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CHRISTOPHE DE LONGUEIL.

CH

C. DE

N

HRISTOPHE de Longueil (en Latin Longolius) naquit l'an L o 1490. à Malines. Il nous apprend lui- G U EIL. même que cette Ville fut le lieu de fa naiffance. Ainfi Erafme s'eft trompé, quand dans une de fes Lettres il l'a fait Hollandois, natif de Schoonhoven, Ville de la Hollande. Ceux qui ont prétendu qu'il étoit Parifien ne fe font pas moins éloigné de la verité; c'eft cependant la qualité qu'on lui a donné dans quelques éditions de fes Ouvrages.

Sa naiffance eût une tache, qui ne fait cependant aucun tort à fon mérite & à fa vertu, & il peut être mis au rang des illuftres Batards. Il fut fils naturel d'Antoine de Longueil, Evêque de Leon, & Chancelier de la Reine Anne de Bretagne. Ce Prélat étant Ambaffadeur dans les Païs-Bas, y cut un commerce de galanterie avec une Demoiselle de Malines, dont il eut ce fils, que non feulement il ne fe fit point une honte de reconnoître,

C. DE mais pour l'éducation duquel il

LON-
GUEIL.

n'oublia rien.

Après l'avoir laiffé à Malines avec fa mere, jufqu'à l'âge de huit à neuf ans, il le fit venir à Paris, pour l'y faire inftruire dans les fciences. Les heureufes difpofitions du jeune de Longueil & le goût qu'il avoit pour l'étude, l'y poufferent avec beaucoup de rapidité. Sa pénétration lui faifoit entendre fans peine les Auteurs les plus difficiles, & fa mémoire prodigieufe ne lui aiffoit rien perdre de ce qu'il y trouvoit de plus remarquable. Il ne laiffoit pas cependant de faire des Recueils de ce qu'il lifoit, s'accoûtumant ainfi de bonne heure à difcerner le bon d'avec le mauvais.

Quelques inclinations qu'il eut pour les Belles-Lettres, fes parens & fes amis l'en retirerent, en lui infpirant le defir de parvenir aux Charges de la Robbe, & lui perfuadant d'aller à Valence en Dauphiné, étudier le Droit Civil fous Philippe Decius, qui y profeffoit.

Il employa à cette étude fix années entieres, au bout defquelles il revint à Paris, pout donner des preuves des

connoiffances qu'il avoit acquifes C. DE dans la Jurifprudence.

LON

Il y plaida, & y fit toutes les fonc-GUEIL. tions d'Avocat, avec tant de réputation, qu'au bout de deux ans, il fut, quoique très-jeune, fait Confeiller au Parlement de Paris, fi l'on en croit le Cardinal Polus, Auteur de fa Vie. La chofe eft cependant d'autant moins croyable qu'on étoit alors plus difficile fur la difpenfe d'âge, & qu'on étoit plus attentif à ne laiffer entrer dans des places de cette importance que des perfonnes graves & venérables par le nombre de leurs années. Il faut apparemment mettre cette particularité dans le même rang celle le même Auteur rapque porte plus bas, que le Roy d'Efpagne Philippe le choifit à dix-huit ans pour être Secretaire d'Etat, ce qui ne peut être, puifque Philippe mourut le 25. Septembre 1506. lorfque de Longueil n'avoit encore que 16. ans.

que

Au refte l'amour des Belles-Lettres ayant repris le deffus dans l'efprit de notre jeune Sçavant, il oublia alors entierement la Jurifprudence pour fe livrer à fon penchant. Ce qui fait voir

Lo

C. DE que fon élevation à la Charge de Con N- feiller eft imaginaire, puifqu'elle auGUE 1 L. roit été pour lui une nouvelle obligation de s'appliquer à l'étude des Loix.

Pline fut le principal Auteur qui lui parut meriter fon application. Perfuadé qu'il y trouveroit affez de matiere pour travailler pendant bien des années, il entreprit d'examiner & d'approfondir toutes les chofes dont cet Auteur traite dans fon Hiftoire naturelle, foit en lifant les autres Auteurs qui en ont traité, soit en confultant la nature.

Il lui falloit pour cela lire tous les Auteurs anciens Grecs & Latins, & voyager en divers païs; & c'eft ce qu'il fe mit d'abord en devoir de faïre. Comme il ignoroit entierement la Langue Gréque, qui lui étoit cependant néceffaire pour l'execution de fon projet, il commença à s'y appliquer avec tant d'ardeur qu'au bout d'un an il fe vit en état d'entendre tous les Livres écrits en cette Langue.

Il paffa enfuite cinq années à lire les Auteurs Grecs, dont il crut pouvoir tirer quelques lumieres pour l'intelli

C. BE

gence de Pline. Ce qu'il lut dans ce naturalifte, des Plantes & des Poif- L O Nfons, l'engagea à faire un voyage en G U EIL. Provence, où il fçavoit devoir trouver la plupart de chofes dont il y eft parlé, pour mieux comprendre par la vûë ce qu'il y rapporte,

Le defir même de voir tous les' lieux dont cet Auteur fait mention. lui fit entreprendre de grands voyages. Il voulut vifiter l'Angleterre, l'Allemagne, la France & l'Italie, & auroit même paffé dans le Levant, fi les Guerres des Turcs ne l'en euffent empêché,

par

Il courut mille hazards pour contenter fa curiofité. Comme il paffoit la Suiffe avec deux de fes amis les Suiffes, qui depuis la Bataille de Marignan ne regardoient les François qu'avec horreur, le prirent avec fes Compagnons pour des efpions, & les pourfuivirent jufques fur les bords du Rhône. L'un d'eux fut tué en faifant réfiftance, l'autre paffa le Rhône à la nage, & de Longueil fut bleffé à un bras & arrêté prifonnier.

Il cut beaucoup à fouffrir, faute de fecours, pendant un mois que

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