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des Seigneurs qui les ont inftitués, par devant leurs Juges. Or fi un Seigneur a droit de plaider dans fa jurifdiction par le miniftere & fous le nom de fon procureur-d'office; à plus forte raifon, l'Amiral qui par le titre éminent de fa charge a tout droit de haute juftice fur la mer, fes ports, havres & rivages, peut-il inftituer un procureur, avec faculté à ce procureur de former toutes les inftances convenables aux intérêts de M. l'Amiral, tant qu'il ne fera queftion de plaider que dans les jurifdictions de l'Amirauté.

Siéroit-il même à M. l'Amiral de plaider perfonellement dans ces Amirautés, où la justice ne peut être rendue qu'en fon nom; ou voudroit-on qu'il fût juge & partie en même temps ?

Par cette confidération donc, & plus encore à raifon de la dignité de fa charge, il convenoit abfolument que l'Amiral eût droit d'établir un Procureur & Receveur pour le recouvrement & la pourfuite de fes droits, auffi cette faculté dont on ne voit point la premiere conceffion à caufe de fon ancienneté, lui avoit-elle déjà été confirmée par l'Ordonnance de 1543. art. 3 renouvellée par celle de 1584, art. 7, & enfin par le préfent article.

Depuis ce temps-là, il y a une infinité d'exemples où les Receveurs de M. l'Amiral, tant par inftance directe & primitive, que par intervention, ont poursuivi ou reclamé fes droits en Juftice, fans que jamais l'on ait prétendu qu'il y eût irrégularité dans les procédures, fous prétexte qu'elles n'étoient pas faites fous le nom précisement de M. l'Amiral: D'où il s'enfuit qu'il y auroit de la temérité à foutenir aujourd'hui, qu'il n'a pas droit de plaider par procureur, c'est-à-dire, par le miniftere de fes procureurs, & Receveurs, tant dans les Amirautés générales ou particuliers, qu'aux Tables de Marbre. Cela n'empêche par néanmoins que le Procureur du Roi de l'Amirauté ne prenne fouvent des conclufions pour le payement des droits de M. l'Amiral, fans attendre les pourfuites du Receveur, fur tout lorfqu'il y a contravention aux réglemens, & qu'outre les droits de M. l'Amiral, il échoit de prononcer quelque amende ou la confifcation contre les contrevenans.

Dans chaque Siége d'Amirauté, aux Colonies Françoifes comme dans le Royaume, il y a un Receveur de M. l'Amiral, art. 1, tit. 2, du réglement du 12 Janvier 1717; & ce Receveur a des Commis dans tous les Ports obliques qui lui comptent de leurs recettes particulieres qu'il employe dans fon compte général.

Le Receveur établi à la Rochelle, fait auffi la recette dans l'Amirauté des Sables d'Olonne, de même que dans celle de Marennes, quoique ce foit une Amirauté générale.

Pour les fonctions & les obligations du Receveur, voir le titre 6, ci-après. Il y a un dernier réglement général de M. le Comte de Touloufe, en date du 13 Juin 1709, pour la régie & perception uniforme des droits de M. l'Amiral dans toutes les Amirautés du Royaume, de même que pour la forme dans laquelle les comptes des Receveurs doivent être rendus.

Par respect pour M. l'Amiral, il n'eft pas permis aux Officiers de l'Amirauté de prononcer une condamnation par corps contre fon Receveur. Arrêt du Confeil d'Etat du 3 Février 1661 qui le leur défend à peine de 1500 livres d'amende, d'interdiction & de répondre des droits dont ils auront ainfi ordon né la reftitution.

ARTICLE XIII.

AISONS défenfes à tous Gouverneurs de nos Provinces, Lieu

FA

tenans Généraux, Gouverneurs particuliers des Places & autres Officiers de guerre, de donner aucuns Congés, Paffe-ports & Saufconduits pour aller en mer; & à tous Gentils-hommes & Seigneurs de fe dire & qualifier Amiraux dans leurs terres, d'exiger fous ce prétexte aucun droit, & de rien entreprendre fur la charge d'Amiral.

L

A Marine anciennement étoit trop peu refpectable en France, pour que les Amiraux jouiffent tranquillement de la plénitude des droits attachés à cette charge dès l'instant de fon établissement & par la nature même de fon inftitution.

La Normandie & toute l'Aquitaine foumifes aux Anglois, la Bretagne aux Ducs de cette Province, & les côtes de la Méditerranée aux Comtes de Toulouse & de Provence; l'Amirauté de France fut long-temps bornée aux côtes de Picardie, de Boulogne & d'une petite partie de la Flandre.

Dans cet état l'Amiral de France n'étoit pas affez puiffant pour empêcher ou réprimer les entreprifes des Seigneurs voifins de la Mer, encore moins des Gouverneurs & Commandans des Places maritimes: il fallut qu'il eût recours à l'autorité Royale & qu'il y revint plus d'une fois.

Le premier exemple que nous en ayons eft dans la Tranfaction du 30 Août 1377, dont il a déjà été parlé ci-deffus, & que l'on trouve dans le recueil de Fontanon tom. 3, au commencement du titre de l'Amiral; par laquelle Tranfaction ayant force de loi, comme ayant été faite fous les yeux du Roi, & ayant été homologuée au Parlement, le Comte & la Comteffe d'Eu furent obligés de fe défifter des droits d'Amirauté qu'ils avoient tentés d'ufurper fur les côtes de leurs Terres d'Eu & de St. Valery.

Le fecond monument, eft l'Arrêt du 16 Juillet 1399, cité par le Commentateur fur cet article, rendu contre le Seigneur de la Trimouille, qui fe prétendoit Amiral dans fes terres voifines de la Mer.

Depuis ce temps-là font intervenues les Ordonnances de 1480; de 1517, art. 20; de 1543, art. 48; de 1584, art. 31; de 1629, art. 450 & 451; toutes conformes au préfent article, ou plutôt fur lefquelles cet article a été dreffé. Il a encore pour fondement, les Arrêts du Confeil des 13 Décembre 1629, 7 May 1644, 5 May & 6 Juin 1647, 14 Octobre 1650, 4 Mars 1654, & 6 Septembre 1661, qui prononçoient même une amende de 3000 liv.contre les réfractaires, & l'Ordonnance du 28 Mars 1653, rendue contre le Sr. de Launay, Gouverneur de l'Ile de Ré. Cet article enfin a été renouvellé & confirmé par l'article 2, tit. 4, du Réglement du 12 Janvier 1717, concernant les Amirautés des Colonies Françoifes.

Il y a de pareilles défenfes pour les naufrages, dans l'art. 30 titre 9, liv. 4, ci-après.

ARTICLE

XIV.

D

ECLARONS au fur-plus que Nous nous fommes refervé le choix & la provifion des Vice-Amiraux, Lieutenans-Généraux, & Chefs d'Escadre; des Capitaines, Lieutenans, Enfeignes & Pilotes de nos Vaiffeaux, Frégates & Brûlots, des Capitaines & Officiers des Ports & Garde-Cotes, des Intendans, Commiffaires, Contrôleurs-généraux & particuliers, Garde-Magafins, & généralement de tous autres Officiers de guerre & de Finance, ayant emploi & fonction dans la Marine; ensemble tout ce qui peut concerner les Conftructions & Radoubs de nos Vaiffeaux, l'achat de toute forte de marchandises & munitions pour les Magafins & Armemens de Mer, & l'arrêté des états de toutes les dépenfes faites par les Tréforiers de la Marine.

L

E Roi s'étoit déjà refervé ces mêmes droits par l'art. 10 du réglement du 12 Novembre 1669, attaché fous le Contre-Scel de l'Édit du même mois portant rétabliffement de la charge d'Amiral.

On comprend par l'étendue du pouvoir attaché à cette Charge avant que ces droits en fuffent défunis, de quelle importance elle étoit ; c'eft auffi ce qui la fit fupprimer par Edit du mois de Janvier 1627,fur la démiffion que Henri de Montmorency en avoit donnée au mois d'Octobre 1626.Ainfi le Roi en la rétabliffant ne pouvoit pas manquer d'en diftraire ces droits pour fe les referver. Cela n'empêche pas néanmoins que cette charge ne foit encore une des plus belles & des plus importantes charges de la Couronne & de l'Etat.

La plus confidérable de toutes les commiffions que M. l'Amiral ait conservé le droit de conférer, eft celle de Secrétaire général de la Marine.

Les fonctions de ce Secrétaire, font d'affifter aux confeils tenus pour les affaires de la Marine; d'opiner lors des jugemens qui y font rendus fur les prifes, &c. au nom de M. l'Amiral; de contre-figner tous les Congés & Paffeports, avec les commiffions en guerre qui doivent être délivrées aux Capitaines; & généralement tous les ordres adreffés aux Officiers de l'Amirauté & autres perfonnes, de la part de M. l'Amiral. Tous les détails enfin de la charge d'Amiral lui font confiés ; c'est à lui qu'il faut s'adreffer pour cela, & ce ne font que les affaires extraordinaires & importantes qu'il faut porter directe

ment à M. l'Amiral.

Il n'a befoin, pour exercer les fonctions de cette place, que de la commiffion de M. l'Amiral qui tient lieu de provifions, étant notifiée aux Officiers de chaque Amirauté; & l'enregistrement en doit être fait au Greffe, fans autre formalité. Quoique ce ne foit qu'une commiffion, cette place y eft qualifiée Charge, pour la diftinguer des autres commiffions.

Le Sr. Louis Matharel fut nommé à cette charge par M. le Duc de Vendof me, le 31 Octobre 1658; avant lui elle avoit été exercée fucceffivement par

les Srs. de Loynes, Laboulaye & Chapelain, & autres avant eux encore.

Après le Sr. Matharel, le Sr. le Fouin en fut pourvu en 1673; & après le decès de celui-ci, le Roi Louis XIV y nomma M. Jean-Baptifte-Henri du Trouffet, Ecuyer Sr. de Valincour, le 21 Octobre 1688, en attendant la majorité de M. le Comte de Touloufe. M. le Comte de Toulouse étant devenu majeur, lui en accorda des provifions le 2 Janvier 1695.

A M. de Valincour a fuccédé le 25 Janvier 1730, M. Michel-René l'Enfant, fur la démiffion duquel, pour fes infirmités, M. François de Romieu de la Grange, a été nommé à cette place le 2 May 1738. il la remplie durant près de 20 ans d'une maniere diftinguée qui a juftifié parfaitement, le choix du grand Prince qui l'y avoit appellé. Son âge & plus encore, la foibleffe de fa vue ne lui ayant pas permis de continuer d'avantage l'exercice d'une charge auffi pénible, fur-tout pendant la guerre; S A. S. a bien voulu agréer fa démiffion en lui donnant des marques fenfibles de la fatisfaction qu'elle avoit de fes fervices. Il a été heureusement remplacé par M. Germain-Pierre BlancheBarbe, Sr. de Grand Bourg, Conseiller du Roi en fes Confeils, maître ordinaire en fa Chambre des Comptes, Grand-Maître enquêteur & Général Réformateur honoraire des Eaux & Forêts de France. Ses provisions font du 3 Octobre 1757. 3

Anciennement le Secrétaire-général de la Marine avoit voix délibérative lors du jugement des prifes. Cette prérogative avoit été fufpendue à l'occafion de l'établissement, en 1672, d'une Commiffion pour le jugement des prifes, fous prétexte qu'il avoit été réglé que le Secrétaire-général de la Marine figneroit les jugemens. Et quoique cette Commiffion eût été fupprimée en 1695, pour rendre à M. le Comte de Toulouse devenu majeur, le droit de juger les prifes, comme l'avoient exercé les Amiraux fes prédéceffeurs, le Secrétaire-général de la Marine ne recouvra pas en même-temps la voix délibérative qu'avoient auffi eue fes prédéceffeurs. Ce ne fut que par Arrêt du Confeil du 13 Août 1707 qu'elle lui fut rendue, & depuis ce temps-là, fes fucceffeurs en ont conftamment confervé le droit. V. l'art. 21 du titre des prifes qui eft le tit. 9 du liv. 3.

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A

TITRE SECON D.

DE LA COMPETENCE DES JUGES

103

DE L'AMIRAUTE

UTREFOIS il n'y avoit pour Juges d'Amirauté que les Lieutenans de M. l'Amiral, & autres Officiers par lui nommés & inftitués.

Cet ordre fubfifta jusqu'à l'Édit du mois d'Avril 1554, par lequel Henri II, fans préjudicier au droit de nomination de l'Amiral, érigea en titre d'Office les Charges de judicature de l'Amirauté, depuis lequel temps les Officiers de cette jurifdiction ont été & font encore, tout à la fois Officiers Royaux & Officiers de M. l'Amiral.

Mais dans le temps de cette création, il y avoit alors peu de Sieges d'Amirauté. Ils ont été depuis affez multipliés en différens temps, notamment en 1691, & le nombre des Officiers a été auffi augmenté par l'Édit du mois de May 1711. Enfin par le Réglement du 12 Janvier 1717, il en a été établi dans toutes les Colonies Françoises. Pour tout ceci, voy. les art. 1 & 2 du titre précédent.

ARTICLE PREMIER.

L

Es Juges de l'Amirauté connoîtront privativement à tous autres, & entre toutes perfonnes de quelque qualité qu'elles foient, même privilégiées, François & Etrangers, tant en demandant que défendant, de tout ce qui concerne la conftruction, les agrès & apparaux, avitaillement & équipement, vente & adjudication des vaisseaux.

È s qu'il y a eu un Amiral en France, il y a eu des

pour connoître privativement à tous autres Juges, des caufes maritimes, tant au criminel qu'au civil, & entre quelques perfonnes que ce fût.

C'est ce que prouvent toutes les anciennes Ordonnances, à la tête desquelles on peut mettre la Tranfaction du 30 Août 1377, dont il a déjà été parlé plufieurs fois fur le titre précédent.

S'il y a eu quelque variation ou explication dans la fuite, ce n'a pas été fur le fond de la jurifdiction; mais feulement pour déclarer quelles caufes étoient ou n'étoient pas de la compétence de l'Amirauté.

Tome I.

O

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