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venus porter leurs plaintes au pape. Il l'exhorta fou- An. 861. vent à fe corriger, mais il faifoit encore pis., Il détournoit les uns d'aller à Rome, il excommunioit les autres fans fujet, ils'emparoit des biens de quelques-uns, fans qu'ils lui fuffent adjugez par justice ; il ufurpoit des terres de l'églife Romaine, pour les attribuer à celle de Ravenne, & en fupprimoit les titres: il méprifoit les envoyez du pape. Il dépofoit sans jugement canonique des prêtres & des diacres, nonfeulement de fon clergé, mais dépendans du faint fiége, & réfidans dans la province d'Emilie : il en mettoit en prison & dans les cachots. Il en contraignoit d'autres à confeffer par écrit des crimes qu'ils n'avoient pas commis. Il prétendoit n'être point obligé d'aller à Rome au concile, quand le pape l'y appelloit; & il avoit falfifié les foûmiffions que fes predeceffeurs faifoient à leur entrée au pontificat, & qui demeuroient dans les archives.

Le pape l'appella trois fois par lettres à fon concile; & comme il n'y vint point, il fut excommunié. Alors il alla à Pavic trouver l'empereur Louis, & obtint de lui des deputez, avec lefquels il arriva à Rome fier de cette protection. Le pape reprit doucement les deputez, de ce qu'ils avoient communiqué avec un excommunié : ils en témoignerent du regret, & le pape manda à l'archevêque Jean, de se trouver le premier de Novembre au concile qui l'avoit excommunié, pour y rendre compte de fa conduite mais l'archevêque fe retira. Alors des habitans d'Emilie & des fenateurs de Ravenne vinrent avec un grand peuple fe jetter aux pieds du pape, &

An. 861.

le prier de venir à Ravenne, pour s'inftruire par luimême & les delivrer d'opreffion.Il y alla:mais Jean ne l'attendit pas & retourna à Pavie trouver l'empereur. Le pape fit un decret, par lequel il rendoit aux habitans de Ravenne, de l'Emilie & de la Pentapole les biens ufurpez par l'archevêque Jean & par Gregoire fon frere.

Mais à Pavie les citoyens & l'évêque Luithard confacré par le pape, fachant que l'archevêque de Ravenne étoit excommunié, ne voulurent point le recevoir dans leurs maisons, ni fouffrir que l'on vendît rien à fes gens, ni même leur parler : au contraire, quand ils en voyoient paffer quelques-uns dans les rues, ils crioient: Voilà de ces excommuniez, il ne nous eft pas permis d'en approcher. Cependant l'archevêque follicitoit la protection de l'empereur, qui lui fit dire : Qu'il aille s'humilier devant le pape, à qui nous nous foûmettons avec toute l'églife: il n'obtiendra point autrement ce qu'il defire. Lempereur lui donna toutefois encore des envoyez, avec lefquels il vint à Rome : & le pape leur dit : Si l'empereur connoiffoit bien la conduite de cet archevêque nonfeulement il n'intercederoit pas pour lui, mais il nous l'envoyeroit pour le corriger. Alors le pape ayant assemblé les évêques de plufieurs provinces, manda à l'archevêque de comparoître à ce concile. Après trois citations, l'archevêque fe voyant sans secours, tomba dans une grande trifteffe, & fit prier le pape d'avoir pitié de lui, puifqu il étoit prêt à faire tout ce qu'il ordonneroit. Le pape refolut de le recevoir; & l'archevêque renouvella l'acte de

de

foûmiffion au pape qu'il avoit mal fait au temps fon ordination, & le confirma publiquement par ferment fur la croix & les évangiles.

Le lendemain le pape vint à l'églife de Latran avec tous les évêques & tout le clergé. L'archevêque Jean s'y purgea d'herefie, dont il étoit accufé ; & le pape le reçut à la communion & lui permit de celebrer la melle. Le jour fuivant il lui fit prendre place dans le concile. Les évêques de l'Emilie appuyez de quelques habitans de cette province & de Ravenne, donnerent une requête contre lui: fe plaignant de plufieurs abus, dont le pape, de l'avis de tout le concile, ordonna la correction; & le decret en fut formé en ces termes au nom du pape parlant à l'archevêque Jean: Nous vous ordonnons de venir tous les ans à Rome.Vous ne confacrerez les évêques de l'Emilie, qu'aprés l'élection du duc, du clergé & du peuple & la permiffion par écrit de celui qui remplira le faint fiége. Vous ne les empêcherez point de venir à Rome, quand ils voudront; & n'exigerez rien d'eux contre les canons, ou contre leurs privileges. Vous ne vous mettrez en poffeffion des biens de perfonne, qu'ils ne vous foient adjugez juridiquement à Ravenne, en en presence du pape ou de fon envoyé & des vôtres.

a

An. 861.

XVIII.

Lettres du pape

Photius.

Aprés que le pape Nicolas eut déclaré à Leon ambaffadeur de C. P. qu'il ne pouvoit approuver ce à Michel & à que l'on avoit fait contre Ignace & pour Photius, Nic. epift. 9. p. il le renvoya chargé de deux lettres, l'une à Photius, 355. D. l'autre à l'empereur Michel. Dans la lettre à Pho

y

tius il le qualifie feulement homme tres-prudent, Nic.epift. 6

8.25.

fa

An. 862. pour montrer qu'il ne le reconnoît que pour laïque ; & il répond aux exemples qu'il avoit allegués par grande lettre, pour autorifer fon ordination. Nectaire fut choifi par neceffiré, parce qu'il ne fe trouvoit perfonne dans le clergé de C. P. qui ne fût inSup. liv.xLiv. feté d'herefie. L'ordination de Taraife fut blâmée par le pape Adrien; & il n'y confentit, qu'à cause de fon zele pour le rétablissement des faintes images. Saint Ambroife fut choifi par miracle, & fit ce qu'il pût pour fe cacher. Mais vous, continuë le pápe, qu'avez-vous de femblable; vous qui non feulement avez été pris entre les laïques, mais qui avez ufurpé le fiége d'un homme vivant? Vous dites que vous ne recevez ni le concile de Sardique, ni les decretales des papes:nous ne le pouvons croire. Le concile de Sardique a été tenu en vos quartiers & eft reçu de toute l'églife: les decretales font émanées du faint fiége, qui par fon autorité confirme tous les conciles.

p. 285. E.

par

Vous dites que vous avez été élevé force au fiége patriacal: cependant quand vous y avez été une fois établi, vous n'avez pas agi en pere: vous vous êtes montré fevere jufques à la cruauté, en dépofant des archevêques & des évêques ; & en condamnant Ignace, que vous pretendez avoir depofé, tout innocent qu'il eft. Mais jufques à ce que nous voyions clairement fon crime, nous ne le tiendrons jamais pour depofé: ni vous par confequent pour patriarche de C. P. Quand aux diverfes coûtumes que vous alleguez felon la diversité des églifes: nous ne nous y oppofons point, pourvû qu'elles ne foient

point contraires aux canons : mais nous ne voulons pas laiffer établir chez vous celle de prendre de fimples laïques pour les faire évêques. Cette lettre eft dattée du dix-huitiéme de Mars indiction dixiéme, c'est-à-dire l'an 862.

An. 862.

La lettre à l'empereur contient les mêmes pro- Epist. s. teftations pour Ignace & contre Photius. Nous avons en main, dit le pape, vos lettres, tant à Leon nôtre predeceffeur qu'à nous; par lesquelles vous rendiez témoignage à la vertu d'Ignace & à la regularité de fon ordination; & maintenant vous dites qu'il a été chaffé comme chargé de grandes accufations; & vous alleguez pour caufe de fa depofition, d'avoir ufurpé le fiége par la puiffance feculiere. Enfin vous dites, que le concile qui l'a depofé étoit aufli nombreux que le concile de Nicée: mais ce n'est pas le nombre des évêques que nous confiderons dans les conciles, c'est leurs avis que nous pefons.

En même temps, mais apparamment par une Epift. 4. autre voye, le pape envoya une troifiéme lettre addressée à tous les fideles d'Orient : où aprés leur avoir expliqué fommairement l'affaire & la prévarication de fes legats, il dit : Sachez que nous n'avons aucunement confenti ni participé à l'ordination de Photius & à la déposition d'Ignace. Et adreffant la parole en particulier aux trois patriarches d'Alexandrie, d'Antioche & de Jerufalem, aux métropolitains & aux évêques : Nous vous enjoignons, dit-il, & vous ordonnons, par l'autorité apoftolique, d'être dans les mêmes fentimens à l'égard d'Ignace & de Photius; & de publier cette lettre dans vos diocéfes, afm

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