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HISTOIRE
ECCLÉSIASTIQUE.

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LIVRE PREMIER.

I. Deffein de ce

E suppose que mon lecteur est suffisamment inf-
truit du mystére de JESUS-CHRIST, de fa gé- premier livre
nération éternelle, de sa naissance miraculeuse
dans le tems, de sa vie, de ses miracles, de fa doc-

trine, de sa paffion, desa mort, de sa résurrection & de son afcenfion glorieuse. Quiconque prendra la peine de lire mon histoire, aura fans doute la dévotion de lire les saints évangiles. Je ne touche donc point à cette histoire sacrée: & quoique je commence aux actes de apôtres, je ne les tranfcris pas tout au long. Je n'en prens que la substance, pour avoir occafion d'y joindre les faits que nous scavons d'ailleurs; soit par des épitres des apôtres mêmes, soit par une tradition certaine. Je ne prétens commencer ma narration exacte dans toute son étendue, qu'à l'endroit où finit celle de l'écriture fainte après l'arrivée de S. Paul à Rome, c'est-à-dire, à mon second livre. Je ne marque les années, que quand je les crois cer

U.

Election de S. Matthias. At. 1.

12.

111.

Publication de l'Evangile. At. 11.

Ad. 14. 9.

taines; & je les compte, non suivant la chronologie exacte, mais fuivant le calcul ordinaire, qui nous donne 1690 ans depuis l'incarnation.

Après l'ascension de Jesus-Christ les apôtres retournérent à Jérufalem remplis de joie ; & montérent dans le cénacle, c'est-à-dire la falle haute où ils s'étoient renfermés depuis sa paffion. Là ils persévéroient dans l'oraison avec les autres difciples de Jesus-Christ, les Stes. femmes qui l'avoient suivi, la sainte Vierge Marie fa mere, & ses parens. Ils étoient environ fix-vingt personnes. S. Pierre leur proposa d'élire un apôtre, pour remplir la place de Judas le traître. Ils en présentérent deux; Joseph Barsabas furnomméle juste, & Matthias. Après avoir prié Dieu de montrer celui des deux qu'il choisissoit, ils tirérent au fort, & le fort tomba fur Matthias. Il fut donc mis au rang des autres apôtres, & ils se trouvérent encore douze. Sçavoir: Pierre, Jean & Jacques, enfans de Zébedée: André frere de Pierre: Philippe: Thomas: Barthélemy: Matthieu: Jac ques fils d'Alphée: Simon de Cana; Judas fils de Jacques, & Matthias. On raconte de Barsabas le juste, qu'ayant une fois bu du poison, il n'en fentit aucun mal: comme le Sauveur l'avoit promis à ceux qui croiroient en lui.

Le jour de la Pentecôte étant venu, comme tous les disciples étoient dans le même lieu, à l'heure de tierce, c'est-à-dire à neuf heures du matin, le faint Esprit vint sur eux en forme de langues de feu, & ils commencérent à parler diverses langues en louant Dieu. Le peuple qui étoit venu à Jérusalem de tous côtés pour la fête, accourut en foule autour d'eux. Il y en avoit de toutes les nations du monde, quoique tous Juifs de religion. Car depuis la captivité de Babylone, il étoit demeuré des Juifs dans tout l'orient: & l'empire des Perses ayant été ruiné par Alexandre le grand, les Juifs s'étoient étendus dans toute la domination des rois Macédoniens ses successeurs, Il y avoit donc des Juifs Parthes, Mèdes, Elamites, c'est-à-dire de cette partie de Perse que l'on nommoit en hébreu Elam, & en grec Elymaïde. Il y en avoit de Mésopotamie, & de toutes les provinces de l'Asie mineure; de celle qui s'appelloit proprement Afie, de Cappadoce, de Pont, de Phrygie, de Pamphylie. Il y en avoit d'Egypte & de la Lybie voisine, que l'on nommoit Cyrénaïque. Il y en avoit d'Arabie, de l'île de Crète, de Rome même. Les uns étoient Juifs de naissance, les autres prosélytes, c'est-à-dire gentils convertis à la religion Judaïque. Les uns étoient habitans de Jérusalem, car ils venoient s'y établir de toutes les provinces; les autres s'y trouvoient seulement en passant, assemblés à l'occasion de la fête; & ils y étoient venus cette année en plus grand nombre qu'à l'ordinaire, perfuadés que le Meffie alloit paroître. Car il étoit certain, suivant les prophéties, particulièrement de Daniel, que Jofeph. lib. VI

tout

tant

Dan. IX. 25

fon tems étoit accompli : & cette créance étoit répandue par p.12. l'orient. Ce peuple mêlé de de nations fut extrême. Suet. Vefp. c. 4. ment surpris d'entendre les apôtres, tous Galiléens, parler les langues qui étoient naturelles à chacun d'eux.

S. Pierre prit la parole, & leur dit: Ceux-ci ne font pas ivres, comme vous pensez, puisqu'il n'est encore que l'heure de tierce. Car les Juifs n'avoient accoutumé de manger les jours de fête qu'après les prières du matin finies, à l'heure de sexte ou midi. C'est le faint Esprit, continua saint Pierre, qui est répandu fur eux, suivant la prophétie de Joël. Ensuite il commença à leur prêcher Jesus de Nazareth qu'ils avoient crucifié, leur déclarant que c'étoit le Seigneur & le Chrift; & les exhortant à se faire tous baptiser en fon nom, pour recevoir la rémission de leurs péchés, & le don du faint Esprit. Trois mille se convertirent à cette fois, reçurent le baptême, & augmentérent le nombre des disciples. Ils persévéroient dans la doctrine des apôtres, affidus à écouter leurs instructions: ils étoient tous les jours ensemble dans le temple à prier: ils faifoient dans les maifons la fraction du pain, ce qui fignifie l'eucharif tie, qu'ils ne pouvoient célébrer qu'avec les fidèles baptifés : & ils prenoient ensemble leurs repas avec joie & fimplicité de cœur. Tous les fidèles mettoient leurs biens en commun: ils vendoient leurs héritages & distribuoient à chacun ce qui lui étoit nécessaire.

Αθ. 11. 14. Jof. de vita, p 1020. D.

Joël. II. 28%

Alt. IL. 246

Α. ν. 124

Dieu faifoit par les mains des apôtres un grand nombre de miracles qui tenoient en crainte tout le peuple. Saint Pierre & S. Jean montérent au temple à l'heure de la prière de none, à trois heures après midi : c'étoit le tems du facrifice du soir. Un boiteux étoit à la porte, qui avoit plus de quarante ans, & n'avoit jamais marché. Comme il leur demanda l'aumône, c.8. S. Pierre lui dit: Je n'ai ni or ni argent, mais ce que j'ai, je

Jof. XIV. ant

1

Thalm. Cod.

Middoth. c.1. 7. 2.

te le donne: Au nom de Jesus-Christ Nazaréen, lève-toi, & marche. Il fut guéri fur le champ, & entra dans le temple, marchant & fautant. Tout le peuple accourut à ce miracle, & S. Pierre en prit encore occasion de leur prêcher JesusChrist. Il y eut cinq mille hommes qui se convertirent.

Les sacrificateurs & le capitaine du temple, c'est-à-dire, celui qui commandoit les lévites portiers, qui y faifoient la garde jour & nuit, survinrent avec les Sadducéens, irrités de ce que les apôtres prêchant Jesus-Christ enseignoient la résurrection des morts. Ils les arrêtérent & les mirent en prison. Le Cod. Thal. San- lendemain le Sanhedrin s'assembla. C'étoit le conseil souve§. 34.

25.

Jof. 11. de Bell,

bed. c. 15.5.c.4. rain des Juifs, composé des chefs de chaque troupe de facrificateurs, des docteurs lévites, & des anciens de toutes les tribus. Ils étoient en tout foixante & onze, & ne jugeoient que les affaires les plus importantes, comme le crime d'une tribu, ou d'une ville entiére, le souverain pontife, ou un faux prophète. Alors les principaux du Sanhedrin étoient Anne, Caïphe, Jean & Alexandre. Anne ou Ananus étoit le Nasi, c'est-à-dire le président. Il avoit été souverain pontife quelques années auparavant. Car alors ils ne l'étoient que pour un tems, & au gré des gouverneurs Romains: la plupart pour un an. Caïphe, gendre d'Anne, l'étoit toutefois depuis sept ans, ce qui fut fingulier en sa personne. C'étoit lui qui avoit condamné JesusChrift; & il avoit dans le Sanhedrin un titre qui le rendoit comme un second président. Jean étoit fils d'Ananus: & Alexandre surnommé Lyfimaque, & frere de Philon dont nous avons les écrits, étoit le plus riche des Juifs. En ce conseil étoient aussi tous les parens du pontife. Quand ils eurent tous pris leur séance, qui étoit en demi-cercle, le président dans le fond; les apôtres furent amenés au milieu de la place. On leur demanda en quel nom ils avoient fait cette action; & Pierre rempli du S. Esprit répondit hardiment: Au nom de Jesus-Christ Nazaréen que vous avez crucifié. Ils admirérent la fermeté de Pierre & de Jean, scachant que c'étoient des hommes du commun & fans lettres: & ne pouvant contredire ce miracle, ils se contentérent de leur défendre d'enseigner au nom de JESUS, ni d'en parler en façon quelconque. S. Pierre & S. Jean leur répondirent: Jugez vous-mêmes s'il est juste de vous obéir plutôt qu'à Dieu, Car nous ne pouvons nous empêcher

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