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AN DU M. tablit en quelque forte, comme une petite divinité fur la terre. L'homme, par le péché, dont nous parlerons ciAvant J. C. après, perdit, en tout ou en partie, cette reffemblance avec Dieu, en quoi consistoit sa principale dignité; mais il peut la recouvrer avec le fecours de Dieu, en retraçant en luimême la fainteté, la juftice, la bonté de fon Créateur, & en imitant la clémence, la patience, & l'humilité de JesusChrift, qui, pour rendre à l'homme fa reffemblance avec Dieu, qu'il avoit perdue, a bien voulu lui-même se rendre femblable à l'homme, en fe revêtant de la nature humaine, & de fes infirmités, fans toutefois prendre part à fon péché & à fes fuites, finon en tant qu'il les a expiés par fa

terreftre.

mort.

Dieu ayant donc créé l'homme dans l'état de perfection & d'innocence, que nous venons de repréfenter, le bénit, & lui dit : Exercez votre domination fur tous les animaux de la terre, fur les oiseaux de l'air, & fur les poiffoge de la mer : & pour votre nourriture, je vous abandonne tou tes les plantes, les herbes & les fruits qui font fur la terre ; ils ferviront à votre nourriture, & à celle des animaux qui font dans le monde. Auffi il y a beaucoup d'apparence que l'homme dans les commencemens n'ufa point de chair pour fa nourriture (1), le nombre des animaux n'étoit pas affez grand; ce ne fut qu'après le déluge, que Dieu donna à Noé la permiffion d'en ufer (2).

Defcription Dès le commencement Dieu avoit créé un jardin déli du Paradis- cieux dans le pays d'Eden [3]: il y avoit planté toutes fortes d'arbres beaux à la vue, & agréables au goût, en particulier l'arbre de vie, & celui de la science du bien & du mal. C'eft-là où il plaça l'homme afin qu'il cultivât, & qu'il gardât ce jardin. On y voyoit la fource d'un fleuve qui arrofoit ce lieu de délices, & qui de-là fe divifoit en quatre canaux. L'un s'appeloit Phison, c'est apparemment le Phafis, fleuve fameux dans la Colchide, pays célèbre autrefois par l'or excellent qu'on y trouvoit en quantité. C'est-là auffi où se trouvoit le Bdellium & la pierre de Sohem, que nous croyons être l'éméraude. Les plus eftimées de ces

(1) Origin. in Genef. Hom. 1. Chrif Hom. 27. in Genef. Theodoret quaeft. 34. & 35 in Genef. Hieron. 1. 1. contra Jovinianum,

& alii plures.

(2) Genef. Ix. 3.
(3) Genef. 11. 8.

pierres venoient de la Scythie, qui s'étendoit ancienne- AN. DU M. ment jufqu'au Phasis. Le Bdellium eft une gomme qui dé

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coule d'un arbre, qui fe trouve dans l'Arabie, & dans plu- Avant J. C. Lieurs autres endroits de l'Orient.

4000. Avant l'Ere

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Le fecond fleuve qui fortoit du jardin d'Eden, eft le valgaire Gehon qui coule dans tout le pays de Chus. Nous croyons que c'est l'Araxe, qui a fon cours dans l'ancien pays des Scythes, lequel s'étendoit fur l'Araxe, ainfi que nous l'apprenRent [1] Diodore de Sicile [2], Hérodote & [3] Justin; & aux environs duquel on remarque beaucoup de traces du nom de Chus. Le nom de Gekon fignifie impétueux, & l'Araxe eft un des plus rapides fleuves du monde. Le troifième fleuve s'appelle le Tigre, & le quatrième l'Euphrate. Ces deux fleuves font affez connus.

Les fources de ces quatre fleuves ne font pas aujourd'hui au même endroit; mais on doit fuppofer que le Dékica caufé de grands dérangemens dans la fuperficie de a terre: & quand Moyfe dit, qu'avant le Déluge, les cataractes du Ciel s'ouvrirent, & que les fources du grand abyme furent (4) rompues, il veut marquer que les fources des fontaines rompirent leurs anciennes iffues; que les rivières & les ruiffeaux s'enflèrent extraordinairement, & quittèrent leur route ordinaire; que les montagnes & les rochers se renverfèrent; que les terres s'éboulèrent ; enforte qu'il n'eft pas fort furprenant, que l'on ne voie plus aujourd'hui ces quatre grands fleuves fortir d'une même fource, comme ils en fortoient avant le déluge.

Dieu ayant mis l'homme dans le Jardin d'Eden, lui fit ce commandement: Mangez de tous les fruits des arbres du Paradis; mais ne mangez point du fruit de l'arbre de la fcience du bien & du mal : car fi vous en mangez, vous mourrez très-certainement. L'arbre de la fcience du bien & du mal, & l'arbre de vie, dont il a parlé auparavant, étoient, felon les apparences, deux arbres différens, dont l'un avoit la vertu de rendre l'homme immortel, s'il fût demeuré fidelle à Dieu; & l'autre devoit lui faire connoître la différence qu'il y avoit entre le bonheur de fon premier

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(3) Juftin. 1. 1..
(4) Genef. vII. II.

AN. DU M'

état, & le malheur du fecond, s'il lui arrivoit de violer le commandement, que Dieu lui avoit fait de ne point manAvant J. C. ger de fon fruit.

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Avant l'Ere

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Les Ani

maux ame

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Après que Dieu eut formé tous les animaux terreftres vulgaire & tous les oiseaux du ciel, il les fit venir devant Adam apparemment par le miniftère des Anges, ou par l'instinct qu'il leur inspira, afin qu'Adam les reconnût, qu'il le vît, nés à Adam qu'il exerçât fur eux fon domaine, en leur impofant les noms. Or le nom qu'Adam leur donna, eft leur nom véritable; il exprime naturellement & exactement la nature, ou les propriétés de chacun d'eux. On remarque en effet dans la langue Hébraïque, qui est, ou la langue primitive, ou une branche immédiate de cette première langue, & qui en conferve beaucoup de mots, que les noms Hébreux des animaux repréfentent admirablement leur nature & leurs principales qualités.

VI.

CH. III.

de la Femme.

Mais dans la revue qu'Adam fit des animaux, il n'y re JOUR. marqua pas fon femblable. Tous les autres étoient par couCréation ple, mâles & femelles ; mais Adam étoit feul. Dieu lui dit donc Il n'eft pas bon que l'homme foit feul, faifons-lui un aide femblable à lui. En même temps il envoya a uam un profond fommeil, & lorfqu'il étoit endormi, il tira une de fes côtes, & ayant remis de la chair en fa place, il forma de cette côte une femme, qu'il amena à Adam. Adam l'ayant vue, & y ayant remarqué fon vifage, dit: Voilà maintenant l'os de mes os, & la chair de ma chair: & comme il avoit donné le nom à tous les autres animaux en figne de fa fupériorité, & de fon pouvoir, il impofa auffi à fa femme le nom d'Ischa, qui vient de la racine Hébraïque, Ifch, Homme, comme qui diroit l'humaine, celle qui vient de l'homme, qui eft tirée de l'homme, qui appartient à l'homme, qui est semblable à l'homme. Il ajouta comme une loi qui regardoit toute fa poftérité; c'est pourquoi l'homme quittera fon père & fa mère, & s'attachera à fa femme, & ils feront deux dans une feule chair ; c'està dire que les enfans qui fortiront de l'un & de l'autre, feront comme une chair commune à l'un & à l'autre ; l'un & l'autre par les liens & par l'ufage du mariage, ne compofent en quelque forte, qu'une même chair. Leur union fera intime & inféparable: union de cœurs, union de corps, union d'intérêts. Voilà la règle naturelle des mariages ; &

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quoiqu'Adam & Eve fuffent nus, ils n'en rougiffoient AN DU M. point, parce que la concupifcence & le déréglement de l'imagination n'avoient pas encore produit dans eux des fen- Avant J. C. timens déréglés & des mouvemens honteux dont ils duffent Avant l'Ere rougir. Dieu les bénit, & leur dit : Croiffez & multipliez- vulgaire vous; rempliffez la terre ; peuplez-la, & vous l'affujettiffez. 4004. Le ciel & la terre, avec tous leurs ornemens, l'homme, Repos da feptième la femme & les animaux ayant ainfi été créés dans l'espace jour. de fix jours, Dieu fe repofa le feptième. Après avoir achevé tous fes ouvrages, il ceffa de créer au dehors des Etres nouveaux & fenfibles. Il bénit le feptième jour, & le fanc tifia dès lors ; c'est-à-dire il le deftina à être fanctifié dans la fuite parmi les Hébreux, auxquels il devoit ordonner le repos & la fanctification du Sabbat (1). Quelques anciens Pères & plufieurs Rabbins (2) ont cru que les Patriarches & les Juftes, avant, comme après le déluge, avoient religieufement obfervé le fabbat, ou comme une pratique de dévotion toute libre, ou comme une fuite de la loi naturelle qui les y obligeoit, & dont le commandement que Moyfe en reçut long-temps après à Mara, ou à Sinaï, n'étou qu'un renouvellement. Mais le fentiment contraire est beaucoup plus fuivi & mieux appuyé [3].

Voilà la véritable origine du ciel & de la terre, & de tous les êtres fenfibles (4), fur laquelle les Philofophes ont tant raisonné, & ont tant débité de conjectures & de vaines opinions. Le monde n'eft ni éternel, ni produit par le hafard & par le concours fortuit des atomes; ni par la chaleur, ni par l'efprit, ni par l'ame du monde, fuivant l'idée des Philofophes; ni par le vent agité, ni par l'amour mêlé avec le cahos. Il est l'ouvrage de Dieu feul : Et nonfeulement il a produit la matière, & l'a mise en mouvement; mais il a tiré du fein de la terre les plantes & les animaux, comme il a tiré du sein de l'élément humide les poiffons & les oiseaux. C'est lui qui a communiqué à l'homme & aux bêtes, l'inftin&t qui les porte à fe reproduire par la génération, & qui a donné la fécondité à la terre & aux

(1) Exod. XVI. 23. 25. &c. XXVIII 8. & alibi fæpiùs.

(2) Vide Menaffe Bin. Ifraël de creatione probl. 8. & auctores ab eo laudatos.

(3) Selden de jure n. & G. I. 3. c. 13. & notre Comm. fur la Genef. 113.

(4) Voyez notre Comm. fur la Genef. c, 1. p. 8. 9. & suiv,

AN. DU M. plantes: fans lui rien ne feroit forti du néant, & fans luf I. la matière tirée du néant, seroit reftée dans une inaction Avant J. C. & dans un repos éternel; le cahos feroit éternellement de meuré cahos, fans la volonté & le commandement exprès du Créateur.

4000. Avant l'Ere vulgaire 4004

CH IV.

en

Plufieurs ont cru que le monde avoit été créé & orné tout d'un coup; & que le récit de Moyfe n'étoit qu'une diftribution d'ordre & une fucceffion de raifon employée uniquement pour se proportionner à la portée du peuple, & pour lui donner une idée plus diftin&te de la création, la lui faifant apercevoir fucceffivement & par parties. En effet, on conçoit quelqu'efpèce d'incongruité contraire à la toute-puiffance du Créateur, à dire qu'il a achevé fon ouvrage à plufieurs reprises, qu'il s'eft remis à l'ouvrage tous les matins; & comme s'il eût été fatigué après un fi grand travail, qu'il fe foit repofé le septième jour. On cite des Auteurs anciens (1) contre le fentiment de la création fucceffive: mais l'opinion contraire a prévalu, comme plus conforme au récit de Moyfe, qui marque fi clairement que Dieu créa le monde dans l'espace de fix jours, & qu'il fe repofa le feptième jour. La toute-puiffance de Dieu auroit peut-être paru davantage, en produifant toutes les créatures par un feul acte de fa volonté; mais fa fageffe éclata ce femble, davantage dans l'ordre, la fucceffion & l'arran➡ gement qu'il a fuivi dans la création.

Entre tous les animaux que Dieu avoit créés, & qui Tentation pour la plupart fe trouvoient dans le Jardin d'Eden, le Serd'Eye. pent étoit le plus fouple & le plus rufé. Le Démon qui étoit déjà déchu de l'état de grâce & de gloire où il avoit été créé, s'en fervit pour tenter la première femme. Le Serpent: s'approcha d'elle, & lui dit: Pourquoi Dieu ne vous a-t-il pas permis de manger du fruit de tous les arbres du Paradis? La femme lui dit : Nous mangeons du fruit de tous les arbres du Paradis; il n'y a que l'arbre qui eft au milieu du Jardin, dont il nous foit défendu de manger, & auquel nous ne pouvons toucher fur peine de la vie. Mais le Serpent lui répartit: Affurément vous ne mourrez point. Mais Dieu

(1) Philo. alleg. 1. 1. & de Mundi opifi io p. 6. & 41. Orig 1. 6. contrà Celf. Aug. 1. 4. de

Genef. ad lit. c. 18. & l. 6 de
Civit. c. 7. & 1. XII. Confeff. c.

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