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noncée avec éloge dans fes feuilles périodiques avant de mettre le public en état d'en juger. Le peu que j'en avois lû n'étant encore que manufcrit, m'avoit prévenu en fa faveur, & je puis affurer que dans ce que j'en ai dit j'ai eu moins d'égard à la réputation du Traducteur, qu'à ce qui m'avoit frappé moi-même en lifant les divers endroits de fon ouvrage que j'avois eu occafion d'examiner. Depuis que cette traduction paroît, quelques perfonnes ont prétendu que mon jugement avoit été précipité, & j'ai effuïé à cet égard plufieurs reproches, même affez vifs. Les méritai-je? Dois-je me retracter P Pour le fçavoir, j'ai lû cette traduction, je l'ai comparée avec le texte, je n'ai négligé aucune des critiques qui en ont été publiées, & je me fuis con. vaincu de plus en plus que l'on devoit accorder à cette traduction quelque fupériorité fur les quatre autres dont je venois de parler dans l'endroit dont il s'agit: car c'eft prefque tout l'éloge que je lui ai accordé. Or l'on ne peut nier, ce femble, qu'en général cette traduction ne foit écrite avec pureté, que celle de l'Enéïde furtout ne fe faffe lire avec cette fatisfaction que

l'on reffent dans la lecture d'un beau poëme, qu'enfin l'Auteur eft plus rarement tombé dans les vices qu'il reproche à ses prédéceffeurs. S'enfuit-il que fa traduction foit fans défauts, & même fans de grands défauts? Non: mais pour lui accorder la fupériorité, il me femble qu'il fuffit qu'elle l'emporte communément du côté de la pureté & de la force du ftyle, de l'énergie des expreffions, du naturel dans le tour, & qu'elle foit en général plus exacte à rendre le vrai fens de l'Au

teur.

Merc. de No

Avec toutes ces bonnes qualités, on Lett. imprine laiffera pas de dire, après un des mée dans le Critiques de cette traduction, que fou-vemb. 1743 vent le Traducteur fubftitue fans néceffité une idée à la place d'une autre idée, qu'il ne rend quelquefois que la moitié de la pensée de fon Auteur qu'une partie de ce qui forme dans le texte Latin une idée complette; qu'il y a ici des contre-fens, là des omiffions effentielles, ailleurs des fens étrangers, & même des expreffions louches; que M. l'Abbé des Fontaines en s'écartant des fens du pere Catrou & de l'Abbé de Saint Remy, & en abandonnant l'autorité du pere de la

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Ruë, tombe dans des fautes que ceuxci n'ont point commises; qu'ainfi il n'a pas toujours raison, lorfqu'il déprime les autres Traducteurs ou Commentateurs qui l'ont précédé. Mais j'ajouterai avec le même Critique, que s'il n'est pas difficile de faire appercevoir ces défauts dans la nouvelle traduction, il n'est pas moins vrai que l'on rempliroit plufieurs pages des avantages qu'elle a au-deffus des autres. » Quelques fautes, Page 18.» quelques bévûës mêmes, felon l'Au»teur de la réponse à l'écrit de M. Bourgeois, c'est-à-dire felon M. » l'Abbé des Fontaines lui-même n'empêchent pas qu'une traduction »ne foit très eftimable. Ce n'eft que la » foule des méprifes groffieres, & » la continuité du plat ou du ridi>>cule, qui doivent faire rejetter une » traduction. » D'où je conclus que celle où il y a moins de ces méprises & de ces bévûës, moins de ce plat & de ce ridicule, doit être préférée. Et cela eft encore plus vrai d'une traduction qui feroit exemte de ce ridicule sensible, foit dans le fens, foit dans le tour ou dans l'expreffion, que l'on n'a eu que trop lieu de reprocher à quelques-unes des traductions précédentes:

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Or je n'ai point trouvé de cette efpece de ridicule dans la verfion dont il

s'agit.

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Je fçai qu'on lui reproche même ce défaut dans trois lettres pfeudonymes imprimées en 1743. in-4°. Mais on ne le prouve point. Si l'on en excepte trois ou quatre obfervations affez juftes mais qui font peu importantes, on ne voit dans ces lettres que des chicanes, des vétilles, plus fouvent un efprit faux, un raisonneur de mauvaise foi. Je ne dis rien des injures groffieres, des perfonalités défobligeantes, des traits fatyriques & ridiculement malins, qui ne peuvent faire regarder ces lettres que comme des libelles publiés pour infulter, non pour éclairer & inftruire.

La critique de M. Bourgeois, Principal du Collège de Crépy en Valois, porte à faux, & l'on eft furpris que les Auteurs des Mémoires de Trévoux ayent eu la complaifance de l'inférer dans leur Journal du mois d'Octobre 1743. M. l'Abbé des Fontaines y a répondu folidement dans l'écrit qu'il a donné fur ce fujet fous le nom de M. l'Abbé de Crénai en 1744. in-8°. Je voudrois qu'il pût également fe juftifier des accufations que lui a intentées

M. Defgroüays dans fa lettre du quinziéme Septembre 1743. imprimée dans le Mercure de Novembre de la même année. Mais comment détruire une critique qui paroît fondée, comment renverfer des objections que la vérité ne permet pas de contredire, comment anéantir une cenfure dont les objets frappent tout lecteur qui juge fans partialité ? Il vaut mieux faire un humble aveu de fes fautes que de les foutenir avec opiniâtreté. Les hommes fe trompent, dit quelque part M. de Fontenelle, les grands hommes avoient qu'ils fe font trompés. Quelque tournure que l'on donne à une réponse où l'on prétend couvrir des fautes qu'on n'a pas la force d'avouer, quelque efprit que l'on faffe briller dans cette réponse, on n'en impofe qu'à ceux qui veulent bien fe laiffer féduire, & l'Auteur n'en remporte ordinairement qu'une plus grande humiliation. Je ne fais pas cette réflexion dans le deffein de donner des leçons à M. l'Abbé des Fontaines: accoutumé à en donner luimême à toute la République des lettres & à tous les membres qui la compofent, je n'oferois prendre une liberté qui eft d'ailleurs fi rarement bien

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