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Le Magnétifme n'eft plus un fecret; on commence à croire à l'existence d'un fluide puiffant, répandu dans l'atmofphère, d'un agent, principe de la vie, désigné fous divers noms, & qui bien éprouvé & mieux connu, peut donner les plus grandes lumières fur l'Art de guérir, expliquer des faits jusqu'à préfent regardés comme fabuleux, & déchirer peut-être encore un peu le voile de la Nature. M. Mesmer a renouvellé l'opinion ancienne fur le fluide magnétique, fur les émanations corporelles; il nous redonne le bout d'une chaîne abandonnée, mais qui peut nous conduire à des vérités. Pourquoi négliger d'en fuivre le cours? Tycho-Brahé crut, avec fon fiècle, que les comètes n'étoient que d'inconftans météores, qui fe diffipoient dans les airs: il lut dans Sénèque un paffage d'Apollonius Myndien, qui annonçoit leur retour fixe & affuré : frappé de cette idée, Tycho la publia, mais fans pouvoir convaincre les Aftronomes de fon tems. Cent ans après, parut Dominique Caffini: fon génie puiffant régla les cieux; les comètes furent reconnues pour des corps céleftes, dont la durée ne fut plus éphémère; il prédit leurs paffages, il fixa

leurs révolutions; & l'opinion de l'antiquité, dont il ne reftoit plus qu'une foible trace, fut justifiée.

Qui fait jufqu'où la connoiffance de l'émanation des corps peut s'étendre? Quel empire elle peut avoir ? Pourquoi borner l'efpace immenfe où le génie poursuit la vérité, qui fouvent cède à fes efforts? Que l'homme feroit heureux fi, poffédant lá faculté d'introduire en lui-même le flaide moteur, d'augmenter fon intenfité, & par conféquent fon action fur l'économie animale, il pouvoit veiller sur fa propre conservation ! Lorfque fa fanté eft altérée, que les humeurs épaiffies ne lui laiffent plus voir autour de lui que des objets importuns ou fâcheux, qu'une profonde mélancolie le rend infenfible à l'amour, à l'amitié & à tous les fentimens qui firent fes plaisirs, qu'il lui feroit doux de pouvoir aider puisfamment la nature, qui tend toujours à le guérir & à le faire renaître au bonheur! A l'abri des fautes de l'ignorance & des erreurs, cent fois plus dangereufes, des préjugés, il fe débarrafferoit d'une foule de levains pernicieux qui minent & détruisent fa conftitution.

Si cette idée n'eft qu'une erreur, elle flatte la foibleffe humaine; on fe plaît à la conferver. Mais pourquoi n'ofer penser que l'homme dégradé d'âge en âge, comme l'attestent les traditions de tous les fiècles, peut remonter par fes lumières au terme heureux où de longs jours, & de plus douces jouiffances étoient fon partage, où fes forces plus actives & plus durables, banniffoient plus aifément les maux & créoient plus facilement les biens? Sans doute il ne nous eft pas réservé encore de porter à ce haut point la connoiffance du principe élémentaire. Que de révolutions ne verra-t'on pas peut-être avant que le Magnétisme ait tous les effets qu'on en pourra obtenir! Sa doctrine répandue dans les Indes, cachée fous les fables de l'Egypte & de la Grèce, jetta quelques traits lumineux que la maffe des tems étouffa bientôt. Entrevue après mille ans par Épicure, qui en abusa, & mille ans après par Descartes & Newton, elle eft bien éloignée encore d'être auffi approfondie que peut-être elle le fera un jour. Peut-être, faut-il que l'homme fouvent éclairé, plus long-tems abruti, remontant fans ceffe des ténèbres

à la lumière, & retombant de la clarté dans la nuit, foit parvenu au dernier terme de dépériffement dont fon espèce eft fufceptible, avant qu'il fache la réparer, lui faire acquérir plus de vigueur & lui reftituer fon antique énergie: peut-être alors un bienfaicteur du monde, poffédant les dons du génie dans un corps foible & dégradé, établira, par , par des expériences, la théorie de l'attraction fur l'homme, & la rendra claire & facile. Alors on pourra efpérer que l'espèce humaine, fe relevant progreffivement, fe perfectionnant de génération en généra, tion, retournera au terme, où brillante, forte & éclairée, elle n'aura rien à demander pour fa félicité à la Nature & à fon Auteur.

Je vais rapporter la caufe du Magnétisme, le principe dont plufieurs l'ont fait dériver; décrire des procédés récemment découverts, heureusement employés, mais auxquels on donne peut-être trop d'extenfion. Douter que ces procédés foient fans effet, c'est se refufer à des témoignages trop nombreux: se borner exclufivement à leur pratique, & leur attribuer plus d'efficacité qu'à tous les remèdes, c'eft paffer à une extré

mité contraire. Dans ce foible Effai fur le nouvel Art, moins Phyficien qu'Historien, rapprochant des détails épars, réuniffant les fentimens des Auteurs qui nous ont précédé, qu'il me foit permis de partager pour un inftant leur opinion & même leur crédulité. En raffemblant quelques faits fur l'ancien procès de la doctrine fympathyque & corpufculaire, je laiffe aux Naturalistes & aux Médecins le foin de le juger. Puiffentils nous découvrir ce qu'on doit penfer de cette doctrine! Adoptée pendant des fiècles, oubliée pendant plufieurs autres, elle femble mériter toute l'attention de celui où elle reparoît.

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