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le faire, parce qu'elle n'étoit pas beaucoup obfervée. AN. 1474. Le roi promit d'envoïer fes ordres à Charles d'Amboife gouverneur de Champagne; & fur cette promeffe Rivarol revint trouver la ducheffe qui eut beaucoup de joie de cette nouvelle. Cependant elle fit partir fur le champ un fecond député qu'elle chargea de fupplier le roi de l'affurer qu'il la laisseroit aller en Savoie, qu'il lui rendroit ses fils & les places qui lui appartenoient & qu'il l'aideroit à maintenir fon autorité en Savoie. Le roi lui promit tout ce qu'elle demandoit & auffi tôt fit partir un homme vers Charles d'Amboise feigneur de Chaumont pour lui ordonner ce qu'il avoit promis à Rivarol. D'Amboife executa fi bien fa commiffion, qu'il délivra la princeffe fans beaucoup de peine. Louis XI. ravi de cet heureux fuccès, manda à fa fœur de le venir trouver inceffamment à Tours; il envoïa audevant d'elle beaucoup de feigneurs, & alla lui-même pour la recevoir à la porte du Pleffis-lez-Tours. Quoiqu'il eût réfolu de ne rien dire à la ducheffe qui. pût la fâcher, il ne put s'empêcher de l'appeller madame de Bourgogne en la faluant: Madame de Bourgogne, lui dit-il, vous foïez la très-bien venuë. Elle mines, 44.6.4 connut bien que le roi vouloit badiner, & répondit qu'elle étoit toute Françoise & prête d'obéir au roi dans ce qu'il voudroit lui commander. Elle ne demeura que fept ou huit jours au Pleffis; on lui fournit de l'argent pour fon voïage; il y eut un traité dont deux copies furent données de part & d'autre. Le roi lui rendit fes enfans, & lui fit reprendre la régence, il la remit en poffeffion des châteaux de Mont- sn Savoie fort melian & de Chambery, & la ducheffe partit fort contente.

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Mem. de Co

CI. Elleretourne

AN. 1476.

contenté du roi, avec lequel elle vécut toûjours dans une parfaite intelligence, obfervant le traité qu'elle avoit fait avec beaucoup d'exactitude.

Le duc de Bourgogne n'eut pas laiffé impuni l'attentat du gouverneur de Champagne, fi une affaire plus intereffante ne l'eût obligé à conduire ailleurs ce qui lui reftoit de troupes. Le duc de Lorraine étoit allé mettre le fiege devant Nanci dont la garnifon étoit de douze cens hommes, parmi lesquels il y avoit trois cens Anglois commandez par un nommé Cochin, & le gouverneur de la Ville étoit le feigneur de Bievres. Les affiegeans avancerent peu leurs travaux en quarante jours de fiege, & les affiégez ne laiffoient pas néanmoins de preffer le duc de Bourgogne de venir les dégager. Mais ce prince étoit alors poffedé d'une mélancolie fi noire, qu'il avoit perdu & la fanté du corps & la tranquillité de l'efprit; il étoit tellement échauffé qu'il ne pouvoit fe rafraîchir, quoique réduit à la ptifane fans ofer boire du vin. Un excès de bille noire fucceIncommodi da, & le duc eut autant de froid qu'il avoit reffenti de chaud; le meilleur vin n'étoit pas capable de le réchauffer; & Commines dit qu'il falloit mettre des étoupes ardentes dans des ventouses, & les appliquer à l'endroit du cœur pour y attirer le fang. Son chagrin entretint cette mauvaise humeur, qui dégenera en une mélancolie hipocondriaque, ce qui lui fit remettre à Campo-Baffo, dont on a déja parlé, le foin de dégager Nanci. Mais Campo-Baffo au lieu de reconnoître la confiance que ce prince avoit en lui, ne chercha que de nouvelles occafions de le perdre.

CII.

tez du duc de

Bourgogne.

Mem. de Comi

nes,

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ch.

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Il follicita encore une fois Louis XI. par l'entremise du feigneur de Craon qui commandoit un camp volant pour la France dans le Barrois; & fur le refus réïteré du roi, il s'adreffa au duc de Lorraine, & lui promit d'empêcher le fecours de Nanci. Il amusa le duc de Bourgogne qui étoit avec fon armée à quatre lieuës de Nanci; il lui fit accroire que les afliegez n'étoient pas fi preffez qu'ils le mandoient. Cependant la place capitula le fixiéme d'Octobre. Les Anglois dont le capitaine Cochin avoit été tué, ne voulurent plus obéir au gouverneur & drefferent euxmêmes les articles d'une capitulation avec le duc de Lorraine. Ils contraignirent le gouverneur à la figner, après avoir foulevé contre lui la meilleure partie de la garnison. La place fut donc renduë, & le lendemain de fa reddition le duc de Bourgogne arriva devant la ville. Il connut que s'il fe fut hâté, il l'auroit infailliblement fauvé; fa premiere pensée fut de bloquer la ville, & tous les officiers excepté Campo-Baffo, furent de cet avis; ce traître pour venir plus facilement à bout d'exécuter le deffein qu'il avoit formé de tuer le duc, ou de procurer la prife & la défaite de fon armée, foutint feul avec beaucoup d'opiniâtreté qu'il falloit affiéger la place régulierement.

Elle fut donc affiégée en forme & tellement preffée, que le duc de Lorraine en attendant le fecours qu'on lui préparoit, hazarda un grand convoi, fur l'affurance que Campo Baffo lui donna qu'on le laifferoit entrer dans la ville. Cependant le convoi fut attaqué, & ceux qui le conduifoient, furent tuez ou pris. Parmi les prisoniers se trouva un gentilhom

AN. 1476.

CIII. Nanci fe rend au duc de Lorraine par la tra

hifon de Canpa-Basso.

CIV.

Bourgogne

fion de décou

nes, liv. s. ch. 6

AN. 1476. me Provençal nommé Cifron domestique du duc de Lorraine,avec lequelCampo-Basso avoit eu plufieurs Le duc de conferences, & qui fçavoit le fecret de tout ce qui manque l'occa- fe tramoit contre le duc de Bourgogne. Le perfide vir la trahifon, officier confeilla au duc de le faire pendre, & l'ordre en fut auffi-tôt donné, quoique contre les loix Mem. de Comi- de la guerre. Cifron furpris de ce genre de mort, crut pouvoir fauver fa vie en découvrant la trahison de Campo-Basso. Il fit dire au duc qu'il avoit un fecret important à lui reveler, & de telle confequen ce, qu'il ne pouvoit être confié qu'à lui seul. Leduc en fut averti, mais le Napolitain fçut détourner le coup, & envoïa un ordre précis au boureau de pendre Cifron; ce qui fut fait, fans que ce malheureux eût rien déclaré de ce qu'il fçavoit. Ala faveur de ce filence, Campo-Basso travailla sans embarras à executer fa trahifon.

CV.

Louis XI. don

ne

cours au duc de Lorraine.

Le fiege de Nanci continuoit toûjours avec viindirecte- gueur; & Louis XI. convint de secourir le duc de ment du fe- Lorraine par des voies fecretes. Il écrivit au feigneur de Craon qui commandoit fes troupes dans le Barrois, de s'approcher de Nancy le plus près qu'il pour roit, fans toutefois entrer fur les terres de Lorraine, & d'affembler un grand convoi pour faire croire aux affiegeans qu'on vouloit foulager les affiegez, afin que le duc de Bourgogne fit quelque détachement de fon armée. Le roi licentia encore quelques regi mens de cavalerie, pour fournir aux foldats l'occa fion d'aller fervir fous le duc de Lorraine. Enfin il fit entendre à la noblesse de Champagne & de Picardie l'interêt qu'elle avoit de ne pas laiffer augmenter la puiffance desBourguignons,qui ne l'incommodoient

déja

déja que trop; & plufieurs gentilshommes allerent fecourir le duc de Lorraine, à qui le roi fit toucher vingt-trois mille écus d'or, qui fuffirent pour lever dix mille Suiffes & cinq cens Allemands, que ce duc joignit à ses autres troupes.

AN. 1476.

CVI. Bataille entre

où celle du duc

eft défaite.

Il marcha avec tant de diligence, qu'il prévint les Bourguignons, & fe faifit du pont de Saint-Nico- les deux armées las; ce qui ranima la valeur des affiégez prêts à fe de Bourgogne rendre à difcretion. Le duc de Bourgogne là-deffus affembla fon confeil, & tous lui confeillerent de fe retirer fous le canon de Pont-à-Mouffon, & s'y retrancher. Ce duc n'avoit pas plus de quatre mille hommes dans fon armée, la plûpart malades ; & fur l'avis de Campo-Basso, il refolut la bataille. Il tira fes troupes de fes retranchemens, n'aïant pas affez de monde pour les garder, & alla se poster à la maladrerie de la Magdelaine. Les deux armées en vinrent aux mains. Les Bourguignons expofez à la rigueur du froid, qui étoit violent alors, & aiant dans les yeux la neige qui tomboit en abondance, ne pouvoient ni furement tirer leurs coups, ni éviter ceux que les Lorrains leur portoient. Mais ils étoient à couvert de tous côtez par un défilé, par un ruisseau, par une forte haie, par des collines, & par un bois. Le duc de Lorraine ne fachant comment les attaquer, prit un chemin par les collines, que les feuls habitans du païs connoiffoient; il évita par ce moien l'artillerie des Bourguignons placée à l'avant-garde, & tomba, lorfqu'ils y penfoient le moins, du haut en bas fur le flanc gauche de leur corps de bataille. La cavalerie foutint affez vigoureusement leurs efforts; mais l'infanterie lâcha le pied, & fe retira dans le bois, où les Tom. XXIII. LII

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