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rient eux-mêmes: Il pénétre en badinant jufqu'au fond de leur cœur : Il en donne adroitement à tout ce qui le préfente, & fe divertit des fottifes du temps. Et moi je n'oferai dire un petit mot? tout bas? dans quelque petit trou, comme le barbier de Midas?

A. Non, ne vous y jouez pas.

P. Vous avez beau faire, je le dirai. Ecoutez mon petit Livre, je l'ai vû, oui je l'ai vû. Tout le monde a des oreilles d'âne. Hé bien, ce secret, ce petit mot fatirique, ce rien s'il en fut jamais ; je ne le donnerois pas pour toute l'Iliade de Labéon. Vous qui êtes tout rempli de ces grandes idées qu'on voit dans les Comédies de Cratinus, qui avez pâli fur les écrits fatiriques & mordans d'Eupolis & d'Ariftophanes, jettez auffi les yeux fur mes fatires, vous y trouverez peut-être quelque chofe d'affez folide & d'affez fenfé. Je voudrois que ceux qui liront mes ouvrages euffent un peu pris l'air, le génie & le goût de ces grands hommes. Loin d'ici ces petits efprits, qui se font honneur de leur mal-propreté, & mettent toute leur science à faire une pointe fur la chauffure des Grecs, & à railler de leur politeffe: Loin d'ici ces efprits groffiers qui reprochent impudemment aux autres leurs deffauts naturels ; qui nomment un borgne, un borgne, s'imaginant valoir quelque chofe , parce qu'ils ont été Meffieurs les Ediles à Arezzo, où, de leur pleine autorité, ils ont fait brifer les fauffes mefures des marchands: Loin d'ici les gens qui n'ont que du mépris pour la Philofophie, & pour les Mathématiques: qui font des plaifanteries fur les nombres, & les fupputations, & fur les figures que l'on trace fur le fable: qui ne cherchent que l'occafion de rire, voyant une courtifane effrontée arracher la barbe à un Philofophe Cynique. Que tous ces Meffieurs-là s'en aille matin au Palais; & le foir, à la Comédie..

Lent

SATIRA II.

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ac vota

facrificio, quo Macrinus natalem fuum diem celebrat
Superis faciebat, occafionem fumit Perfius infectandi varia hominum
vota, quorum alia funt impia, alia levia, alia inter fe pugnantia :
fub finem, quænam bona & facienda fint, docet,

H

UNC, Macrine, diem numera meliore lapillo,

Qui tibi labentes apponit candidus annos.

Funde merum Genio: non tu prece pofcis emaci
Quæ nifi feductis nequeas committere Divis.

At bona pars procerum tacitâ libabit acerrâ.

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Haud cuivis promptum eft, murmurque humilefque

fufurros

Tollere de templis ; & aperto vivere voto.

Mens bona, fama, fides, hæc clarè, & ut audiat hofpes Illa fibi introrfum, & sub linguâ immurmurat: 06: 10 Ebullit patrui præclarum funus ! &, & fi

ô

Sub raftro crepet argenti mihi feria, dextro
Hercule pupillumye utinam, quem proximus hæres
Impello, expungam! namque eft fcabiofus, & acri.

SATIRE II.

A l'occafion du facrifice que Macrin offroit aux Dieux le jour de fa naiffance,& des vaux qu'il leur adreffoit, Perfe reprend les hommes de l'impieté, de la légereté, & de la contrarieté de la plupart de leurs vœux: & fur la fin il leur apprend à n'en former que d'utiles de louables.

M

tez

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A CRINUS, célébrez ce jour -ci avec plus de réjouiflance que les autres jours, puisqu'il eft T'heureux commencement d'une nouvelle année que vous allez ajoûter à celles que vous avez déja paffées. Contenvous pour cela de répandre fimplement du vin sur l'Autel de Votre Génie : : car vous ne prétendez pas ache ter fij'ofe parler ainfi, par de fomptueux facrifices, certaines graces qu'on ne demande aux Dieux qu'après avoir tâché de les corrompre. La plupart de nos grands Seigneurs ne vous reffemblent pas; ils viennent préfenter de l'encens aux Dieux: mais leurs voeux & leurs prieres fe font fans que perfonne fçache ce qu'ils difent; ils ont pour cela leurs raifons. Hélas! Il n'eft pas facile de bannir des Temples ces fortes de prieres, qui fe font à voix. baffe & à petit bruit.

Voici ce qu'ils demandent tout haut, & ce que tout le monde entend. Grands Dieux, donnez-nous de l'efprit, du crédit, de la réputation. Et que demandent-ils tout bas, & marmottans entre leurs dents? Ah! dit l'un, fi ron oncle mouroit fubitement! que je plaindrois peu la dépense d'un fuperbe convoi! Ah, dit l'autre, fi je pouvois, à la faveur d'Hercule, trouver un tréfor en labourant ma terre! Si je pouvois, dit celui-ci, fupplanter ce pupille, fubftituer dans ce teftament mon nom à la place du fien! Je fuis le premier après lui; auffi - bien.

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Bile tumet. Nerio jam tertia ducitur uxor.

Hæc fan&tè ut pofcas, Tiberino in gurgite mergis
Manè caput bis, terque, & no&tem flumine purgas.
Heus age, refponde: minimum eft quod fcire laboro.
De Jove quid fentis? eftne ut præponere cures

Hunc cuiquam? Cuinam? Vis Staio? an fcilicet hæres

Quis potior judex, puerifque quis aptior orbis?

Hoc igitur, quo tu Jovis aurem impellere tentas,
Dic agedum Staio: proh Juppiter! ô bone, clamet,
Juppiter! at fefe non clamet Juppiter ipfe?
Ignoviffe putas, quia cùm tonat, ocyùs ilex

Sulfure difcutitur facro, quàm tuque, domufque

An, quia non fibris ovium, Ergennâque jubente,
Trifte jaces lucis, evitandumque bidental,

Idcirco ftolidam præbet tibi vellere barbam

Juppiter? aut quidnam eft, quâ tu mercede Deorum

Emeris auriculas ? pulmone, & la&tibus un&tis ?

Ecce avia

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aut metuens Divûm matertera, cunis

Exemit puerum, frontemque, atque uda labella

ne peut-il pas vivre long-tems; la bile eft répandue fur tout fon corps; il eft tout couvert de gale. Voilà déja la troifiéme femme que Nérius époufe; qu'il eft heureux ! Hé bien, pour fanctifier tous ces vœux, vous vous plongez la tête le matin dans le Tibre à deux & à trois reprifes; vous ne manquez point de vous laver à votre réveil. Répondez-moi un peu, mon ami, je n'ai qu'un mot à vous dire ; ce que je veux fçavoir, eft fort peu de chofe. Que penfez-vous de Jupiter? A qui ne le préférezVous pas ?

A qui?

Oui; apparament vous le préférez à Staïus: héfitez vous? C'est un Juge incomparable; il n'y en a pas au monde un plus habile à expédier les affaires des pupiles & des enfans mineurs. Faites-lui pour voir, confidence des chofes que vous tâchez d'obtenir de Jupiter. Grands Dieux! s'écriera Staïus tout effrayé, ah Jupiter! peut-on former de tels vœux, & vous en demander l'accompliflement! Crois-tu donc, miférable, que Jupiter ne fe récrie, & ne s'apostrophe pas lui-même fur les indignes prieres que tu lui fais? Tu crois qu'il te pardonne, parce que fon tonnere tombe plutôt fur quelque arbre, que fur ta maifon & fur toi ? parce qu'en paffant par quelque Bois facré, tu n'y es pas frappé de la foudre; parce que ton corps n'y eft pas réduit en cendre par le feu du Ciel; parce qu'on ne l'y évite point comme un objet d'abomination & d'horreur, qu'on a coutume d'expier par les facrifices ordonnés par Ergenna; tu t'imagines que Jupiter te permet de l'infulter & de te moquer de lui? Eft-ce parce que tu lui immoles de grofles & graffes victimes, que tu comptes qu'il exaucera tes injuftes vœux? prétens-tu acheter à ce prix le fuccès de tes détestables défirs?

Voici une autre forte de vaux. Je vois une tante fuperftitieure, & une bonne grand'mere, qui s'en vient tirer fon enfant du berceau, elle lui nétoye pieufement avec fa falive la bouche & le front, pour empêcher qu'il ne foir

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