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Égypte.

beaux édifices. Les Arabes l'enlevèrent au
lâche Héraclius. Ils y brûlèrent cette riche bi-
bliothèque, dont la perte fera un fujet de
deuil pour les favans de tous les pays & de
tous les âges. Les Turcs enfin, peuple igno-
rant & barbare, ont été fes derniers maîtres.
Ils y ont anéanti, autant qu'ils l'ont pu, le
commerce, l'agriculture & les fciences. Après
tant de fléaux, après tant de fiècles révolus,
on ne peut refuser son admiration à un pays
qui poffède encore tant de monumens anti-
ques. Le globe entier n'en réunit pas autant
que cette petite portion du monde. Cette ob-
fervation feule doit fuffire pour donner une
idée du peuple qui l'habita, & du degré de
perfection où il
porta les arts.

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Description des Oafis, ou iles au milieu des fables, où étoit fitué le Temple de JupiterAmmon, avec les routes qui y conduifent.

LA description de l'Égypte ne ferait

Α

pas com

Égypte.

plète, fi on paffait fous filence les Oafis, dé- Hautependans de la Thébaïde. Ces lieux remarquables ont été connus des géographes arabes: Abulfeda, leur guide, les décrit de la manière fuivante: les Oafis dépendent du Said; ce font des îles au milieu des fables; en partant des rives du Nil, il faut trois jours de chemin à travers le défert pour y arriver. On en compte trois; on les place à l'occident de la HauteÉgypte, au-delà de la chaîne des montagnes, parallèle au fleuve. Il ajoute que la première eft très-cultivée, qu'elle poffède des ruiffeaux abondans, des fources d'eaux chaudes, des campagnes couvertes de moiffons & d'autres choses surprenantes; mais que le peuple y eft malheureux.

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C'était près d'une de ces habitations, que le fameux temple de Jupiter-Ammon était fi

tué. La route que tint Alexandre, lorfqu'il Haute- entreprit ce voyage, ne permet pas d'en Égypte. douter.

Alexandre, dit Quint-Curce, ayant pacifié la Haute-Égypte, fans rien changer à l'ancienne conftitution du gouvernement, réfolut d'aller au temple de Jupiter-Ammon. Le chemin qui y conduit eft presqu'impraticable la terre y eft fans fources & le ciel fans pluies. On découvre de toutes parts d'immenfes plaines de fables, qui, frappés continuellement des rayons du foleil, exhalent des vapeurs fuffoquantes. Dévorés par la féchereffe & la chaleur, les voyageurs font obligés de traverser un fable profond, qui, cédant fous leurs pas, rend la marche très-pénible. Les Égyptiens exageraient encore ces difficultés : mais rien ne pouvait arrêter Alexandre, qu'un défir ardent entraînait vers l'oracle de Jupiter; le faîte de la grandeur humaine ne pouvant raffafier fon cœur avide de gloire, il croyait, ou voulait qu'on crût que ce dieu était fon père.

Il defcendit par le fleuve jufqu'au lac Mareotis, avec ceux qu'il avait choifis pour l'accompagner. Il en partit pour accomplir fon def fein: les deux premiers jours, la fatigue ne fut pas très-grande. En effet, quoiqu'on marchât fur un fol ftérile, on n'était pas encore

entré dans les folitudes brûlantes. Lorsqu'ils y
furent avancés, ils n'apperçurent autour d'eux
que des fables profondément entaffés, fans
arbres, fans plantes, fans aucune trace de
culture: au milieu de ces campagnes arides,
semblables aux navigateurs, ils cherchaient la
terre des yeux; l'eau que des chameaux por-
taient dans des outres, fut bientôt épuisée ;
& l'on ne pouvait réparer cette perte,
fur un
fol dépourvu de fources, & où tout était
brûlé par le foleil. Dans cette extrémité, foit
bienfait des dieux, foit effet du hafard, le
ciel fe couvrit de nuages épais, & la pluie
tomba en torrent. Enfin, après quatre jours.
de marche dans cette affreufe folitude, ils ar-
rivèrent fur le territoire confacré à Jupiter-
Ammon. Avec quel étonnement ils trouvèrent
dans cette contrée entourée de déferts, des
forêts impénétrables aux feux du jour, des
ruiffeaux d'une eau excellente, & une tem-
pérature délicieufe, qui faifait jouir toute l'an-
née des charmes du printems & du don pré-
cieux de la falubrité.

Les habitans de ces bois, nommés Ammoniens, demeurent dans des cabanes répandues çà & là fous l'ombrage. Un triple mur, bâti au milieu, leur tient lieu de citadelle. La première enceinte enferme le palais de leurs an

Haute

Égypte.

Haute

Égypte.

ciens rois; la feconde où fe trouve le temple, eft deftinée aux femmes, aux enfans, aux efclaves les guerriers chargés de défendre cet afyle, occupent la troifième. La fontaine du Soleil coule dans un autre bofquet, pareillement confacrée à l'oracle d'Ammon; l'eau en eft tiède le matin, fraîche à midi, chaude le foir, & brûlante à minuit.

La ftatue qu'on révère en ces lieux, ne reffemble point à celles que fabriquent ordinairement les sculpteurs; faite d'émeraudes & de pierres précieuses, elle a la forme d'un bélier. Quand on veut la confulter, les prêtres la portent dans une nacelle dorée, à laquelle font fufpendues de chaque côté des coupes d'argent. Les matrones & les vierges fuivent le dieu en chantant un hymne dans la langue du pays, afin de fe rendre Jupiter favorable, & d'en recevoir un oracle certain.

Sous les monarques du bas-empire, les Oafis devinrent un lieu d'exil. Ces princes entichés de la vaine fcience de la théologie, y envoyèrent tour-à-tour & les fe&taires & les catholiques. L'Oasis d'Ammon eft peu connue des Égyptiens modernes : la grande Oasis, la plus fréquentée de toutes, parce qu'elle fe trouve fur le chemin des caravanes d'Abylfinie, poffède un petit nombre d'habitans. Le

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