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chées ensemble, & il résulte de cette expérience que ce n'eft point la terre, mais le centre de pefanteur des deux planetes qui décrit une ellipfe autour du foleil (a). Ces expériences font auffi intéreffantes qu'ingénieuses, elles jetoient un trait de lumiere fur la physique céleste. Mais on difoit à Hook, ce n'est pas encore là tout-à-fait la nature, vos boules tournent à-peu-près dans une ellipfe, mais autour du centre de la courbe, & la nature a placé le foleil au foyer de l'ellipfe où circulent les planetes, la terre au foyer de l'ellipfe que fuit la lune. Cette objection prouvoit que Kepler avoit enfin éclairé les efprits, & que fes idées avoient étendu leurs racines. Hook appercevoit bien que la gravité étant plus puissante, en raifon de la proximité, devoit croître & décroître, fuivant une certaine loi, il fentoit que la connoiffance de cette loi feroit utile, il propofoit de la chercher. On lui demandoit à lui-même de déterminer quelle loi d'attraction forceroit un corps de décrire une ellipse autour d'un autre corps placé à l'un des foyers. Ici le voile retomboit fur la nature, on manquoit d'un organe pour l'interroger. Hook avoit le génie des vues & des expériences, mais l'inftrument des progrès n'étoit pas dans fa main. Hook ne poffédoit pas affez la géométrie, & la géométrie même n'étoit pas affez avancée. Ce n'eft pas que tous les efprits ne fussent alors en mouvement; le génie des faiences infpiroit particuliérement l'Angleterre. C'eft le moment de fa gloire, & il faut

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le dire, de fa gloire la plus haute, la profondeur des recherches décele la profondeur des efprits! Les Anglois étoient fur la voie de la vérité, mais elle étoit encore éloignée, on avoit befoin de fecours pour l'atteindre. Qui perfectionnera la géométrie, il faut rendre l'inftrument plus aigu, plus pénétrant? Qui embraffera tous les faits ifolés de l'univers, pour les appeler & les placer dans leur ordre, pour arriver au fommet de la chaîne qui les unit? Qui aura la vue de l'aigle que fon vol éleve pour dominer les campagnes, & dont le regard perce les antres profonds? Ici la fupériorité de l'efprit doit être aidée par le travail; il ne s'agit point de faire avancer la science d'un pas, il faut qu'elle en fasse à la fois une infinité. Tous ces pas exigeroient un grand nombre d'hommes affociés pour un feul deffein, ayant le même zele & les mêmes vues, ce qui eft difficile; ou ce qui eft encore plus rare, un homme feul qui compensât le nombre par le génie, qui trouvât la durée de la vie, & les forces humaines fuffifantes pour tout exécuter à lui feul. Un tel homme n'a pu être qu'un bienfait unique de la nature; il a cependant été donné! On diroit que laffée de l'importunité des hommes pendant tant de fiecles, de tant de fecrets furpris depuis le renouvelement des sciences, la nature n'eût plus demandé qu'un interprète qui fût digne d'elle. Elle s'eft enfin déterminée à répondre, à fe dévoiler prefque entiere, mais elle a produit & appelé Newton!

HISTOIRE

DE

L'ASTRONOMIE MODERNE.

EN

LIVRE DOUZ IEM E.

De Newton.

S. PREMIER.

N parlant de Newton qui fut folitaire & modefte, qui ne chercha point à paroître, qui fit de grandes choses avec fimplicité, il faut être fimple comme lui, comme la nature qu'il a fuivie. Cette fimplicité qui le caractérise est la grandeur que fon écrivain doit emprunter de lui. Une nouvelle aftronomie va naître avec Newton, c'est l'astronomie physique, la science des caufes d'où réfultent les effets qui ont occupé les hommes pendant tant de fiecles. Ce n'eft pas que l'aftronomie n'ait toujours été phyfique; la physique eft la fcience de la nature, & tout ce qui exifte, tout ce qui compofe l'univers fenfible, est compris dans cette vafte dénomination. Mais les notions générales ne fe font établies que par degrés; on a commencé

par

par tout circonfcrire pour pouvoir tout embraffer en détail & des divifions. Les fciences furent d'abord toutes ifolées, elles fe rapprocherent peu à peu, à mesure qu'on approcha du centre unique où leurs rayons viennent aboutir. Ce qui nous entoure nous paroît plus intéressant par cette proximité, ce qui est près de nous nous femble plus grand; on avoit placé la terre au centre des mouvemens, on plaça dans fon fein le fiége de la nature. L'astronomie étoit l'étude des phénomènes éloignés; la phyfique étoit celle des effets qui s'operent autour de nous, dans notre atmosphère: la connoiffance des élémens, des météores, voilà ce qu'étoit alors la nature & la physique circonfcrite & bornée. Les loix du mouvement des corps céleftes, indiquées par Képler, font cependant des loix de la nature, comme celle de la chûte des graves, apperçue par Galilée, comme la pefanteur de l'air découverte par Torricelli. Képler, né avec un génie vaste, avec un esprit porté aux comparaisons & aux rapports, fut le premier qui eut l'idée d'un & qui ofa lier la nature terreftre à la nature céleste. Mais s'il a fu concevoir une union & une dépendance générale de tous les êtres, il ne connut point les loix de cette dépendance; les caufes imaginées par lui renferment plus d'erreurs que de vérités. Descartes reprit cette grande idée ; il conftruifit le monde avec des élémens femblables, un même fluide fait tomber les graves & circuler les planetes; la nature étoit une dans ses méditations, & il la développa toute entiere par un mécanisme unique & fimple. Mais ce mécanisme étoit une erreur; une science n'exifte que par des vérités. La jonction de la nature terreftre & de la nature lointaine ne pouvoit être effectuée qu'en rapprochant leurs phénomènes, & en démontrant qu'ils étoient identiques, opérés par les mêmes caufes & fuivant les mêmes loix. C'eft ce que nous devons à

tout,

de c

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Newton; venu plus tard & lorfque ces idées avoient acquis de la maturité, doué d'un efprit plus fage, & fur-tout d'un génie plus puiffant, s'il n'eut pas la premiere idée de l'astronomie physique, il en pofa les fondemens, & cette fcience nouvelle fortit de fes mains. L'histoire des opinions des hommes n'eft fouvent qu'une longue fuite d'erreurs, où la vérité peut paroître noyée; on doit être incertain de fon choix & embarraffè de sa foi. Le génie de Newton a débrouillé ce chaos, il a féparé la lumiere des tenebres : les vraies connoiffances de fon tems font concentrées, ce qu'on dût croire alors eft contenu dans fon ouvrage; & ce livre immortel renferme presque tout ce qui conftitue la foi aftronomique.

Newton naquit le 25 Décembre 1642 à Volftrope dans la province de Lincoln; il fortit d'une famille noble qui devoit tenir de lui fon illuftration. Nous ne parlerons point de fes études, il fembloit plutôt inventer qu'étudier : il parcourut les élémens d'Euclide, l'énoncé des théorêmes les lui faifoit découvrir; & il paffa à la géométrie de Descartes, où il trouva le langage d'un grand homme, & des idées proportionnées à fa force. Newton étoit cependant encore jeune, fi Newton l'a jamais été! On ne connoît de lui ni méprises, ni essais : aussi M. de Fontenelle lui applique-t-il une pensée des anciens sur le fleuve majestueux qui féconde l'Egypte, & dont la fource a été long-tems inconnue; il n'a pas été permis aux hommes de voir le Nil foible & naifant (a).

S. I I.

NEWTON connut fon génie en lifant Defcartes ; il entra auffi-tôt dans la carrière de la haute géométrie, il marcha de

(a) Fontenelle, Eloge de Newton

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