P. 88. lui-même. La lettre eft du premier de Février 1245. AN: 1245. Le pape écrivit en même tems ainfi à l'archevêque de Gnefne & à fes fuffragans; Afin que cet ennemi de Dieu abusant de la dignité du nom de Chrétien ne se glorifie pas d'écrafer impunément les fidéles : nous yous mandons de l'admonefter dans quinze jours après la reception des prefentes; s'il ne fe defiste point de fes violences, le dénoncer excommunié lai & fes complices chacun dans vos diocéfes; & enfin d'im plorer contre lui le bras feculier, Dès l'an 1243. le pape avoit écrit au Provincial des freres Prêcheurs en Allemagne & à d'autres fuperieurs de religieux de choifir dans les provinces de Magdebourg & de Brême, & dans les diocéfes de Ratisbone, de Paffau,d'Halberftat & de Verden, des religieux pour exhorter les peuples à prendre les armes en faveur de la religion, afin d'étendre la gloire de J.C. & réprimer l'infolence des infideles. C'est-à-dire, que ces religieux prêchoient la croisade contre les païens de Pruffe & des environs, Le légat Guillaume la prêcha auffi en perfonne & nommément contreSuantopoule après l'avoir admonefté inutilement : ce qui excita plusieurs nobles d'Allemagne à venir au secours des chevaliers Teutoniques & des Chrétiens de Pruffe: enforte que Suantopoulc & après plufieurs traitez qu'il avoit rompus aïant été plufieurs fois vaincu, fut enfin reduit à demander la paix, qui lui fut accordée par la mediation d'Opizon abbé de Meffine que le pape avoit envoïé pour cet effet au mois d'Octobre 1243. c'est-à dire, pour terminer les differends entre l'évêque de Cujavie, les chevaliers Teutoniques de Pruffe, les ducs de Pologne & de Camin d'une part; & & d'autre par le duc de Pomeranie Suantopoulc & les nouveaux Chrétiens de Pruffe. Cette paix fut concluë en 1246. Suantopoulc renonça à l'alliance des payens, & fut ablous des cenfures qu'il avoit en couruës. AN. 1245. XXII. Matth. Parif. A l'entrée du Carême qui commença le premier conduite du jour de Mars cette année 1245. le pape fit renouvel- pape. ler par toute laFrance l'excommunication contre l'em- p. 575. pereur, à caufe de quelques nouvelles invasions qu'il avoit faites fur les parens & fur des ecclefiaftiques. Un curé de Paris, qui aimoit l'empereur & haïffoit la cour de Rome, où il avoit été maltraité; ayant reçu l'ordre de publier cette excommunication, dit publiquement dans fa paroiffe à un jour folemnel : J'ai ordre de dénoncer excommunié l'empereur Frideric. Je n'en fçai pas la caufe; mais je fçai qu'il y a un grand differend entre le pape & lui. Je nesçai qui a tort ni qui a raifon : mais autant que j'en ai le pouvoir j'excommunie celui des deux qui fait le tort, & j'abfous celui qui le fouffre. Cette raillerie vint jufqu'aux oreil les de l'empereur, qui envoya des prefens au curé; maine le pape châtia son indiscretion. Le pape fe plaignoit à fes confidens que l'église Ro- Idem p. 581. maine étoit accablée de dettes, & il faifoit entendre qu'il avoit grand befoin d'un notable fecours d'argent. Ce qui s'étant répandu dans le public, plufieurs riches prélats vinrent le trouver, lui témoignerent qu'ils compatiffoient à fes peines & à fes perils, & le feliciterent d'avoir évité les pieges de l'empereur & de s'être approché de fes enfans qui lui étoient dévouez. En même tems ils lui offrirent des presens ineftimables: des chevaux, de la vaiffelle, des habits, Tome XVII. AN. 1245. Duchefne. t. 5. P. 342. Gall Chr.to. I. 8. 587. Ibid. 323 des meubles précieux, de l'or & de l'argent. Hugues abbé de Cluni lui donna une grande fomme d'argent, aux dépens de fon monaftere & des prieurez qui en dépendent. Auffi le pape lui procura l'évêché de Langres vacant dès l'année 1 2 40. par la tranflation deRo bert de Torote à l'évêché de Liege. Hugues fut évêque de Langres en 1244. Pierre de Colmieu archevêque de Rouen fit aussi un grand préfent au pape, & pour y fubvenir fe chargea de grandes dettes, lui & fon églife. Le pape le fit cardinal évêque d'Albane dès la même année 1244.8 donna l'archevêché de Rouen à Eudes Clement abbé de S.Denis en France,qui lui avoit fait auffi de grands prefens. Il fut pourvû par une lettre adreffée au chapitre de Rouen, & dattée de Lion le trentiéme deMars Ibid. 338.. 1245.& reçu dans fon église le quatriéme dimanche d'après Pâques quinziéme jour de Mai. Mais il ne tint Duch. p. 342. le fiege de Rouen que deux ans. Gilles Cornu archidiacre de Sens en fut ordonné archevêque la même année 1244. 1244. à la place de Gautier Cornu fon frere mort le vingt-uniéme d'Avril 1241. Gilles tint ce fiége dix ans. Aimeri archevêque de Lion déja vieux & valetudinaire refigna la même année fon archevêché entre les mains du pape, & fe retira au monastere de Grandmont où il mourut douze ans après. Le pape cependant donna l'archevêché de Lion à Philippe de Savoïé déja élû évêque de Valence,mais avec une difpenfe finguliere. Car encore que Philippe n'eût pas même reçu les ordres facrez, il lui conferva les reve nus de l'évêché de Valence avec ceux de l'archevêché de Lión, de la prevôté de Bruges & de plufieurs autres grands benefices, qu'il avoit en Flandres & en a Angleterre. Ce prince bien fait de fa personne & fort inftruit dans l'art de la guerre commandoit des troupes du pape, & fut chargé de la garde du concile de Lion. Son frere Boniface fut facré par le pape à Lion archevêque de Cantorberi. AN. 1245. Le pape y facra auffi deux autres évêques d'Angle- Matth. Fa terre: le docteur Richard de Viche pour le fiege de p.578. Chichestre & le docteur Roger Vefcham doyen de Lincolne pour le fiege de Cheftre. Leur science&leur vertu firent que le pape n'eut point d'égard à l'oppofition du procureur que le roi d'Angleterre avoit envoyé folliciter contre eux, fondé fur ce qu'en leur promotion on n'avoit pas demandé fon confentement. On lui répondit, que ce prince abusant de fon privilege s'en étoit rendu indigne. Mais le roi d'Angleterre l'ayant appris fit confifquer le temporel de ces deux évêchez. a Cependant quelques prebendes étant venuës à vaquer dans l'églife de Lion, le pape les voulut donner à des étrangers les parens, fans la participation du chapitre; mais les chanoines lui refifterent en face & protefterent avec ferment que fi ces étrangers fe montroient à Lion, ils feroient jettez dans le Rône, fans que l'archevêque ni eux puffent l'empêcher.Vers le même tems un huiffier du pape aïant repouffé rudement un citoyen de Lion, qui demandoit honnêtement à entrer, le citoyen lui coupa la main: & Philippe de Savoye eut bien dela peine à en faire faire quelque fatisfaction, pour fauver l'honneur du pape. XXIII. A la S. Jean qui étoit le terme marqué pour la tenue du concile, fe trouverent à Lion plufieurs prélats Concile de Lion. & deux princes féculiers, Baudouin empereur de L AN. 1245. Duchang. hift. de CP. p. 120. C.P. & Raimond comte de Toulouse. Baudouin avoit 1244. été couronné dans l'église de fainte Sophie à C. P. inContinent après qu'il y fut arrivé, c'est-à-dire,au mois de Decembre 1239. mais bien que l'année suivante il eut remporté fur les Grecs des avantages confiderables par terre & par mer: il fe trouva dans la fuite trop foible pour foûtenir la guerre contre eux, prin cipalement faute d'argent; & fur la fin de l'année il fut contraint de venir en Italie folliciter du 13. fecours auprès du pape Innocent & de l'empereur Frideric, entre lefquels il fut mediateur de la paix comme le comte de Toulouse, mais avec le peu de fuccès que vous avez vû. L'empereur Grec Vatace foûmit cependant le royaume de Theffalonique, que tenoit Jean Comnene; & fa puiffance croiffoit de jour en jour. Au concile fe trouverent auffi des ambaffadeurs de l'empereur Frideric, dont le premier étoit Tha dée de Sueffe chevalier & docteur de loix: de la part du roi d'Angleterre le comte Bigod & d'autres nobles, & les envoyés de quelques autres princes.. Matth. Parif. 658. Quant aux prélats il y en avoit cent quarante, tant archevêques qu'évêques, à la tête defquels étoient trois patriarches Latins, de CP. d'Antioche & d'Aquilée ou de Venife. Il y avoit plufieurs procureurs des -prélats abfens chargez de leurs excuses, & les dépu-tez des chapitres. Labbé de S. Alban en Angleterre y envoya un de fes moines accompagné d'un clerc, -& ce fut fans doute par eux que Matthieu Paris maine du même monaftere apprit tout le détail de ce concile qu'il rapporte dans fon hiftoire.Il ne vint perfonne du royaume de Hongrie defolé par les Tartares; & peu de prélats d'Allemagne, à cause de la guer |