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circulaires & dans l'intervalle depuis les Hypparque & les Ptolémée jufqu'à Tycho, tout ce qui a été élevé sur cette base, a pu n'être qu'une réminiscence, un retour aux mêmes idées. La vraie forme des orbites planétaires, découverte par Képler, est le premier de nos titres. Depuis vingt-cinq fiecles les hommes cherchoient la fimplicité & marchoient vers elle. C'est pour elle que Copernic replaça le foleil au centre du monde; c'est pour elle que Képler va détruire tous les épicycles que Copernic avoit laiffés fubfifter: peu de principes, de grands moyens en petit nombre, des phénomènes infinis & variés, voilà le tableau de l'univers. Les anciens Grecs étoient imbus de cette philofophie. Ptolémée s'excufoit de la complication de fon fyftême, il fentoit que les mouvemens célestes doivent être fimples; il demandoit feulement fi l'homme, à qui tout est difficile, est le juge de la véritable fimplicité. Thalès, inftruit de la sagesse des anciens, au milieu de la foule des êtres foumis à la vue & à l'obfervation, n'admettoit qu'un principe; l'eau avoit tout fait, elle étoit la fource de toutes les choses existantes. Anaxagore, auffi éconôme que Thalès regardoit le feu comme l'agent unique & univerfel; l'activité de cet élément étoit le principe productif de l'univers. Démocrite, comme Descartes, ne demandoit que de la matiere & du mouvement pour conftruire le monde.

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- C'EST une grande & belle idée que celle de l'économie de la nature: mais cette économie eft fon fecret; elle n'étale au dehors que magnificence & variété. Les êtres de même espece font différens en inftinct en force, 'en durée,' aucun ne fe reffemble exactement par la forme, par la grandeur & pár la couleur ; les especes font à jamais marquées par des traits

ineffaçables :, la nature a fes trois regnes, féparés en apparence par des barrieres; elle a fes quatre élémens, qui semblent distincts & même ennemis. Couverte par tant de phénomènes,. fon unité eft profondément cachée, fa fimplicité eft un principe vaste & fublime! Si les anciens Grecs l'ont connu, c'est qu'ils l'ont trouvé établi; fi les Grecs, fi les modernes, après

jusqu'à l'époque où nous fommes, ont répété cette vérité, c'est qu'elle leur avoit été enseignée.

Il est clair qu'elle n'a pu se présenter d'elle-même. L'homme voit les chofes féparées, avant de les confidérer ensemble avant d'imaginer une chaîne pour les unir, des classes pour les diftinguer; il a la notion de l'individu, avant d'avoir celle de l'efpece. Or rien n'étoit moins fimple que les fyftêmes des anciens : chaque opération de la nature avoit un agent. On trouve autant de divinités que de paffions & de maladies: les arbres ne croîtroient point fans les Nimphes qui les animent ; les eaux ne coulcroient point, fi une déité ne fiégeoit à leur source; Eole a sous fes ordres des dieux fubalternes, pour souffler de toutes parts fur la terre; les Tritons excitent ou calment les tempêtes de la mer; Pluton fecoue les fondemens du monde ; Jupiter lance la foudre; & l'arc en ciel eft conduit par Iris, quand il brille fur les nuages. L'unité de Dieu & de la nature étoit donc partout méconnue! S'il eft évident que cette vaste théogonie n'eft qu'un travestissement de la phyfique des anciens, il faut avouer que la multiplicité des dieux prouve la multiplicité des causes. En écrivant cette histoire, nous appercevons d'un côté que les hommes, persuadés de la fimplicité du mécanisme de l'univers, tendent constamment à cette idée, même en s'en écartant: nous voyons de l'autre que cette idée est une des plus antiques qui nous ait été confervée. La conclufion naturelle eft que nous retournons au terme d'où nous fommes

partis telle est notre marche, nous parcourons toujours un cercle. Mais ce terme, ce premier commencement des travaux connus devoit être lui-même la fin d'une révolution. La fimplicité n'eft pas effentiellement un principe, un axiôme, c'est le résultat des travaux ; ce n'est pas une idée de l'enfance du monde, elle appartient à la maturité des hommes; c'est la plus grande des vérités que l'obfervation conftante arrache à l'illufion des effets : ce ne peut être qu'un reste de la science primitive. Lorfque chez un peuple, poffeffeur d'une mythologie compliquée, & qui n'a d'autre physique que ces fables, les philosophes, voulant réduire la nature à un seul principe, annonceront que l'eau eft la fource de toutes chofes, ou le feu l'agent univerfel, nous dirons à ces philosophes : vous parlez une langue qui n'est pas la vôtre; vous avez faifi par un instinct philofophique ces vérités au-deffus de votre fiecle, de votre nation, & de vous-mêmes; c'est la fageffe des anciens, qui vous a été transmise par tradition : & lorfqu'après deux mille ans écoulés, Képler viendra rendre à cette vérité fes droits & fa gloire, en l'appuyant de fes preuves, en l'éclairant du jour de la démonftration, nous admirerons la fagacité & les reffources d'un efprit vafte & profond; mais dans le principe qui l'a guidé, nous reconnoîtrons encore la même sagesse, le fruit des premiers travaux des hommes & le refte précieux de leur génie.

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LE privilége des grands hommes eft de changer les idées reçues, & d'annoncer des vérités, qui répandent leur influence fur le reste des fiecles. A ces deux titres Képler mérite d'être regardé comme l'un des plus grands hommes, qui ait paru fur la terre. Hypparque, Ptolémée, Albategnius, Copernic,

Tycho lui-même, ont pu n'avoir aucun avantage fur les premiers fondateurs de l'aftronomie, dont quelques travaux nous reftent dans les tables des Perfes, des Indiens, des Siamois, comme dans les belles périodes de l'aftronomie ancienne. Képler, par , par l'ascendant de fon génie, commence notre fupériorité; il a détruit l'édifice des anciens pour en fonder un plus stable & plus élevé. Il est le véritable fondateur de l'astronomie moderne, & c'est un préfent que la Germanie a fait à l'Europe.

Képler naquit à Wiel au pays de Wirtemberg, le 27 de Décembre 1571. Il alla en 1589 étudier la philofophie à Tubinge, où il trouva un aftronôme de quelque réputation, Michel Mæftlin, qui fut fon maître en mathématiques & en astronomie. Il y fit des progrès rapides, & dès l'année 1596, il publia un ouvrage confidérable fur la proportion & les rapports des orbes céleftes, que toute fa vie il a distingué par un amour particulier, comme l'aîné de ses enfans. Mostlin, recommandable par un disciple tel que Képler, l'est encore comme un des premiers partisans de Copernic; car dans les commencemens de ce systême philosophique, la vérité étoit neuve & fans appui, elle étoit délaiffée & solitaire; il falloit un bon esprit pour démêler fa grandeur dans cet abandon. Mostlin avoit fait un traité fur les dimenfions des orbites des planetes dans l'hypothèse de Copernic (a); ce fut fans doute la leçon de Képler; mais il n'hésita pas, & nous remarquerons à fon honneur qu'il fut copernicien, au moment où il vit le jour des fciences. Ses effais furent des differtations fur les deux mouvemens de la terrè (b).

(a) Ce petit ouvrage eft imprimé à la fuite du Myfterium cofmographicum de Képler, p. 149, édit. de 1621,

(b) Myft. cofmo. p. 7. Elles ont été depuis inférées pat l'auteur dans l'Epitome de l'aftronomie copernicienne, Lib. I & Lib. IV.

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S. I V.

AVANT de parler de l'ouvrage de Képler fur la proportion des orbes célestes, nous devons expliquer les trigones astrologiques qui en furent l'occasion.

Trigone eft un mot emprunté de la géométrie ; il signifie une figure de trois angles; trigone eft donc fynonyme de triangle. Lorfque trois aftres fe partagent le zodiaque, de maniere qu'ils font éloignés les uns des autres de 120°, ils. forment un trigone. C'est ce qu'on appelle auffi le trine aspect. On forma encore des trigonesen uniffant les fignes éloignés de 120°.

1o. Le Bélier, le Lion, le Sagittaire.

2o. Le Taureau, la Vierge, le Capricorne.
3o. Les Gémeaux, la Balance, le Verseau.
4°. L'écreviffe, le Scorpion, les Poiffons.

Ces trigones des fignes furent appelés les triplicités. Comme elles étoient égales en nombre aux élémens, comme jadis les nombres avoient beaucoup d'empire fur les idées, on donna à ces trigones les noms & les propriétés des quatre élémens. Le premier eft le trigone du feu, le fecond de la terre, le troisieme de l'air, le quatrieme de l'eau (a).

L'origine de ces trigones eft la remarque que l'homme a faite de quatre qualités principales dans les élémens, le chaud, le froid, le fec & l'humide. Ne pouvant comprendre d'où lui venoient ces températures, il les plaça dans le ciel, d'où elles pouvoient descendre fur lui, & il les distribua dans les fignes du zodiaque,

(4) Képler, de ftellâ novâ, 1606, page 13.

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