tas portoit fes malheurs, n'empêcha pas T. TAS l'humeur melancolique d'agir en lui so. avec une violence extraordinaire, & de lui caufer des Symptomes étranges, qui acheverent d'établir dans le monde l'opinion de fa folie. Les vapeurs qui s'élevoient dans fon cerveau, en vinrent jufqu'à un tel point de force, qu'elles dui cauferent enfin des accès, qui le mettoient pendant quelque temps hors de lui-même. Ce vapeurs étant diffipées, il avoit l'efprit auffi libre qu'auparavant, il raifonnoit fur fon infirmité, & fe reffouvenoit fort bien de toutes les images bizarres que ces vapeurs avoient prefentées à fon imagination. Lorfqu'il réflechiffoit fur cette étrange maladie, il en voyoit la caufe mieux que perfonne; mais il ne laiffa pas de tomber dans la foibleffe de prefque tous les malades, qui s'imaginent que la caufe de leur mal n'eft pas naturelle, lorfqu'ils ont épuifé fans fuccès les remedes de la Medecine. Il crût quelque temps avoir été enforcelé; penfée qui fut fortifiée par quelques tours qu'on lui joûa, & fur lefquels il ne ecrivit de fa prifon, s'em le T. TAS- douta point qu'il n'y eût dans f prifon un efprit folet. Plufieurs Princes, comme le Duc de Savoye Philippe Emmanuel Grand-Duc François, l'Empereur Rodolphe, & le Pape Gregoire XIII. à qui il ployerent inutilement pour fa liber té. Mais enfin Vincent de Gonzague fils du Duc de Mantoue, étant allé à Ferrare, à l'occafion du Mariage de Cefar d'Efte avec Virginie de Medicis, & l'ayant été voir dans fa prifon, conçut tant d'eftime pour lui, qu'il le demanda au Duc d'une maniere que ce Prince ne put le lui refufer. Il le retira donc de l'Hôpital de S. Anne au commencement de l'année 1586. & l'emmena avec lui à Mantoue. Le Prince de Mantoue avoit pro mis au Duc de Ferrare qu'il feroit gardé dans cette ville avec autant de précaution qu'il le pouvoit être à Ferrare, & pour fatisfaire à fa pro meffe, il avoit donné au Taffe la ville de Mantoue pour prifon; mais comme cette efpece de captivité deplaifoit encore au Taffe, il fit fi bien da auprès du Duc de Ferrare, qu'il le T. TAS Pendant que le Taffe vivoit en re- ec T. TAS- la vue fur le Royaume de Naples: Il lui falloit pour cela avoir la permiffion du Viceroy, le Comte de Miranda, & il n'eut pas. de peine l'obtenir. Dès qu'il l'eut, il fe rendit à Naples à la fin de l'année 15 87. & commença à y pourfuivre la reftitution de la Dot de fa Mere, dont fes Oncles maternels s'étoient emparez; mais comme cette affaire trainoit en longueur, il fit au commencement de l'année 1589. un Voyage à Rome, pour tâcher de recouvrer fes Ecrits, qu'il avoit laiffez à Ber game, & qu'il avoit demandez plufieurs fois inutilement. Pendant qu'il étoit dans cette ville, où il fe faifoit admirer des gens d'efprit, Ferdinand, Duc de Tofcane, qui venoit de fucceder au Duc François fon frere, fouhaitta l'avoir à Florence, & employa pour cela l'autorité du Pape, qui exhorta le Taffe à fe rendre auprès de lui. Ne pouvant refifter à leurs inftances, il alla à Florence dans le printemps de l'an 1590. dans le deffein d'en fortir le plûtôt qu'il pourroit. Il y reçut toutes fortes d'honneurs, qui ne lui oterent SO oterent pas l'envie de retourner à T. TAS Naples pour y vivre en liberté. Revenu à Rome, it attendoit pour fe rendre dans fa patrie, que fon procès fût en état d'y être jugé, lorfque le Prince de Conca l'invita à ve nir fe loger dans fon Palais à Naples, d'une maniere fi preffante, qu'il fe rendit à fes inftances, & retourna à Naples dans l'Automne de 1591. Ce fut dans le repos dont il jouit en ce lieu qu'il compofa fa Jerufa lem conquife. Le Prince de Conca, qui en étoit charmé, apprehendant que quelqu'un ne lui enlevât le Taffe & le Poëme, chargea une perfonne de veiller fur l'un & fur l'autre. Le Taffe s'en étant apperçu, s'en plaig nit à Jean Baptifte Manfo, fon ami qui furpris de cette conduite, 1s tira lui-même du Palais du Prince & l'emmena loger chez lui. Il vivoit tranquillement dans fa maifon, s'abandonnant fans contrainte à fon penchant pour l'étude, & jouiffant d'une fanté parfaite, que la bonté de l'air, & le calme de fon efprit lui avoient rendu, lorfque le Cardinal Cinthio, neveu du Pape Tome XXV E |