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I.

grand-Maître, partit donc pour la ANDRONIC France, & vint trouver à Poitiers HET Philippe-le-Bel & Clément V qui SON FILS. s'y étoient rendus pour traiter enfemAn. 1310 ble de la deftruction des Templiers, Foulques leur détailla d'abord tous les griefs de fon Ordre contre le roi de Chypre. Il leur dit que ce prince timide, dans la crainte de déplaire aux Turcs, & d'attirer fur lui leurs armes, traverfoit les chevaliers dans toutes leurs opérations; qu'il gênoit leurs armemens, & même s'oppofoit à leur départ quand ils fe difpofoient à courir fur les ennemis du nom chrétien. Après avoir représenté au monarque François & au S. Pere, que fes religieux ne pouvoient, fans manquer à leur devoir & à leur honneur, refter plus long-tems dans les Etats d'un prince qui les empêchoit de remplir le vœu de leur inftitution, il les inftruifit de fon plan, & leur en expofa tous les avantages. Il leur repréfenta que fi les chevaliers fe rendoient une fois maîtres de Rhodes, cette île deviendroit le boulevard de la chretienté contre les Infideles;

que les flottes des croifés y trouve

II. ET

An. 1310.

roient des rafraîchiffemens en abon- ANDRONIC dance, & des ports sûrs où ils pour MICHEL, roient relâcher; enfin que la poffeffion SON FILS. de l'île de Rhodes les mettroit euxmêmes en état de nuire beaucoup aux Sarrafins & aux Turcs, & de feconder les Princes Chrétiens dans toutes les entreprifes qu'ils pourroient faire pour reconquerir les lieux faints. Philippe-le-Bel & Clément applaudirent à ce projet, & déclarerent au grand-Maître qu'ils étoient dans la difpofition de le favorifer de tout leur pouvoir. Le pape ne s'en tint pas cette fois quitte pour des indulgences & des bénédictions; il tira de fon tréfor quatre-vingt-dix mille florins qu'il remit aux chevaliers. Foulques muni de cette fomme s'empreffe de faire tous les préparatifs néceffaires pour fa nouvelle expédition. Il arme des vaiffeaux leve des troupes, & raffemble fous fes drapeaux un affez grand nombre de croifés qui étoient venus de France & des autres pays de l'Europe fe joindre à lui. Pour donner le change à l'ennemi, il fait courir

II. ET

le bruit que fon intention eft d'aller ANDRONIC délivrer la Terre-Sainte. Tandis que les Grecs & les Mufulmans ont tous SON FILS. les regards tournés vers la Palestine, An. 1310. il fond tout-à-coup fur l'ile de Rho

MICHEL,

des, y débarque fans le moindre obftacle, & met le fiege devant la capitale. Cependant des ambaffadeurs de l'Ordre étoient à Conftantinople, & demandoient à l'Empereur Andronic qu'il leur abandonnât cette île où, après tout, il ne lui reftoit qu'une ombre d'autorité, & où il n'avoit plus guere d'autre poffeffion qu'un feul château. Ils offroient en même-tems de lui en faire hommage, & de luf fournir tous les ans à titre de feudataires, trois cents chevaliers qui seroient toujours prêts à marcher pour fon fervice contre les Infideles. Andronic qui haïffoit les Latins encore plus que les Mahométans, eut la fierté de ne pas accepter ces propofitions. Au contraire il s'épuifa pour envoyer au fecours des Rhodiens un puiffant corps de troupes. Foulques de Villaret ne jugea pas à propos d'attendre dans fes lignes l'armée des Grecs. Il en

y

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11. ET

An. 1310,

fortit, & marcha à fa rencontre. On fe battit de part & d'autre avec la ANDRONIC plus grande animofité. Des flots de MICHEL, fang coulerent, & les chevaliers SON FILS. perdirent beaucoup de monde; enfin ils refterent maîtres du champ de bataille. Les ennemis plus maltraités quoiqu'infiniment plus nombreux, furent forcés de fe retirer. Cette victoire ouvrit aux chevaliers les portes de Rhodes; ils y arborerent l'étendard de la Religion le 15 août 1310. La conquête de cette capitale entraîna celle du château & du port de Lindo fitué dans la partie orientale de l'ile; les autres fortereffes fe foumirent fucceffivement aux vainqueurs, & en moins de quatre ans l'île entiere paffa fous la domination des chevaliers de S. Jean. Ils s'emparerent enfuite fans trouver prefque aucune réfiftance, de fept ou huit petites îles circonvoifines qui relevoient encore de Rhodes. Ces îles fe nomment Nifara, Lero, Epifcopia, Calchi, Simia, Tilo, Cos ou Lango. Au refte elles ne font guere que des rochers arides, fi on en excepte Simia & l'île de Cos, renom

II. ET

mée par la délicateffe de fes vins & ANDRONIC par la naiffance du pere de la méMICHEL, decine, dont elle fut le berceau. Cette SON FILS. derniere île mérita d'une maniere parAn. 1310. ticuliere l'attention du grand-Maître.

Il la fortifia avec beaucoup de foin, & elle devint par la fuite fi importante qu'on la nomma une feconde Rhodes. XIII. Le fuccès des chevaliers défefpéra forts de leurs les Grecs & les Infideles. Il ne chaef-les ennemis pour grina pas moins les Génois. Ces répula leur enle-blicains voyoient avec dépit entre les

Vains

ver,

mains des Hofpitaliers, une île d'où ils avoient été fucceffivement chaffés par Vatace & par Michel Paléologue. D'ailleurs un fujet de mécontentement particulier les animoit encore contre les Hofpitaliers de S. Jean. Ces chevaliers avoient faifi fur eux un vaiffeau chargé d'effets déclarés par les conventions, marchandifes de contrebande. Le refus qu'ils firent de le rendre irrita les Génois. Quoi qu'on puiffe dire, toute nation, effentiellement commerçante, tiendra toujours un peu de cet ancien génie Carthaginois, qui fubordonnoit tout à la paffion du gain, & qui, par une fuite néceffaire, fé

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