Imágenes de páginas
PDF
EPUB

vrai que tous les louangeurs font éga lement difpofés à faire une fatyre; la perfone leur est indiférente, il ne s'agit que de fa pofition.

Il femble qu'un encens fi banal, fi prostitué, ne devroit avoir rien de flateur; cependant on voit des homes eftimables à certains égards, avides de louanges, fouvent ofertes par des protégés qu'ils méprifent, femblables à Vefpafien qui ne trouvoit pas que l'argent de l'impôt levé fur les immondires de Rome, eût rien d'infect. L'adulation la plus outrée eft la plus fûre de plaire une louange fine & délicaté fait honeur à l'efprit de celui qui la done un éloge exagéré fait plaifir à celui qui le reçoit : il prend l'exagé ration pour l'expreffion propre, & penfe que les grandes vérités ne peuvent fe dire avec fineffe.

L'adulation même, dont l'excès fe

fait fentir, produit encore fon èfet. Je fais que tu me flattes, difoit quelqu'un, mais tu ne m'en plais pas moins.

Ce ridicule comerce de louanges a tellement prévalu, que dans mille oca fions il est devenu de règle, d'obligation, & femble faire un article de légiflation; come fi les homes étoient effentièlement louables. Qui que ce foit n'eft revêtu de la moindre charge, que fon installation ne foit accompagnée de complimens fur fa grande capacité; de forte que cela ne fignifie plus rien.

[ocr errors]

Les louanges font mises aujourd'hui au rang des Contes de Fées; on ne doit donc pas les regarder précisément come des menfonges, puifque leurs auteurs n'ont pas fupofé qu'on pût les croire. Quelques vils que foient les flateurs, quelqu'agueri que fût l'amourpropre, fi l'on atachoit aux louanges

*

toute la valeur des termes, il n'y a perfone qui eût le front de les doner ni de les recevoir. Une monoie, qui n'a plus de valeur, devroit ceffer d'avoir

cours.

On ne doit pas confondre avec ce fade jargon les témoignages fincères de l'eftime à laquèle un home de mérite a droit de prétendre & d'être fenfible. Il faudroit un grand fond de vertu, pour la conferver avec le mépris pour l'opinion des homes dont on eft

[merged small][ocr errors]

CHAPITRE IV.

Sur la Probité, la Vertu & l'Honeur.

[ocr errors]

N n'entend parler que de probité, de vertu & d'honeur; mais tous ceux qui emploient ces expreffions en ontils des idéés uniformes? Tâchons de les diftinguer, Il vaudroit mieux, fans doute, infpirer des fentimens dans une matière qui ne doit pas fe borner à la fpéculation; mais il est toujours utile d'éclaircir & de fixer les principes de nos devoirs. Il y a bien des ocafions où la pratique dépend de nos lumiè

res.

Le premier devoir de la probité eft l'obfervation des loix. Mais indépendament de cèles qui répriment les entreprises contre la fociété politique, 'il y a des fentimens & des procédés

[ocr errors]

d'ufage qui font la fûreté ou la dou ceur de la fociété civile, du comerce particulier des homes, que les loix n'ont pu ni dû prescrire, & dont l'observation est d'autant plus indispensa ble, qu'elle eft libre & volontaire; aulieu que les loix ont pourvu à leur propre exécution. Qui n'auroit que la probité qu'elles exigent, & ne s'abftiendroit que de ce qu'elles puniffent, feroit encore un affez malhonête home.

[ocr errors]

Les loix fe font prêtées à la foiblesse & aux paffions, en ne réprimant que ce qui ataque ouvertement la fociété : fi elles étoient entrées dans le détail de tout ce qui peut la bleffer indirectement, elles n'auroient pas été universèlement comprises, ni par conféquent fuivies : il y auroit eu trop de criminels, qu'il eût quelquefois été dur, & fouvent dificile de punir, atendu la proportion qui doit toujours être entre les fautes

« AnteriorContinuar »