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AN. 1244.

XVII.

Lyon.

Le pape vient à
Matth. Vef
Alberic. p. 575.
Marlet. tom. 2.

munft. p. 348.

P.529.531.533.

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Saint Louis affembla donc les feigneurs de fon royaume pour prendre leurs avis fur ce fujet. Comme ils étoient affemblez,le pape envoya demander permiffion de venir à Reims dont le fiége étoit alors vacant. L'archevêque Henry de Braine étoit mort dès le fixiéme de Juillet 1240. après treize ans & quatre mois de pontificat. La longue vacance de ce fiége vint de la division entre les chanoines, & de l'ambition des prétendans : entre lefquels on remarque Robert de Torote,qui de l'évêché de Langres avoit été trans Egid. Aur. feré à celui de Liege cette année 1240. & qui pour y parvenir à l'archevêché de Reims, fit de grandes exactions fur fes fujets & fur fon clergé; car on n'épargnoit par l'argent en ces occafions; & toutefois il ne pût y réüffir. Enfin cette même année 1244 Juhel de Duchesne, to. 5. Maïenne archevêque de Tours fut transferé à Reims.

Val. 6. 134.

2.342.

Sur la propofition du pape les barons de France répondirent, qu'ils ne fouffriroient point qu'il vînt s'établir dans le royaume. Ils craignoient que fa préfence n'offufquât la dignité royale,& trouvoient trop de difference entre le jeune roi & un homme confommé dans les affaires : enfin ils fçavoient que la cour de Rome étoit à charge à fes hôtes. Le roi répondit donc au pape, conformement à l'avis des seiMatth. Parif. gneurs,mais dans les termes les plus honnêtes. Le pape envoya auffi faire au roi d'Arragon la même demande d'être reçû dans fes états, & il fut refufé de même.

2.5760

Quant au roi d'Angleterre, le pape fe contenta de lui faire écrire par quelques cardinaux, comme de leurs propres mouvemens en ces termes : Nous vous donnons en amis un confeil utile & honorable. C'est d'envoyer au pape une ambassade, pour le prier de

vouloir bien honorer de fa préfence le royaume d'Angleterre, auquel il a un droit particulier; & nous fe- AN. 1244. rons notre poffible pour le faire condescendre à votre priere. Ce vous feroit une gloire immortelle, que le. fouverain pontife vînt en perfonne en Angleterre, ce qui n'eft jamais arrivé que nous fçachions ; & nous nous souvenons avec plaifir de lui avoir oui dire, qu'il verroit volontiers les délices de Oüeft-minster & les richeffes de Londres. Le roi d'Angleterre reçut agréablement cette propofition,& auroit facilement donné dans le piége, fi des perfonnes fages ne l'en avoient détourné, en difant: C'eft déja trop que nous foyons infectez des ufures & des fimonies des Romains, fans que le pape vienne ici lui-même piller les biens de l'églife & du royaume.

Mon. Bad. ano

12440

Le pape Innocent ainfi refusé, se détermina à venir à Lyon, ville neutre alors appartenante à son archevêque. Il partit donc de Genes, où il ne se croyoit pas trop en fûreté, & paffa par les terres du comte de Savoye, où il étoit vers la faint Luc, c'est-à-dire à la mi-Octobre: enfin il arriva à Lyon vers la mi-De- 1144 cembre. Le comte de Savoye étoit Amé IV. dont le frere Thomas escorta le pape jufques à Lyon. Thomas avoit épousé en premieres nôces Jeanne comteffe de Flandres, fille de Baudoüin empereur de CP. mais cette princeffe étant morte fans enfans en 1244. Thomas fe remaria avec Beatrix de Fiesque niéce du pape; dont il eut entre autres enfans Amé V. depuis comte de Savoye.

XVII. Maladie de

Peu de jours avant que le pape arrivât à Lyon,le roi S. Loüis tomba malade à Pontoife d'une groffe fiévre, faint Louis. accompagnée d'une violente dyffenterie. Il en fut at

AN. 1244

Nang Duchefne,

tom. 5. p. 341.

Chr. S. Dion. Spicil. tom. 2. P. 815.

qué le famedi avant la fainte Luce, c'est-à-dire, le dixiéme de Decembre, & on le jugea bien-tôt en grand danger. La nouvelle s'en étant répanduë, jetta les François dans une extrême affliction: car ce prince, quoiqu'il n'eût pas encore trente ans, étoit déja regardé comme le protecteur de la religion. Plufieurs prélats & plufieurs feigneurs accoururent à Pontoise; & après avoir attendu deux jours, voyant croître la maladie du roi, ils envoyerent à toutes les églifes cathédrales, afin que l'on fît pour lui des aumônes, des prieres & des proceffions. La maladie étant venuë à tel point, que les medecins désesperoient de sa vie, lui & la reine fa mere prierent Eudes Clement abbé de faint Denys, de tirer les corps des faints martyrs de leur caveau & les mettre en évidence; car après Dieu & la fainte Vierge, le roi y avoit fa principale confiance. L'abbé alla donc le jeudi avant Noël,c'eftà-dire, le vingt-deuxième de Decembre faire orner l'églife comme aux fêtes les plus folemnelles ; & le peuple de Paris l'ayant appris, s'y rendit en foule. L'élevation des corps faints fe fit le lendemain vendredi en présence de Charles ou Pierre Charlot évê

que de Noyon, & de Pierre de Cuiffi évêque de Meaux, On mit les châffes fur l'autel, puis on les porta en proceffion dans l'églife & le cloître, marchant nuds pieds, & répandant beaucoup de larmes, & de ce jour le roi commença à fe mieux

porter. Il avoit été à la derniere extrémité,& fi bas, qu'une des dames qui le gardoient le croyant paffé, lui voulut couvrir le vifage d'un drap: mais une dame qui étoit de l'autre côté du lit, ne le voulut point fouffrir, Joinvilie, p. 22. ni qu'on l'ensevelît, difant qu'il étoit encore en vie

&

AN. 1244.

Duchefne. p.

368. Sanut. p.

&là-deffus la parole lui revint. On l'avoit crû mort jufques à Lion, où le pape en fut fenfiblement affligé. Le roi étant revenu à lui, demanda l'évêque de Paris, 487. Chr.Sen. & quand il fut venu, il le pria de lui mettre fur l'é- to. 3 Spicil. p. paule la croix de pelerin pour le voyage d'Outre-mer. 117. Les deux reines fa mere & fa femme, le prioient d'attendre qu'il fût entierement guéri, & qu'alors il feroit ce qu'il lui plairoit: mais il déclara qu'il ne prendroit aucune nourriture qu'on ne lui eût donné la croix ; & l'évêque de Paris n'ofant le refufer la lui attacha‐fondant en larmes, auffi-bien que l'évêque de Meaux & tous les autres qui étoient préfens.Il remit à deux ans l'accompliffement de fon vou; mais fi-tôt qu'il fut guéri, il écrivit aux Chrétiens d'Outre-mer pour les encourager leur mandant qu'il étoit croifé, & qu'ils défendissent vigoureusement leurs villes &-leurs fortereffes, jusques à ce qu'il allât à leurs fecours.

XIX. Corefmiens à Jerufalem

Bibl. Orient. p.

Ils en avoient plus de befoin que jamais, dans la défolation de la terre fainte caufée par de nouveaux barbares inconnus aux Chrétiens jufques alors. Les auteurs du tems les nomment diversement, mais plus generalement Corefmiens; & l'opinion la plus vraifemblable eft qu'ils venoient du pays de Coüarzem aμ 1001. Nort de la Corafane. Le prince de cette nation nomné fultan Mahomet Coüarzem-fchah ayant été dépoffedé par Ginguifcan environ vingt-trois ans auparavant & le pays ravagé, ce peuple demeura errant, cherchant des terres où il pût fubfifter; & il vint jusques à Jerufalem de la maniere qui eft racontée dans une lettre écrite d'Acre le vingt-cinquième de Novembre 1244. par Robert patriarche de Jerufalem, v. Sanut p. 217. Henri archevêque de Nazareth & d'autres prélats du p·556. Tome XVII,

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ap. Matth. Par.

païs & adreffée à tous les prélats de France & d'AnAN. 1244 gleterre. En voici la substance.

Les Tartares détruifant la Perfe ont tourné leurs armes contre les Corefmiens & les ont chaffés de leur païs; enforte que n'ayant plus d'habitation certaine, ils en ont demandé à plusieurs princes Sarrafins fans en pouvoir obtenir: mais le fultan de Babylone ne voulant pas les recevoir chez lui leur a abandonné la terre fainte, les invitant à s'y établir, & leur promettant fon fecours. Ils font donc venus avec une grande armée de cavalerie, menant leurs femmes & leurs familles; & fi fubitement què ni nous, ni ceux qui étoient proches n'ont pû le prévoir : ils fon entrez dans la province de Jerufalem du côté de Saphet & de Tiberiade, & se font emparez de tout le païs depuis le Tourion des chevaliers jufques à Gazare. Alors de l'avis unanime des maîtres du Temple, de l'Hôpital & des chevaliers Teutoniques & de la noblesse du païs, nous avons réfolu d'appeller à notre fecours les fultans de Damas & de la Chamele nos alliez & ennemis particuliers des Coresmiens. Mais comme ce fecours tardoit à venir, & que Jerufalem eft fans aucune fortification : les Chrétiens qui étoient dedans fe trouvant trop peu pour réfifter aux Corofmiens, ont réfolu d'enfortir au nombre de plus de fix mille, pour venir chez les autres Chrétiens, laiffant trèspeu des leurs dans la ville.

Ils fe font donc mis en chemin par les montagnes, avec leurs familles & leurs biens: fe fiant aux tréves qu'ils avoient avec le fultan de Carac, & avec les païfans Sarrafins des montagnes. Mais ceux-ci fortant contre ces Chrétiens en onttué une partie, & pris une

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