EXAMEN DES MINES DE CUIVRE, APPELLÉES Verd de montagne, Bleu de montagne, & de ce qui leur différence. & de ce qui conftitue PAR M. DE MORVEAU. DE ce E ce que l'analyfe ne tire de deux corps que les mêmes produits, ce n'eft pas toujours une raifon d'en conclure qu'ils font abfolument de même nature: lorfqu'ils préfentent, malgré cela, des différences dont on ne peut indiquer le principe, il est évident que l'analyfe eft incomplette; car il n'y a de corps femblables que ceux dont toutes les propriétés font femblables. La couleur étant une de ces propriétés, & l'une de celles qui dépendent le plus immédiatement de la compofition, lorfqu'elle n'eft pas fuperficielle, on a bien fenti que la chaux de cuivre verte ne pouvoit être identique avec la chaux de cuivre bleue, quoique l'effai docimaftique, ni même l'analyfe par la voie humide, n'euffent rien fait découvrir de plus dans l'une que dans l'autre ; cette différence eft donc restée en problême. Il est vrai que M. Sage a tenté de le réfoudre. Il étoit connu que l'alkali volatil fait paffer au bleu le cuivre & toutes les liqueurs qui le tiennent en diffolution; il en a conclu que les cryftaux de mine de cuivre azurée, étoient compofés d'alkali volatil, que toutes les efflorefcences cuivreufes bleues contenoient de l'alkali volatil, & fes fectateurs l'ont répété ; cependant perfonne que je fache n'en a retiré un atôme de cette fubitance: il paroiffoit d'ailleurs peu probable que l'alkali volatil fe trouvât affez abondamment dans l'intérieur de la terre, pour devenir le minéralifateur de tous les cuivres bleus, qu'il y restât affez long-temps en état de liberté au milieu des foufres & des vitriols; car on ne faifoit aucune mention de fel ammoniacal: il paroiffoit encore peu conféquent d'admettre que les cryftaux bleus fofiles, non folubles dans l'eau, fuffent de même nature que les cryftaux d'alkali volatil cuivreux qui s'y diffolvent entiérement. Auffi les Naturaliftes ne fe fontils pas preffés d'adopter cette hypothèse; je vois même que M. Demefte, en donnant la forme de lettres à la doctrine de M. Sage, fe borne à dire (pag. 380, tom. 2), que ics cryftaux naturels peuvent réfulter de la décompofition du cuivre natif par l'intermede de l'alkali volatil; & qu'au lieu d'affirmer une reffemblance exacte, il fe fert de ces termes fi commodes par leur valeur idéfinie, qu'ils font en rapport avec les cryftaux d'azur arti ficiels. Mais les expériences dont je vais rendre compte, me paroiflent fournir une explication plus fatisfaifante de la différence de couleur des deux foffiles, & à laquelle doit céder une analogie auffi vague; d'autant plus que le fait fur lequel elle s'appuie, deviendra lui-même une conféquence du principe que j'aurai établi. Les deux flacons que je mets fous les yeux de l'Académie, contiennent deux diffolutions. du même cuivre rouge par le même acide nitreux; l'une eft bleue comme l'azur naturel, l'autre exactement de la nuance du verd de montagne; il y a donc entre elles la même différence qu'entre ces minéraux; elle n'est due cependant qu'à la différence du procédé de diffolution, qu'en ce que l'une a été faite à froid & lentement, c'est la bleue; l'autre plus rapidement, quoique toujours fans feu, & avec vapeurs rutilantes, parce que l'acide a été moins délayé, parce que le métal y a été jeté en parcelles qui offroient inftantanément plus de points de contact; à cela près toutes les conditions ont été les mêmes : c'eft donc dans cette condition, dans l'effet qu'elle a produit, qu'eft la caufe immédiate de la variété de couleur: or, cet effet étant de conferver plus ou moins de phlogiftique dans la diffolution d'un même métal par un même acide, il fuit qu'il n'y a ici d'autre caufe qu'une plus grande quantité de phlogistique dans la mine bleue. Ainfi nous retrouvons une nouvelle application bien fatisfaifante de ce principe établi par le célèbre Bergman, par rapport à la diffolution de mercure, que M. Maret a déjà utilement appliqué à fon procédé pour la préparation d'un éthiops par précipitation c'eft le fort des découvertes en Chymie, qui ont la vérité pour base, de s'étendre chaque jour à de nouveaux faits, parce que la nature n'a qu'une marche, & ne s'écarte jamais de fa route (1). Aprés avoir trouvé cette folution, je n'ai pas négligé les obfervations, les expériences qui pouvoient fervirà en apprécier le fyftême; & elles fe font toutes réunies pour le confirmer. 1o. L'air pur eft un des plus grands déphlogistiquans qui foit connu, & il fait paffer au verd les cryftaux de cuivre bleus, foit fpontanément à la longue, comme le difent tous les Minéralogiftes, foit à l'aide du feu de calcination. (1) Sthal avoit déjà remarqué que la diffolution de fer par l'acide nitreux, qui fe fait lentement, eft d'une couleur différente de celle qui fe fait rapidement : il dit précifément que plus elle fe fait lentement, plus la liqueur eft verte & femblable à une diffolution forte de vitriol. I demande d'où peut venir cette couleur verte, & n'hésite pas de l'attribuer à la partie gafeufe rutilante qui demeure dans cette diflolution; il confirme cette opinion en obfervant que cette liqueur laiffée à l'air libre, devient bientôt jaune par la diffipation de ces vapeurs, tandis que celle qui eft dans un flacon bouché, demeure d'une couleur verte. V. Traité des fels, chap. xx. |