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chûte des éclufes qui font placées à peu de distance du point de partage, eft encore l'un des inconvéniens les plus confidérables qui exiftent dans les canaux qui ont été exécutés, puifque la quantité d'éclufées d'eau que dépenfent les bateaux pour leur paffage dans un canal, doit toujours fe compter de chaque côté fur le volume qu'exige celle qui a le plus de hauteur. Cette hauteur varie dans ces canaux, depuis quatre à cinq pieds jufqu'à douze à treize ; il y a même des éclufes au canal de Languedoc qui n'ont que deux pieds de chûte : cette diverfité peut avoir lieu dans les canaux qui reçoivent des ruiffeaux en différens endroits de leur longueur; mais dans toutes les parties où le canal ne reçoit pas de nouveaux ruiffeaux, il eft certain que c'est un affez grand inconvénient de ne pas donner la même hauteur à toutes les chûtes des éclufes, fur-tout près du point de partage, fans quoi l'on dépenfe beaucoup plus d'eau qu'il n'eft néceffaire.

La premiere éclufe du canal de Languedoc, après le point de partage du côté de Touloufe, a fept pieds cinq pouces de chûte, & la feconde neuf pieds trois pouces : il eft bien évident que la premiere éclufée tirée du point de partage, ne fuffit pas pour remplir la feconde, & qu'il faut encore tirer de ce même point de partage, un quart d'eau de plus. La neuvième éclufe a douze pieds de chûte; & comme il n'entre dans le canal aucune eau nouvelle depuis le point de par

tage jufqu'à cette neuvième éclufe, il faut donc néceffairement tirer de ce point de partage, une éclufée de douze pieds de hauteur qui contient cent trente - huit toifes cubes, tandis que la premiere n'en contient que quatre-vingt-trois toifes. Si l'on avoit donné à toutes ces éclufes une chûte de fept pieds trois pouces, qui eft la chûte moyenne des éclufes de ce canal de ce côté, il est évident que l'on auroit épargné plus d'un tiers de l'eau que l'on dépense pour la navigation de cette partie, fans aucune augmentation, ni fur le temps que l'on met à traverser les éclufes, ni fur la dépense des conftructions.

Du côté de la Méditerranée, l'inconvénient eft à peu près le même, puifqu'il se trouve auffi une éclufe de douze pieds fept pouces de chûte placée avant la premiere prise d'eau qui fe trouve après le point de partage.

L'inconvénient de la diverfité de hauteur dans la chûte des éclufes, eft encore plus confidérable au canal de Briarre qu'à celui de Languedoc: dans celui-là, la premiere éclufe, après le point de partage, en defcendant du côté de la Seine, eft de fept pieds, & la feptiéme de onze pieds quatre pouces; du côté de la Loire, la premiere éclufe eft de cinq pieds cinq pouces, & la troifiéme de treize pieds, & la chûte moyenne eft de fix pieds. En fuppofant qu'un bateau dépenfât dans fa traverfée deux éclufées, le volume d'eau que l'on tireroit du point

de partage, feroit de cent toifes cubes, fi les éclufes étoient d'une hauteur uniforme; au lieu que l'on doit compter la dépense actuelle fur les deux plus fortes éclufes qui font, l'une de treize pieds, & l'autre de onze pieds quatre pouces, ce qui produira une dépense de cent quatre-vingt-fix toifes cubes, qui eft prefque le double : on a déjà vu que la diverfité dans la chûte des éclufes, n'eft pas le feul défaut de ce canal.

Ce font les pentes du terrein qui ont fans doute engagé à donner ces différentes chûtes aux éclufes; mais il eft bien rare que l'on ne puiffe pas donner une profondeur uniforme à un canal, lorfque l'on fuit, comme cela arrive ordinairement, un côteau, puisque l'on peut prefque toujours l'enfoncer uniformément dans ce côteau, en portant l'emplacement un peu plus haut ou un peu plus bas : mais quand même il faudroit faire de plus grand déblais pour avoir des chûtes d'éclufes uniformes, il ne faudroit pas épargner cette dépenfe, puifque la chofe la plus effentielle à obferver dans la conftruction des canaux, eft ordinairement d'en ménager l'eau.

Quoiqu'il foit très-important, comme on vient de le voir, de faire la hauteur des éclufes uniforme, cela ne doit s'entendre cependant que pour chaque partie d'un canal comprife entre les différentes prifes d'eau; car l'un des meilleurs moyens de ménager la quantité d'eau d'un point de partage, lorfqu'elle n'eft pas des plus abondantes, eft de

faire

faire les éclufes qui en font proches plus baffes que celles que l'on fera après une feconde perte d'eau. Il arrive ordinairement qu'à une certaine distance du point le plus élevé d'un canal, on peut y introduire des ruiffeaux, dont les fources auroient été trop baffes pour pouvoir être conduites au point de partage; alors on peut augmenter, dans ces parties, la hauteur des éclufes à proportion de la quantité de nouvelle eau que l'on reçoit pour alimenter le canal; de forte que de cette maniere on pourra fournir à une navigation double ou triple de ce qu'elle eût été, fi l'on eût fait par-tout des éclufes d'une grande hauteur; par exemple, en faifant les chûtes des éclufes, qui font proches d'un point de partage, de quatre pieds de hauteur feulement; auffi-tôt que l'on pourra y joindre de part & d'autre l'eau de quelque ruiffeau, équivalant à un tiers de celle que l'on tire du point de partage, on augmentera la hauteur des éclufes de deux pieds, & ainfi de fuite jufqu'à ce que l'on foit parvenu à la plus grande hauteur que l'on voudra donner aux éclufes: l'augmentation de dépense qui en résultera, pour faire quelques éclufes de plus, eft une foible confidération dans ce cas là, eu égard à l'avantage de ménager l'eau d'un point de partage, lorfque l'on n'en a pas une grande quantité; d'ailleurs, deux éclufes de quatre pieds de chûte ne coûtent qu'un tiers de plus qu'une éclufe de huit pieds, parce que s'il faut un radier de plus, les

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murs font moins épais, & les portes moins difpendieufes.

Il faut cependant obferver que la dépense des éclufiers formeroit un objet affez important, s'il en falloit néceffairement un à chaque éclufe; mais celles qui avoisinent le point de partage font ordinairement affez proches les unes des autres, pour qu'un éclufier puiffe en deffervir plufieurs.

Lorfqu'un canal ne peut pas être alimenté par des fources, fur une longueur affez confidérable pour remplacer les filtrations & les évaporations, on pourroit diminuer la hauteur de la chûte des éclufes graduellement & proportionnellement à la distance de la derniere prife d'eau, afin de compenfer par la plus grande quantité d'eau que l'on tireroit des biefs fupérieurs, comparée à celle que l'on tireroit des biefs inférieurs, ce qui s'en perdroit dans ces biefs par les filtrations, & même par les évaporations. Ce moyen pourroit avoir fon application, fur-tout dans les terreins de graviers qui laiffent perdre une partie de l'eau: mais comme les grandes évaporations n'ont lieu que pendant un temps de l'année, & que dans les autres faifons ces différentes chûtes feroient un inconvénient, il vaudroit mieux encore les faire toutes égales, & obvier à la perte d'eau par un courant que l'on établiroit à volonté.

S. V. Des Eclufes qui contiennent plufieurs bateaux.

L'on fait quelquefois des éclufes qui con

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