs & des perfonnes pieufes & zclécs pour l'églife: nous avons trouvé fuivant les decrets des papes & les regles ecclefiaftiques, que lorsqu'il s'élève un fchifme dans l'église Romaine, nous devons appeller les deux prétendus papes & décider la conteftation fuivant le confeil des orthodoxes. La lettre finit par une défense à l'évêque à qui elle s'adreffe de prendre parti entre les deux papes. Elle eft dattée de Crême le vingt-troifiéme d'Octobre.

étoit le

AN. 1159.

Acta. ap. Bar.

Les deux évêques de Prague & de Verden députez de l'empereur étant arrivez à Anagni où Alexandre, entrerent dans fon palais pape & s'affirent devant lui avec les cardinaux & plufieurs autres tant clercs que laïques, fans lui rendre le refpect convenable à fa dignité, parce qu'ils ne le reconoiffoient pas pour pape. Ils dirent leur charge & prefenterent la lettre de l'empereur fcellée d'or à la lecture de laquelle les cardinaux furent troublez, craignant d'une part la violence d'un prince fi puiffant, & de l'autre la diminution de la liberté de l'églife. Après une longue déliberation ils réfolurent de demeurer fermes dans l'obéïffance d'Alexandre, à quelques périls qu'ils fe dûffent exposer. Et comme les envoïcz du roi preffoient pour avoir réponse, le pape Alexandre répondit ainfi devant tout le monde : Nous reconnoiffons l'empereur pour avoüé & défenfeur de l'églife Romaine, & nous prétendons l'honorer au deffus de tous les princes de la terre, pourvû que l'honcur du roi des rois n'y foit point intereffé. C'eft pourquoi nous fommes furpris de la maniere dont ils nous traite contre la coûtume de fes prédeceffeurs, en convoquant un concile fans nôtre participation, & nous ordonnant de nous trouver en sa presence, comme s'il avoit puiffance fur nous. Or J. C. a donné à S. Pierre & par lui à l'églife Romaine ce privilege, qui s'eft confervé jufques à prefent, qu'elle juge les caufes de toutes les églifes, fans avoir jamais été foûmile au jugement de perfonne. Nous ne pouvons donc affez nous étonner, que ce privilege foit

AN. 1159.

attaqué par celui qui devroit le défendre contre les autres: la tradition canonique & l'autorité des peres ne nous permet pas d'aller à fa cour & de fubir fon jugement: les avoüez des moindres églifes & les feigneurs particuliers ne s'attribuent pas la décision de ces fortes de causes, mais ils attendent le juge⚫ment de leurs métropolitains ou du S. Siége. C'est pourquoi nous ferions très-coupables devant Dicu, fi par nôtre ignorance ou nôtre foibleffe nous laissions réduire l'église en fervitude. Nous fommes prêts à nous expofer plûtôt aux derniers périls à l'exemple de nos peres. Telle fut la réponse du pape Alexandre.

Sup. liv. LXIV. n. 7. 8. 9.

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Nous avons vu toutefois qu'en l'année 418. lorfque l'antipape Eulalius fut élû contre le pape Boniface, l'empereur Honorius prit connoiffance de l'affaire, fit tenir un concile à Ravenne où il faifoit fa réfidence: commit un évêque pour officier à Rome pendant le fchifme ; & aïant reconnu la verité, fit chasser Eulalius, & maintint Boniface dans le faint fiége. Les actes en font confervez à Rome, & le cardinal Baronius les a inferez en fes annales. Nous avons vû encore que quatre-vingts ans après, le fchifme de Symmaque & de Laurent fut terminé de la même maniere. On convint que les deux contendans iroient à Ravenne fubir le jugement du roi Theodoric, tout Arien qu'il étoit ; & cel fut lui qui décida en faveur du pape Symmaque. apparemment le pape Alexandre III. n'étoit pas inftruit de ces faits. Or fuivant fa prétention il feroit impoffible de finir un fchifme: puifque

Mais

chacun des contendans fe difant pape legitime, AN. 1159. prétendroit également ne pouvoir être juge fur la

terre.

Les deux évêques envoïez par l'empereur Frideric étant indignez de la réponse du pape Alexan- Ata. ap. Bari dre allerent à Segni trouver l'antipape Octavien & lui baiferent les pieds: Otton comte Palatin, qui étoit à Rome avec des Allemans en fit autant, ce qui haussa beaucoup le courage à l'antipape. Mais l'empereur s'étant ainfi déclaré pour lui, donna jufte fujet à Alexandre de ne pas aller à l'assemblée de Pavie, & ne fe pas mettre entre fes mains. Cependant il envoïa des légats de tous côtez: en France & en Efpagne trois cardinaux, deux prêtres Antoine du titre de S. Marc, & Guillaume de S. Pierre aux liens, & avec eux Odon diacre du titre de S. Nicolas : cn Orient Jean du titre de faint Jean & S. Paul : en Hongrie Jules évêque de Palestrine & Pierre de S. Euftache diacre: à C. P. Tiburce avec Arderic de S. Theodore diacre.

XLI. Concile de Pavie.

64. tom. X. conc.

Le tems du concile de Pavie étant arrivé, les évêques de Lombardie & d'Allemagne s'y trou- Radev, 11. c. 62. verent & attendirent quelque tems l'empereur p.1387. Rad. 6.724 Frideric, occupé au fiége de Crême, qu'il prit enfin & la brûla le vingt-feptiéme de Janvier 1160. ce qui l'obligea à remettre le concile à la Chandeleur: mais il ne commença en effet que le cinquiéme de Février qui étoit le vendredi avant le jour des cendres. L'empereur étant arrivé à Pavie exhorta les évêques à fe préparer au concile par des jeûnes & des prieres : puis les ayant affemblez

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