Imágenes de páginas
PDF
EPUB

LE GENIE.

Je ne puis. Au Bon-Sens je suis trop attaché.
Mais fouffrez qu'avec lui je vous réconcilie.
Cet accord vous convient, & feroit mon bonheur.
LA FOLIE.

Qui, moi? Que je m'uniffe avec un raisonneur.
Qui s'oppofe fans ceffe à mon heureux délire,
Dont le but est d'apprendre à fe paffer de rire?
Un pédant, dont le front toujours chargé d'ennui,
Ecarte le plaifir qui vient s'offrir à lui ?

Le fléau de tous ceux qui deviennent sa proye,
Qui difpenfe à regret, & mefure la joye

Que je répands à pleines mains?
Ce ridicule accord déplairoit aux humains.
LE GENIE.

Vous vous corrigerez tous les deux l'un

LA FOLIE.

par

l'autre.

Entre nous, en un mot, il faut se déclarer.

LE GENIE.

Je n'oferois vous séparer.

Son fecours m'eft utile, & j'ai besoin du vôtre.
LA FOLIE.

Hé bien? Eprouve donc fa perfécution,
Infenfé; je te livre à fa direction.

Bientôt tes fpectateurs auffi froids que des ombres,

Encor plus ennuyés que des Mânes plaintifs,

Epars fur les rivages fombres,

Rappelleront ici les plaisirs fugitifs :

J'aurai conduit ailleurs leur folâtre cohorte.
A commencer dès aujourd'hui,

Ce lieu va devenir le temple de l'ennui.
Tu finiras par mettre écriteau fur la porte.

SCENE X.

LE GENIE, LE BON-SENS.

LE GENIE.

Cette prédiction pourroit bien s'accomplirë

Je crains qu'elle aille s'établir..... LE BON-SENS. Laiffez, laiffez aller cette folle immortelle: On peut ici se paffer d'elle.

Vous ne manquerez pas de prodiges nouveaux.
Plus d'un vrai nourriffon des filles de mémoire
Pour quelque tems encore affûrent votre gloire.
Si ce n'eft pas affez, ils auront des rivaux.
J'en fçai qui n'ont besoin que d'un peu plus d'audace ;
Et je vais les encourager,

JE

SCENE X I.

LE GENIE feul.

E fuis au dépourvû. Que faut-il que je faffe?
La Folie en tout tems, est bonne à ménager.

SCENE XII.

THALIE, LE GENIE.

DEeffe,

LE GENIE.

Eeffe, vous voyez mon embarras extrême.
THALIE.

Oui, le Public n'eft pas d'accord avec lui-même.

LE GENIE.

J'ai reçû vingt avis tous différens entr'eux:
Un feul m'a paru bon; mais il eft dangereux.

THALIE.

Il faut pourtant le fuivre.

LE GENIE.

Où prendtez-vous des piéces ? THALIE.

Le Bon-Sens t'a promis fes foins officieux.

LE GENIE.

Oui: mais en attendant l'effet de ses promeffes,

Je n'ai rien à donner.

THALIE.

Prends cette comédie.

Eh bien? Faute de mieux,

( Lui présentant un manuscrit. )

LE GENIE.

Eft-ce une bonne aubeine?

THALIE.

C'eft l'effai d'un Auteur que je connois à peine.

Tant pis.

LE GENIE.

THALIE.

Au bas du Pinde on m'a fait ce prefent,

Si ç'en eft un.

LE GENIE.

THALIE.

Peut-être. Et je n'ofe à prefent

Jurer de rien, en fait d'ouvrage,

Le Public qu'on prévient, refuse fon fuffrage.
Entre nous, celui-ci me paroît hazardeux.
Je ne fçai ; j'y voudrois une fable mieux faite,
Un peu plus de comique, & l'intrigue plus nette.
LE GENIE.

'Allons, prenons toujours ; les tems font malheureux.

Fin du prologue.

ACTEURS DE LA COMÉDIE.

LEONORE.

DAMON, amant de Leonore.

GERONTE, oncle de Leonore.

ORPHISE, femme de Geronte.

FRONTIN, valet de Damon.

NERINE, fuivante de Leonore..

La Scene eft dans une maison de campagne de Geronte.

« AnteriorContinuar »