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de Pont-de-Veyle et est passée dans celle de M. de Soleines. Le Point d'honneur a été imprimé en 1739.

Lesage, que ces échecs auraient pu dégoûter, ne renonça pas à la littérature espagnole. Il donna les Nouvelles aventures de don Quichotte de la Manche, traduites de l'espagnol d'Alonzo Fernandez de Avellaneda, 1704 1706, 2 vol. in-12. qui furent réimprimés à Bruxelles en 1707. Cette continuation de l'ouvrage de Cervantes n'avait pas été goûtée en Espagne. Lorsque Avellaneda la publia en 1614, Cervantes n'avait encore donné que la première partie, et en promettait une seconde depuis huit ans. Cervantes, piqué de ce que l'on continuait son ouvrage, se décida à le terminer, et dans les dernières parties de son roman on trouve plusieurs traits contre son médiocre continuateur. Avellaneda n'ayant mis dans son livre ni sel ni intérêt, ce n'est pas à Lesage qu'il faut s'en prendre si son travail en manque; on peut seulement lui reprocher d'avoir mal choisi.

En 1707, le même jour (15 mars), Lesage fit jouer au Théâtre - Français deux pièces nouvelles; la première en cinq actes et en prose, intitulée don César Ursin, est une imitation de Calderon de la Barca; la seconde, en un acte et en prose, est ce Crispin rival de son maître, qu'aujourd'hui encore on voit avec plaisir. Le sort de ces deux pièces fut tout-à-fait différent à la ville et à la cour. A Paris, on accueillit très-mal don César Ursin, et trèsbien Crispin rival de son maître. Ce fut tout le contraire à la cour. C'est le jugement de la ville qui a été confirmé par la postérité.

La fortune favorisait Lesage. Ce fut au commencement de l'été de 1707 que parut le Diable boiteux, un volume in-12; imitation de Louis Velez de Guevara, auteur espagnol. Cette fois le traducteur français eut lieu de s'applaudir de son travail. Son livre eut un succès prodigieux. Deux éditions en furent enlevées promptement. On raconte même que deux jeunes seigneurs, entrant en même temps chez un libraire

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pour en demander chacun un exemplaire, se battirent en duel pour savoir qui aurait le seul qui restât. La même année 1707, le volume fut réimprimé à Amsterdam. Il n'avait alors que seize chapitres (1); tous les états de la vie y sont passés en revue et les traits satiriques se succèdent sans interruption. Il n'était pas bien difficile de deviner sur qui portaient quelques allusions : dans don Bourvalos, tout le monde reconnaissait Bourvalais, célèbre maltôtier du temps. Cependant l'auteur a depuis changé ce nom, et le personnage est appelé don Blanco (voy. le chapitre VIII). En 1726, Lesage donna une édition augmentée d'un volume. Ce fut alors qu'il ajouta au chapitre x l'aventure de Dufresny (mort en 1724), qui avait épousé sa blanchisseuse. Baron, quoique vivant encore, fut le sujet d'une addition au chapitre xvi, où il est

(1) Ils forment aujourd'hui les chapitres 1, 2, 3, 4, 5, 6 (qui comprend les chapitres 6 et 7 de 1707), 7, 8, 9, 10, 12, 13, 14, 15 et 16, sauf quelques corrections, additions et transpositions.

question d'un comédien métamorphosé dans le conseil des dieux en une figure de décoration. Dans le chapitre XVII, le premier de ceux qu'avait ajoutés Lesage, on reconnut Ninon, quoiqu'il ne fût question que d'une veuve allemande vivant de son douaire à Madrid. La malignité des lecteurs alla peut-être trop loin; mais il est à regretter qu'on n'ait pas une copie des clefs du Diable boiteux, comme nous en avons des Caractères de Labruyère, et même du Télémaque. Une quatrième édition, qui est de 1737, contient l'Entretien des cheminées de Madrid et les Béquilles du Diable boiteux. Ces deux opuscules, dont le dernier est de Bordelon, ont été si souvent réimprimés avec le Diable boiteux, dont ils sont la suite et la défense, qu'ils ont été conservés à la fin du second volume de cette édition.

Il ne faut pas oublier de dire que Dancourt, à l'affût de tous les événemens du jour, composa le Diable boiteux, comédie en un acte, jouée le 8 octobre 1707,

et le second Chapitre du Diable boiteux, comédie en deux actes, jouée le 13 novembre suivant.

Une petite pièce intitulée les Étrennes avait été présentée par Lesage aux comédiens français, pour être jouée le premier janvier 1708. Ils la refusèrent, sur le fondement qu'ils n'admettaient point de petites pièces depuis la Saint-Martin jusqu'à Pâques. Le sujet prêtait beaucoup : l'auteur revit son ouvrage, set c'est de là que naquit Turcaret. S'il est vrai que cette pièce fut dictée par l'humeur qu'avait Lesage d'avoir perdu son emploi dans les fermes de la Bretagne, c'est garder rancune longtemps, et la pousser bien loin. Avoir composé une comédie n'est rien; il faut la faire jouer, ce qui souvent est très-difficile. Lesage ne l'éprouva que trop. Outre les obstacles ordinaires, il en eut de très-puissans à vaincre. Les traitans, qui étaient joués dans la pièce, employèrent tous leurs moyens, tout leur crédit pour en empêcher la représentation. L'auteur se dédommagea de

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