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ECCLÉSIASTIQUE,

Par M. FLEURY, Prêtre, Prieur d'Argenteuil,
& Confesseur du Roi, LOUIS XV.

Nouvelle Édition, entièrement conforme à celle de Paris, revue &
corrigée par l'Auteur.

TOME QUATORZIE ME.

Depuis l'an 1401, jufqu'en 1432.

A NIS MES,

Chez PIERRE BEAUME, Libraire, & Imprimeur du Roi.

M. D C C. LXXI X.

AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROL

P. M. Izquierdo, Agustino.

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L

I. Juridiction

ES différents entre les eccléfiaftiques & les
laïques touchant la juridiction, ont été si fré-
quens depuis le douzieme fiecle, que j'a effentielle à
cru les devoir examiner dans un difcours l'églife.
particulier. Pour en juger fainement, il faut

commencer par bien connoître la juridiction propre & effentielle à l'églife, & la diftinguer foigneufement des acceffoires qu'elle a reçus de temps en temps, foit ples conceffions des princes, foit par des coutumes introduites infenfiblement. Il faut auffi convenir de bonne foi, que dans les derniers fiecles la puiffance eccléfiaftique & féculiere ont fouvent entrepris l'une fur l'autre.

La juridiction Mentielle à l'églife eft celle que Jefus- Matt, xxvII Chrift a donnée à fes apôtres, en leur difant après fa 18. réfurrection: toute puiffance m'a été donnée au ciel & en la terre. Allez donc, inftruifaz toutes les nations & les baptifez; leur enfeignant d'observer tout ce que je vous ai ordonné. Vous voyez à quoi il réduit l'exercice de cette toute-puiffance qu'il a reçue de fon Pere, à l'inftruction, & l'adminiftration des facremens: la doctrine comprend les myfteres & les regles des mœurs, les facremens font tous défignés par le baptême. Dans ce même intervalle entre la réfurrection & l'afcenfion, il dit à fes apôtres comme mon Pere m'a envoyé, je vous envoie Jo. xx. 21. aufi; puis il fouffla fur eux & leur dit : recevez le faint- Matth. XVIII. Efprit; ceux dont vous remettrez les péchés, ils leur 18. font remis ; & ceux dont vous les retiendrez, ils leur

Jo. 36.

font retenus; leur donnant ainfi le pouvoir de lier & de délier, qu'il leur avoit déjà promis pendant fa vie mortelle. Je ne parle ici que des pouvoirs ordinaires & perpétuels, néceffaires pour conferver l'églife jufqu'à la fin des ficcles: c'eft pourquoi je ne dis rien des dons furnaturels, langues, prophéties, guérifons & autres miracles, fi fréquens pendant les trois premiers fiecles.

Or ces pouvoirs que J. C. a conférés à fon églife, ne regardent que les biens fpirituels, la grâce, la fanctification des ames, la vie éternelle. Lui-même étant fur la Luc. 11. 14. terre n'en a pas exercé d'autres. Il n'a voulu prendre aucune part au gouvernement des chofes temporelles : jufqu'à refufer d'être arbitre entre deux freres pour le par XVIII. tage d'une fucceflion; difant, qui m'a établi pour vous juger? 11 eft vrai qu'il eft roi; mais fon royaume, comme il a dit lui-même, n'eft pas de ce monde, il est d'un ordre plus élevé. Il ne veut régner que fur les cœurs, par la crainte filiale de fes fujets, le refpe&t & l'amour qu'ils lui portent. Il ne veut que les rendre meilleurs, il n'exige d'eux autre tribut que des louanges, des actions de grâces, l'adoration en efprit & en vérité. fel eft le royaume de Jefus-Chrift.

De vera re

lig.

Pour l'établir, il n'a employé que ces moyens convenables à la noblefle de fa fin. Il n'a rien fait par force, dit S. Auguftin, mais tout par perfuafion, & pour perfuader, il n'a pas employé, comme les philofophes, de longs raifonnemens, dont peu d'hommes font fufceptibles, mais des miracles, qui font à la portée de tout le monde, propres à attirer l'attention & à fonder l'autorité. Il a communiqué à fes difciples ce pouvoir de faire des miracles, & d'en communiquer le pouvoir à d'autres autant de temps qu'il a jugé convenable pour établir fuffifamment l'autorité de fon églife.

Cette autorité eft le fondement de la juridiction eccléfiaftique, qui confifte à conferver la faine doctrine & les bonnes mœurs. La doctrine fe conferve en établiffant des docteurs pour la perpétuer dans tous les fiecles, & en réprimant ceux qui la voudroient altérer. Or l'églife a toujours exercé ce droit, enfeignant la doctrine qu'elle a reçue de J. C. & ordonnant des évêques qui en font les principaux docteurs : & qui pour leur aider ont ordonné outre les prêtres, des diacres & d'autres miniftres inférieurs tout cela malgré l'oppofition des infidelles, y.Tim. 1. 20. pendant les plus cruelles perfécutions. Saint Paul dans fes chaines ne laifoit pas d'enfeigner ; & la parole de Dieu, comme il dit lui-même, n'étoit pas enchaînée. Il favoit auffi réprimer & châtier les faux docteurs, comme Hymence & Alexandre qu'il livra à Satan à cause de leurs

Hier. fcript. in Luc.

&

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