Imágenes de páginas
PDF
EPUB

pour Ferdinand étoit fi grande, qu'étant cardinal il AN. 1459. le difoit fon ferviteur. On a touché ailleurs quelquesunes des raifons de cette forte inclination, ou plûtôt de la haine qu'il portoit aux François : nation felon lui, trop fiere, & qui lui étoit un grand obftacle aux deffeins qu'il avoit de faire la guerre aux Turcs. Mais nos interêts particuliers d'ordinaire nous touchent beaucoup plus que ceux du public, à quelque dignité que nous foïons élevez. René d'Anjou étoit le véritable & légitime héritier de la Sicile, & fon fils Jean avoit toutes les raifons du monde de poursuivre un droit que le faint fiége avoit confirmé tant de fois à fon pere contre le bâtard de Ferdinand qui en avoit été déclaré injufte ufurpateur par Callixte III. Pie II lui-même regardoit le droit de ce dernier, comme douteux, puifque dans l'acte d'inveftiture qu'il lui en donna, il mit en termes exprès: Sauf le droit d'autrui. Preuve qu'il reconnoiffoit que d autres y avoient droit auffi-bien que Fer

dinand.

Pendant que Jean duc de Calabre étoit appliqué à la conquête du roïaume de Naples, les factions qu'il croïoit avoir diffipées à Genes avant fon départ, s'y renouvellerent. Quelques feigneurs peu fatisfaits du gouvernement des François, réfolurent de les en chaffer Pierre Fregofe, qui lui-même avoit traité avec le roi Charles VII. pour lui foumettre cette république, avoit quitté la ville, & s'étoit retiré dans une de les terres, pour méditer plus à loifir fur les moïens de faire réüffir fon entreprise. Il traita fecretement avec Ferdinand d'Arragon & avec le duc de Milan, & fe réunit avec les Fiefques. Quand

CXXXIX. troubles dans Genes pour en

Nouveaux

chaffer les Fran

fois.

AN. 1459.

CXL.

affiége Alcacer

battu.

Sup. n. 52.

la partie fut liée, il fe mit en campagne avec des
troupes, & parut devant Genes, dans l'efpérance d'y
exciter quelque révolte. Mais aïant cette premiere
fois manqué fon coup, il revint à la charge dans le
tems que le duc de Calabre avoit envoïé fa flotte
attaquer celle de Ferdinand; il furprit la ville, il y
fit entrer par le moïen des échelles une grande par-
tie de fes foldats. Par bonheur le duc de Calabre y
étoit encore, car ceci arriva avant la bataille de Sar-
no. A la premiere allarme il se faifit des avenuës,
repouffa les ennemis; & Fregofe périt dans cette oc-
cafion. Mais les révoltes recommencerent l'année
fuivante.

Le roi de Portugal étoit toûjours en guerre avec Le roi de Fez le roi de Fez. Celui-ci tenta encore une fois AlcacerSeguer, & cft Seguer; mais le gouverneur averti de fon deffein, fit venir du fecours de Portugal, & fe défendit ficourageufement, que les Maures furent contraints de fe retirer avec beaucoup de perte après cinquante-trois jours de fiége. Le gouverneur Edouard de Menezès alla enfuite à Lisbonne rendre compte au roi du fuccès de cette campagne. Il en fut très bien reçu, & sa majesté Portugaise le fit comte de Viana pour récompenfer les fervices.

Le roi de Castille ne fut pas fi heureux dans la guerre contre les infidéles, que roi de Portugal le fut dans fon entreprise. Le marquis de Caftagneda à qui il avoit donné le commandement des armées du côté du roïaume de Grenade, donna dans une ambuscade, & y demeura prifonnier. Henri envoïa une autre perfonne en fa place, & païa fa rançon. Enfuite voulant fe précautionner contre les fourdes

[ocr errors][merged small][merged small]

CXLI. Affaires du

roïaume de Ca

ftille.

Mariana bift.

Hifp. lib. 23.

pratiques des grands de fon roïaume, il diftribua les AN.1459. principales charges de l'état à fes créatures. Il donna celle de connétable de Caftille vacante par la mort d'Alvarez de Lune à D. Miguel Doranzo, la maîtrise d'Alcantara à D.Gomez de Cacerès fon majordome; & la charge de majordome à D. Bertrand de la Cueva. Après toutes ces précautions il alla à Madrid, & de là à Segovie, pour prendre le plaisir de la chasse. Aïant appris que D. Juan de Lune étoit en poffeffion de Soria, des trois villes d'Infantafgo, & du comté de San-Estevan, comme tuteur de la fille de D. Alvarez, il eut peur qu'il n'entreprît quelque chofe contre fon fervice. Il alla donc à Agallon où D. Juan le reçut très-bien : Mais le lendemain le roi le fit arrêter, & lui fit dire que s'il ne lui rendoit toutes les places fortes dont il s'étoit emparé, il lui feroit trancher la tête. D. Juan, pour fauver la vie, les rendit, & le roi en même tems les donna à Pacheco dont le fils époufa la fille de D. Alvarez. Henri recouvra auffi les villes de Carthagene, de Laurea, & plufieurs autres dépendantes tant de la maîtrise de Saint Jacques, que du marquifat de Villene, ou de la Corogne, dont Alphonfe Fachardo gentilhomme de Murcie s'étoit emparé pendant les dernieres guer

res civiles.

CXLII Decret du pa

contre les appels du faint

Le pape Pie II. étoit toûjours à Mantouë; & comme il s'étoit imaginé que les appels des jagemens pe du faint fiége au concile, qui étoient en ufage depuis long-tems, & dont la juftice & en bien des cas la néceffité étoient inconteftables, ne tendoient qu'à ruiner fon autorité; la premiere chofe qu'il fit au commencement de cette année 1460. fut de con

au concile.

Collect, concil.

P. Labbe, tom

13. p. 1801.

AN. 1460.

[ocr errors]
[ocr errors]

رد

Matth.cap. 16. 99

damner ces appels comme erronez, détestables, nuls & contraires aux faints canons, nuifibles à la chrétienté, & même ridicules. Voici les propres paroles de fon decret qu'il fit après avoir confulté les cardinaux & les évêques qui fe trouvoient alors à Mantouë, & qu'il publia le dix-huitiéme de Janvier. La bulle commence par ces mots: Execrabilis, priftinis temporibus inauditus. "Il s'eft gliffé de notre tems, dit„il, un abus détestable & inoüi dans l'antiquité, », que quelques-uns pouffeż par un esprit de rébellion plûtôt que par un fain jugement, autorisent, ,, en préfumant, pour éviter la punition de leurs péchez, d'appeller du pontife de Rome vicaire de Jesus-Chrift, à qui il a été dit en la perfonne de Joan. cap. il. faint Pierre Paiffez mes brebis; & : Tout ce que ,, vous lierez sur la terre fera lié dans le ciel; d'appeller, dis-je, de fes jugemens au concile futur: ,, ce que tout homme inftruit des regles du droit, doit regarder comme contraire aux faints canons, & préjudiciable à la république chrétienne. Car pour ,, ne rien dire de tout ce qui en peut montrer l'abus, ,, qui ne voit le ridicule d'appeller à ce qui n'existe ., pas, & qu'on ne fçait pas s'il exiftera? Par ces appels les pauvres font opprimez en plufieurs manienem, in Bul-, res par les grands: les crimes demeurent impunis, lar. tom. 2. Pii ,, on entretient la rébellion contre le premier fiége tout le monde a la liberté de pécher; en un mot toute la difcipline de l'églife & l'ordre hierarchi,, que tombent dans le défordre & la confufion. Voulant donc éloigner de l'églife un poifon fi dange,, reux, & pourvoir au falut des brebis qui ont été commises à nos foins, en éloignant toute occafion

"

39

Comment. Pii as

H. lib. 3. ad fi

II. conftitut. 5.

رو

[ocr errors]

دو

[ocr errors]
[ocr errors]

de fcandale du bercail de notre Sauveur ; de l'avis " AN. 1400% & du confentement de nos vénérables freres les cardinaux de la fainte église Romaine, de tous les " prélats & docteurs en droit qui fuivent notre cour, & de notre science certaine, nous condamnons " ces appels, nous les réprouvons comme erronez, nous les déclarons inutiles, dangereux & de nulle." valeur; ordonnant qu'à l'avenir personne n'ofe, fous quelque prétexte que ce foit, interjetter de " femblables appels de nos jugemens, ordonnances, “ de même que de ceux de nos fucceffeurs, ou y ad- « herer, ou en faire ufage. Que fi quelqu'un fait le « contraire depuis le jour de la publication de ces préfentes dans notre chancellerie apoftolique, après ce deux mois, de quelque état, ordre & dignité qu'il " foit, même impériale, roïale & pontificale, il en- « courra de fait la fentence d'excommunication dont " il ne pourra être abfous que par le fouverain pon-" tife, fi ce n'est à l'article de la mort. Les mêmes <«. peines & cenfures feront auffi encouruès par les uni « verfitez, colléges, notaires, témoins qui affifte- «< ront à ces actes, & genéralement tous ceux qui ausont confeillé & favorifé ces fortes d'appels “.

CXLIII.
Mefures que

prend le pape
pour la guerre

contreles Turcs.

Peu de jours après que le pape eut donné un decret fi peu conforme aux véritables regles du droit canon, & fi contraire à la pratique ancienne & unie verfelle de l'église, aïant affemblé dans l'église de faint Pierre à Mantoue les cardinaux, les prélats & tous les ambaffadeurs des princes, il leur expofa ce p. 1802.. qui s'étoit fait dans cette affemblée depuis huit mois qu'on y étoit, & ce qu'on en pouvoir efperer. "Si " les Hongrois, dit-il, font fecourus, ils attaqueront "

In ead. collect. concil. tom. 13.

« AnteriorContinuar »