Imágenes de páginas
PDF
EPUB

gement fans fcandale; il jugea que c'étoit un abus AN.1459. & non pas une coûtume, que les notaires fuffent mêlez avec les évêques, & défendit ce mélange par une

bulle datée de Mantouë le trente-uniéme de Mai, à Extat bulla laquelle tout le monde applaudit. Les notaires malgré eux fe foumirent à cette loi. Cette bulle préceda le decret touchant la prefféance, qui ne fut rendu que le quinziéme du mois d'Aoust.

conftitut.

CIV. Premiere féan

Tout ayant été ainfi reglé, on indiqua la prece de l'affem- miere féance de cette affemblée au neuviéme de Sepblée de Man- tembre, comme on le voit dans les lettres du

touc.

patris Labbé, tom. 13.

pape

à Jean de Carvajal fon legat en Hongrie, datées de la veille. La raifon qu'en rend fa fainteté, eft que prefque tous les ambaffadeurs des princes chrétiens étoient arrivez, qu'on attendoit inceffamment les ducs de Milan & de Modene qui avoient promis d'arriver vers le milieu du mois ; que dans peu l'on verllect. concil. roit les ambassadeurs de France, d'Angleterre & de Bretagne. Cependant quelques-uns manquerent. Philippe duc de Bourgogne ne pouvant s'y trouver en perfonne, quoiqu'il l'eût promis,envoya en fa place le duc de Cléves fils de fa four, avec un celebre cortege de feigneurs. Le pape envoya au-devant de lui deux cardinaux qui d'abord refuserent, prétendant que c'étoit abaiffer leur dignité, qui égaloit, difoient-ils, celle des rois. Mais le faint pere leur ayant remontré que l'empereur qui n'étoit pas moins qu'eux, alloit fouvent lui-même au-devant des ducs & des marquis, ils fe rendirent. Cet ambassadeur arL'ambassadeur riva donc accompagné de ces deux cardinaux, & fut du duc de Bour- admis dans l'affemblée. Il y prit féance, & dit que A l'affemblée, le duc de Bourgogne louoit fort les grands deffeins

CV.

gogne eft reçu

du

du pape; mais qu'il en croyoit l'execution impoffible, parce qu'on avoit befoin de grandes forces pour faire la guerre à un ennemi auffi puiffant que le Turc; que l'Allemagne, la France & l'Angleterre étoient divifées, & qu'il falloit les réunir avant que de penser à cette guerre.

Quelques fpécieufes que fuffent les raifons du duc de Cleves, elles n'arrêterent point le zéle du pape.

AN. 1459.

CVI.

guerre contre

Comment. Pil

Il répondit qu'il etoit vrai qu'on avoit fait rarement Demandes du la guerre en Orient fans les François qui s'étoient pape pour la toûjours distinguez dans les faintes entreprises pour les Turcs. la religion, qu'il travailleroit à établir une paix folide entre eux & les Anglois: qu'il n'étoit pas fi aifé de pacifier l'Allemagne ; que cette affaire demandoit du tems; mais qu'il ne defefperoit pas d'y réuffir, pour peu quon fût bien intentionné; que fi l'on differoit davantage, la Hongrie périroit entiérement; que les Turcs une fois maîtres de ce royaume ne trouveroient plus d'obstacles pour entrer en Allemagne, de-là en Italie, en France & en Espagne, comme autrefois les Barbares avoient fait; que les fe- 1. lib. 3. cours qu'on demandoit ne pouvoient pas épuifer les princes; qu'on exigeoit d'eux feulement que chacun contribuât à compofer une armée de cinquante à foixante mille hommes ; qu'un plus grand nombre feroit inutile; que les rois pourroient prendre avec eux l'argent néceffaire pour l'entretien & la folde des troupes de Hongrie, d'Allemagne, de Boheme & de Pologne, qui fous la conduite du légat du faint fiége défendroient la Hongrie & les provinces voifines, jufqu'à ce qu'on eût raffemblé toutes les forces. Que le duc de Bourgogne étant un des plus puiffans Tome XXIII,

L

AN. 1459.

CVII.

ducs de Milan

Mantouë.

Papienfis epift

25.

princes, devoit y contribuer davantage, qu'il avoit fait vou d'aller à cette guerre en perfonne, & que c'étoit une occafion favorable pour lui, de tirer vengeance des Turcs qui avoient retenu fi long-tems fon pere en prifon. Toutes ces raifons du pape n'ébranlerent pas le duc de Cléves, qui fçavoit bien que le duc de Bourgogne n'étoit pas disposé à contribuer aux frais de cette guerre. Mais fa fainteté fit de fi fortes instances, qu'enfin le duc promit deux mille hommes d'infanterie & autant de cavalerie, qui feroient entretenus aux dépens de ce prince autant de tems que dureroit la guerre qu'on alloit entreprendre.

Peu de jours après l'arrivée du duc de Cléves Arrivée des François Sforce duc de Milan fe rendit à Mantouë & de Modène à & les deux cardinaux al lerent au-devant de lui. Le célebre François Philelphe gendre d'EmanuelC hryfolore le harangua avec tant d'éloquence, que le pape furnomma cet orateur la mufe d'Athénes. Le duc fut loué fur fon courage, fur fon zéle à défendre la foi; & il méritoit ces éloges, ayant toutes les qualitez qui font un grand prince. Borfe duc de Modene arrêté par une maladie, envoya à Mantouë fon frere, qui promit au nom du duc trois cens mille écus d'or. Les ambaffadeurs de Florence, de Sienne & de Boulogne, firent auffi leurs offres de même que les Genois; mais ceux-ci ne promirent qu'en fecret, ayant des ménagemens à garder avec le roi de France, auquel ils s'étoient foumis depuis peu. Ferdinand roi de Naples offrit plus que les autres, & s'engagea même par vœu à cette guerre. Les ambaffadeurs de Cafumir roi de Pologne s'y trouverent avec beaucoup

Bergom. lib. 15.

Trithem. de fcript. ecclef. Paul. Jov. in

akog.

d'appareil; ceux du duc de Savoye, & beaucoup AN. 1459′

d'autres. Les Venitiens furent les derniers de toute l'Italie. Informez que tant de princes avoient envoyé leurs ambaffadeurs, & qu'on attendoit au premier jour ceux de France, ils se piquerent d'honneur, & firent des offres fort genereufes; mais ils mirent cette condition, que tous les princes chrétiens feroient unis dans cette entreprife.

CVIII.

femble les princes & les ambaffadeurs dans l'églife cathé

En. Sylviu

L’assemblée étant devenuë par là fort nombreuse, Le pape afquoique les François ne fuffent pas encore arrivez; le pape les convoqua tous dans l'église cathédrale vingtiéme de Septembre, parce que la premiere séan- dråle, ce indiquée le neuviéme, avoit été differée jusqu'à ce jour, comme le prouve la date du difcours du pape rappotté parmi fes lettres. Il voulut leur parler à tous avant le départ du duc de Milan, qui ne pouvoit pas faire un plus long féjour à Mantouë, & les exhorter à l'execution de la bonne œuvre pour laquelle ils étoient assemblez. On commença par la celebration de la meffe, après laquelle il y eut encore de nou- epift. 397. velles difputes fur la prefféance entre les Venitiens & lesSavoyards. Ceux-là vantoient beaucoup leur puiffance & l'antiquité de leur feigneurie; ceux-ci fe fondoient fur leur nobleffe & fur la coûtume. Le pape voyant que l'affaire devenoit sérieuse, & qu'on étoit même venu aux querelles, qu'Urface Juftinien ambaffadeur de la république prenoit la chose avec beaucoup de chaleur, fit affeoir les Venitiens après les ambaffadeurs du duc de Bourgogne, & les Savoyards au pied de fon trône.

Après avoir ainfi appaifé ce differend, il imposa filence, & parla pendant trois heures. Il fit voir que

'CIX. Autre dif cours du pape à

AN. 1459.

l'affemblée de Mantouë.

cette guerre à laquelle il exhortoit tous les princes, étoit non feulement avantageufe, mais encore facile, jufte & néceffaire. Il offroit pour l'entreprendre & fa perfonne & tout ce qui lui appartenoit. Il affura qu'il Collect. con- ne refuferoit rien de tout ce qu'on jugeroit à propos tom. 13. pag. qu'il fit, & ne demanda pour le prefent aux princes En.Sylv.epift. qu'une volonte ferme & conftante de fervir la reli

cil. patris Labbe

1751.

397.

`CX.

Beffarion parle après le pape.

gion, & de garantir la foi du péril, promettant de prendre dans la fuite les mésures nécessaires pour la levée de l'argent, pour le choix des generaux, pour l'équipage des flottes, & pour le tems de l'expedition. Ce qui ne lui feroit pas difficile, ajoûta-t-il, puifqu'on ne manque ni d'armes, ni de chevaux, ni d'argent, ni de vaisseaux, ni de bons soldats, ni de chefs experimentez.Tout ce qui manquera fans doute, fera la bonne volonté. Le fouverain pontife fut écouté avec une fi-grande attention, qu'on ne perdit pas un mot de fon difcours.

Après que le pape eut parlé, le cardinal Beffarion Le cardinal prit la parole au nom du facré collége, & fon difcours fut prefque auffi long. Il s'étendit beaucoup fur les grandes pertes que les chrétiens avoient faites à la prise de Conftantinople, & fur les maux qui en arriveroient infailliblement,fi l'on ne s'oppofoit aux progrez des Turcs. Il dit que la victoire étoit facile, & qu'il ne trouvoit de difficulté que dans l'entreprise pour concilier tous les efprits. Il affura que le facré collége approuvoit tout ce qui avoit été avancé par fa fainteté. Enfuite on vint aux déliberations, & l'avis du pape fut fuivi d'un confentement unanime de tous les autres. Le duc de Milan qui s'exprima en veritable homme de guerre, offrit sa

« AnteriorContinuar »