les navigateurs au milieu des mers, & dont ils font tous les jours le plus grand usage.

Suivant le même Phyficien, les vapeurs répandues dans l'atmosphère particulière qui s'étend entre le globe d'aimant & la terre, s'échappent du fein de celle-ci, entraînent les corps dans leur cours, & produisent les aurores boréales. Cette dernière opinion feroit d'autant plus probable, que le principal théatre de ce phénomène éclatant, paroît être les lieux voifins du pôle, lieux vers lefquels l'aimant se dirige fans ceffe, & où s'en fait fans doute la plus grande évaporation. Les aurores boréales font très-fréquentes dans l'Iflande depuis le folftice d'hiver jufqu'au printems. Midleton affure de même que toutes les nuits d'hiver dans le Groënland font éclairées par ces apparences lumineuses; & Ellis nous apprend que les contrées voifines de la baie d'Hudson & du pôle jouiffent du même avantage.

Quoi qu'il en foit de cette idée d'Halley, le fluide magnétique paroît tellement fortir de la terre, & fe porter dans l'atmosphère, que le fer rougi qu'on laiffe refroidir s'aimante à fes deux extrémités, fi on le place dans fa longueur perpendiculaire à la fur

face terreftre dont il reçoit les émanations, & parce que tout corps aimanté communique fa vertu à un autre corps, fi ce dernier eft .placé dans une direction convenable.

Ainfi, les grillages & les barreaux de fenêtre qui ont refté pendant long-temps dans une position verticale, exposés aux courans de ce fluide, acquièrent la vertu magnétique, fans être frottés de la pierre d'aimant. Ainfi, Philippe Cofta rapporte qu'un morceau de fer courbé par un coup de vent fur le clocher de l'église de Saint Augustin, à Mantoue, fut trouvé poffédant éminemment la propriété attractive lorfqu'on alla pour le redreffer. Les croix des clochers de Delft & de Marseille avoient prefque perdu entièrement leurs qualités métalliques, pour conferver celles de l'aimant, & deux exemples célèbres parmi les Phyficiens confirment encore cette vérité. La croix du clocher de Saint Jean, à Aix, abattue par le tonnerre en 1634, attiroit & repouffoit le fer. En 1690, on démolit le clocher de Chartres, & on trouva au fommet une très-grande quantité de fer changé en pierres d'aimant; elles avoient acquis fucceffivement un accroissement

affez confidérable pour écarter & faire fendre les pierres au milieu defquelles elles étoient placées, & caufer ainfi la chûte du clocher.

Outre les grandes maffes d'aimant que notre globe enfevelit & nous cache il nous en préfente en Allemagne, en Angleterre, & même en France. L'Auvergne en recèle, ainfi que les champs fitués à l'embouchure de la Loire. L'Apennin, les monts de Norwège, l'ancienne ifle de Crète, aujourd'hui Candie, celle de Serfo, les côtes d'Arabie & celles de Guinée, offrent aux Naturaliftes des aimants dont les propriétés peuvent être falutaires, & ne font peut-être pas affez connues.

CHAPITRE III.

Direction de l'aimant & du magnétifme. Le fluide magnétique s'élançant, du sein

qui le renferme, fe répand dans l'atmofphère, & y prend un courant fixe du nord au midi. C'eft à cette tendance continue vers les deux pôles du monde qu'on doit l'application de la bouffole à la navigation moderne; ce qui en a hâté & affuré les fuccès.

Cette direction conftante vient-elle de ce que les mines d'aimant qu'on a trouvées font dans cette direction, hypothèse un peu décréditée depuis la découverte de la mine de Devonshire, dont les veines fe propagent dans un fens contraire, & de l'Eft à l'Ouest Peut-on croire avec Cardan & Fracaftor que ce foit l'attraction de l'étoile polaire qui caufe cette direction? Faut-il l'attribuer, comme Olaus Magnus, à des montagnes aimantées qui confinent le globe terreftre? Ces fentimens semblent plus ingénieux que probables. Ne vient-elle pas plutôt de ce que la terre étant un fphéroïde

applati, & les pôles offrant par conféquent une denfité moins confidérable, une croûte moins épaiffe au fluide magnétique, il y afflue avec plus de force, parce que tout aimant attire d'un côté & repouffe de l'autre l'aimant. Ainfi s'établit un courant fubtil, mais permanent, de corpufcules attractifs & magnétiques. Sortis en abondance d'un pôle, ils font attirés par l'autre dans le sein où ils fe font atténués & élaborés. Ils continuent leur circonvolution utile, paffent dans les filières qui leur font propres, & font conduits avec célérité par les canaux ferrugineux dans tous les règnes de la nature où ils portent le mouvement, la chaleur & la fécondité.

De quelque manière qu'on veuille chercher à expliquer la caufe de la direction de l'aimant, on ne peut rier ses effets. Cette direction. exifte; elle eft uniforme. Tout corps placé du Sud au Nord, dans fa plus grande furface, fe chargera donc plus facilement des corpufcules magnétiques qu'entraîne ce courant déterminé. Il en propagera, il en reffentira plus aifément & le contact & les effets.