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Ces rançons étoient donc fujettes au dixieme de l'Amiral comme les prifes, parce qu'en effet les rançons tiennent lieu de la valeur des vaiffeaux pris & les repréfentent.

Il y a auffi la rançon des prifonniers de guerre pour le rachat de leur liberté, & le dixieme en étoit dû tout de même à l'Amiral. Art. 18 de l'Ordonnance de 1400; art. 3 de celle de 1517; art. 5 de celle de 1543, & art. 56 de celle de 1584. Pour la maniere d'exercer le dixieme de la part de M. l'Amiral, voir l'art. 32 du titre des prifes.

Commiffions. Si une prife étoit faite fans commiffion en guerre, quoique fous pavillon François & avec congé pour naviger, au lieu du dixieme, la prise appartiendroit pour le tout à l'Amiral, fans que le preneur y eût aucune part, les preuves de cette décifion feront rapportées fur l'art. 1 du tit. des prises.

Il eft fingulier qu'à l'occafion du dixieme de l'Amiral fur les prifes, le Commentateur ait rappellé, d'après l'auteur de la jurifdiction de la marine page 535 ou 449, l'exemple d'Abraham qui offrit à Melchifedech le dixieme du butin qu'il avoit fait fur fes ennemis; des Romains qui en faifoient offrande à leurs faux Dieux, & des anciens Gaulois qui l'offroient au Dieu Mars; car enfin quel rapport tout cela a-t-il avec le dixieme dû à l'Amiral?

Voici une anecdote qui mérite de trouver place ici. Jacques fecond Roi d'Angleterre détrôné par le Prince d'Orange fon gendre, ayant trouvé un afyle en France, donna à quelques-uns de fes fujets, des commiffions en guerre qui firent des prifes. Il s'éleva à cette occafion une difficulté par rapport au dixieme de ces prifes; M. l'Amiral prétendant qu'il lui étoit dû comme ayant feul droit de délivrer dans le Royaume des commiffions en guerre. Sur les représentations qu'il fit au Roi à ce fujet, Sa Majesté ne voulut point déeider alors; mais on en parla au Roi d'Angleterre, qui ceffa dès-lors de donner ces commiffions. Cependant la difficulté fubfiftoit toujours pour le dixieme des prifes faites. L'affaire portée au Confeil, on se trouva embarraffé, & l'on prit le parti par Arrêt du Confeil du 6 Mai 1694 d'ordonner que le dixieme feroit mis en féqueftre; mais le Roi d'Angleterre infiftant toujours fur ce que le dixieme lui appartenoit, attendu que les prifes avoient été faites en vertu de fes commiffions; Sa Majefté par Arrêt définitif du 22 Novembre audit an 1694, adjugea au Roi d'Angleterre le dixieme de la prife qui étoit en conteftation. Sur quoi M. l'Amiral pour prévenir une pareille décifion fur les autres prifes, fit demander à l'Agent du Roi d'Angleterre un mémoire de ces aures prifes, & confentit que le dixieme lui en fût remis fans nouvelle décision.

LUI

ARTICLE X.

UI appartiendront auffi toutes les amendes adjugées aux Sieges particuliers, & la moitié de celles qui feront prononcées aux Tables de Marbre.

'Attribution des amendes à l'Amiral, eft d'auffi ancienne date que celle du dixieme des prifes ; & dès le commencement, la diftinction que fait cet article, entre les amendes adjugées dans les fieges particuliers, & celles

prononcées aux Tables de Marbre, a été admife fans qu'elle ait fouffert depuis aucune variation. Ancien mémoire des droits de l'Amiral inféré dans Fontanon, fol. 1616, art. 7, Ordonnance de 1400, art. 15, de 1517, art. 12, de 1543, art. 4, & de 1584, art. 12; difpofitions confirmées par l'art. 4 du Réglement du 12 Novembre 1669 & par le préfent article.

Čependant notre Ordonnance reconnoît des Sieges généraux d'Amirauté qui ne font pas Table de Marbre; (car il n'y en a que deux de cette efpece, favoir celui de Paris & celui de Rouen; celui qui avoit été établi à Bordeaux par Edit du mois d'Avril 1691, ayant été fupprimé par un autre Edit du mois de Janvier 1692, & celui qui avoit été établi tout de même à Rennes ayant été auffi fupprimé par l'Édit du mois de Mai 1711) & ces Amirautés générales font diftinguées des particulieres pour la réception des Officiers par l'article 2, titre 3 ci-après. Notre article néanmoins ne dit rien des amendes qui y feront prononcées, fur quoi on peut demander, fi elles doivent appartenir pour le tout à M. l'Amiral, ou pour moitié feulement, à l'exemple de celles qui font adjugées aux Tables de Marbre; mais il faut répondre fans hésiter, qu'il en eft à cet égard, comme des Amirautés particulieres, n'y ayant d'exception abfolument que pour les Tables de Marbre. Ce qui eft conforme au refte aux anciennes Ordonnances qui viennent d'être citées principalement à celles de 1543 & de 1584, qui adjugent à l'Amiral les amendes en plein prononcées dans les Sieges de premiere inftance, en un mot autres que les Tables de Marbre.

Au furplus, à cela près uniquement que les Officiers des Amirautés générales, doivent être reçus au Parlement, ce qui eft indispensable, puifque les appellations de leurs jugemens font portées directement au Parlement; ces Amirautés ne different en rien des Amirautés particulieres, & n'ont aucun avantage fur elles. Auffi aux termes de l'article du titre 13, leurs jugemens ne font-ils exécutoires que pour la même fomme, & de la même maniere que le font ceux des Amirautés particulieres, avec lefquelles elles font confondues dans ledit article comme dans celui-ci. Ainfi nulle distinction à faire tout de même pour les amendes qui y font prononcées.

Il y a plus, & il eft vrai de dire même, à la vue de l'Edit de 1711, qu'il n'y a plus d'Amirautés générales que les deux Sieges de Table de Marbre, & que toutes les autres Amirautés ne font que des Sieges particuliers, avec cette feule différence, que de ces Amirautés les unes relevent nuement au Parlement, & les autres aux Tables de Marbre de leur reffort Si l'on peut y ajouter quelqu'autre prérogative, c'eft que le premier Officier des unes a droit de fe dire Lieutenant-Général, & que celui des autres ne prend que la qualité de Lieutenant fimplement, ou de Lieutenant particulier; mais la diftinction eft vaine & frivole dès qu'il n'y en a aucune dans le pouvoir & l'autorité, excepté l'adreffe des lettres de rémiffion infrà art. 12 du titre fuivant.

Une obfervation importante à faire, eft que cet article ne fait point mention des confifcations, tandis que l'article 4 du Réglement de 1669 les fait marcher d'un pas égal avec les amendes; ce qui fait naître deux queftions, la premiere fi l'omiffion faite dans cet article a pu donner atteinte au droit de confifcation acquis à l'Amiral, tant par ledit article 4 du Réglement, que par l'article 30 de l'Ordonnance du mois de Mars 1584. La feconde, fi en interpré

tation dudit article 4, la confifcation ne doit appartenir pour le tout à l'Amiral que lorfqu'elle eft prononcée dans une Amirauté particuliere, ou à Boccafion d'un délit commis dans une Amirauté particuliere.

La premiere queftion eft facile à décider. 1°. Une fimple omiffion dans une loi poftérieure, n'eft pas capable d'enlever à quelqu'un un droit qui lui eft formellement acquis par une loi antérieure; il faudroit pour cela une dérogation à ce droit, fi non expreffe, du moins générale. Or on ne voit point qu'il foit déclaré dans tout ce titre de l'Ordonnance, que l'Amiral ne jouira pas d'autres droits que ceux qui y font exprimés.

2o. Si cet article ne parle pas de confifcation, l'omiffion eft réparée par l'article 1 du tit. 10 ci-après, qui ordonne précisément la confifcation de tout vaiffeau qui fortira d'un port du Royaume fans congé de l'Amiral. Or cette confifcation ne pouvant être qu'au profit de l'Amiral à raison du mépris de l'autorité attribuée à fa charge; il eft évident que cette Ordonnance loin d'avoir dérogé tacitement au droit de confifcation acquis à l'Amiral par l'article 30 de l'Ordonnance de 1584 & par l'article 4 dudit Réglement de 1669, l'a confirmé au contraire, fi non de la maniere la plus formelle au moins équi valemment, à joindre que la confifcation eft une fuite & une dépendance du droit de jurifdiction.

A l'égard de la feconde question, l'article 4 du Réglement de 1669, ne décide pas affez clairement qu'il en fera des confifcations comme des amendes, pour qu'on en doive conclure, que les confifcations prononcées aux Tables de Marbre n'appartiendront que pour moitié à l'Amiral, au préjudice de l'art. 30 de l'Ordonnance de 1584 & de l'art. 1 du titre 10 ci-après, qui en ne parlant d'aucun partage du profit de la confifcation, l'attribuent évidemment en entier à l'Amiral.

Au furplus ce qui leve tout doute fur ces deux queftions, ce font les décifions intervenues depuis notre Ordonnance.

La premiere eft un Arrêt du Confeil du 13 Décembre 1687, portant que conformément à ce Réglement de 1669, l'Amiral jouira des confifcations adjugées pour caufe dont la connoiffance appartient aux Juges de l'Amirauté, & qui en conféquence adjugea à M. l'Amiral les onze cens fequins confifqués, avec les amendes en entier qui avoient été prononcées. La feconde eft un autre Arrêt du Confeil du 29 Juillet 1702, confirmé par Lettres patentes du 7 Septembre audit an 1702; lequel Arrêt a ordonné pareillement qu'à l'avenir dans toutes les affaires de la compétence des Juges de l'Amirauté, en quelque Jurifdiction que le renvoi en foit fait pour être jugées, les amendes & confifcations feront prononcées au profit de l'Amiral comme lui appartenant à caufe de fa charge Ces deux Arrêts infirmatifs des jugemens rendus au préjudice du droit de M. l'Amiral, par M. le Bret Intendant de Provence, en vertu d'Arrêts d'attribution. Dans l'efpece du dernier, il étoit quef tion de deux cens cinquante écus tranfportés en fraude par un marchand de Marseille à Smirne.

La troifieme eft encore un Arrêt du Confeil du 20 Mars 1703, d'autant plus remarquable qu'il a été rendu contradictoirement entre les Officiers de l'Amirauté de Calais & les Juges des Traites de la même Ville. Il s'agiffoit d'un boucaud de mufcade déchargé d'un navire & entré en fraude, qui avoit été

faifi par les uns & les autres ; & il fut ordonné que la Sentence de l'Amirauté qui confifquoit ce boucaud au profit de M. l'Amiral, feroit exécutée felon fa

forme & teneur.

La quatrieme & derniere eft auffi un autre Arrêt du Confeil du 23 Janvier 1706, qui a adjugé à M. l'Amiral la confifcation d'une prife faite fans commiffion en guerre de fa part, fans avoir égard à la réclamation qui en étoit faite au profit de Sa Majefté par le Procureur du Roi.

Il s'agiffoit du vaiffeau le Succès de Lima richement chargé. La confifcation en avoit été ordonnée en faveur de M. l'Amiral au Confeil des prifes; le Procureur du Roi en avoit fait appel prétendant que c'étoit au Roi que la confifcation appartenoit.

Une circonftance extrêmement intéreffante à ce fujet, c'eft que l'Arrêt alloit paffer contre M. l'Amiral; mais le Roi étant informé, qu'à une voix près les avis étoient partagés, jugea en faveur de M. l'Amiral. Ce n'eft pas la premiere fois que ce grand Prince a décidé contre fes propres intérêts; dès qu'il voyoit que fon droit fouffroit de la difficulté & qu'il éprouvoit de la contradiction, il donnoit auffi-tôt gain de caufe à fa partie.

De tout ceci il s'enfuit, non-feulement que la confifcation ordonnée par l'art. 1 du tit. 10 ci-après, ne peut regarder que M. l'Amiral; non-feulement auffi que la confifcation d'une prife faite fans commiffion en guerre de l'Amiral lui appartient tout de même plutôt qu'au Roi; mais encore que toute confifcation prononcée dans une caufe de la compétence de l'Amirauté, est également au profit de l'Amiral & fans partage avec le Roi, qu'elle ait été ordonnée dans une Amirauté générale ou particuliere, ou par une commission avec Arrêt d'attribution, même fans y appeller les Officiers d'Amirauté; parce qu'il fuffit que l'affaire ou le délit, foit réellement de la compétence de l'Amirauté. De maniere qu'en cette partie il n'eft point queftion de fe régler fur la loi portée au fujet des amendes pour attribuer la moitié de la confifcation au Roi fous prétexte que l'affaire feroit de la compétence de la Table de Marbre, cette diftinction n'ayant lieu que pour les amendes.

Il est pourtant vrai que les Lettres patentes du 7 Septembre 1702, n'ont été enregistrées au Parlement le 16 Mars 1703, qu'avec cette reftriction, à la charge que la moitié des amendes & confifcations prononcées dans les Sieges des Tables de Marbre appartiendra au Roi. Mais, par rapport aux confifcations, la réserve est à bien dire fuperflue, puifqu'il ne peut naturellement y avoir lieu à la confifcation, que pour un délit commis dans une Amirauté particuliere, autre en un mot qu'une Table de Marbre, dont par conféquent la Table de Marbre ne fauroit connoître en premiere inftance, ni par appel, la matiere devant être pourfuivie à l'extraordinaire.

Et cela s'entend, foit que la confifcation ait pour caufe une contravention aux Ordonnances & Réglemens concernans l'Amirauté & la navigation, foit qu'elle intervienne pour raifon de marchandifes de contrebande introduites par mer dans quelque port du Royaume, ou de marchandifes prohibées embarquées fans permiffion du Roi, ou enfin d'un commerce fait dans un pays où il n'eft pas permis d'aller.

Tout cela fe faifant par mer, ce font autant de délits de la compétence des Juges de l'Amirauté, comme il fera prouvé fur le titre fuivant art. 10; ce qui

fuffit pour fonder le droit de M. l'Amiral, quelque commiffion que le Roi établiffe pour faire le procès aux prévaricateurs. Ces Commiffions au refte n ont plus lieu qu'à la charge de juger avec les Officiers de l'Amirauté, ce qui confirme en même temps leur droit de jurifdiction.

Cependant par un arrangement poftérieur à toutes ces décifions, les amendes & confifcations en cas de faifie de marchandifes prohibées, n'appartiennent plus à M. l'Amiral, le Roi s'en eft réservé le produit, & l'a appliqué à fon profit ou à l'adjudicataire de fes fermes par l'art. 2 de l'Arrêt du Confeil du 25 Mai 1728; mais c'eft à la charge par cet adjudicataire des fermes, de payer à M. l'Amiral pour indemnité & par forme d'abonnement, la fomme de 20000 livres tous les ans, le premier Janvier de chaque année, conformément à la difpofition de l'art. 9, qui ajoute, & fans qu'à cette occafion le fermier puiffe prétendre aucun droit fur les confifcations qui feront prononcées par les Officiers d'Amirauté, dans toutes affaires, de quelque nature que ce puiffe être, qui ne regarderont pas directement les marchandises de contrebande ou prohibées, & la confervation des droits des Fermes. De forte que dans les affaires de la compétence de l'Amirauté, toutes les amendes & confifcations autres que celles concernant la contrebande, appartiennent comme auparavant à M. l'Amiral, & qu'à l'égard de celles-ci, il en reçoit l'équivalent au moyen de la compofition fuivant laquelle l'adjudicataire des fermes lui paye annuellement la fomme de 20000 liv.

Il y a encore pourtant une forte de confifcation qui a été jugée dévolue au Roi feul à l'exclufion de M. l'Amiral; c'est celle des effets échoués ou naufragés appartenans aux ennemis de l'État. V. infrà l'art. 26 du titre des naufrages in fine.

Le payement des amendes fe fait directement entre les mains du Receveur de M. l'Amiral, les jurifdictions de l'Amirauté étant exceptées de la création des Offices de Receveurs & Contrôleurs des amendes, auffi-bien que des épices, avec décharge des droits y attribués. Arrêt du Confeil d'Etat du 8 Février 1710, confirmé par autre du 6 Novembre 1714. V. fuprà art. 2,

ARREST DU CONSEIL D'ÉTAT

DU

RO Y.

Portant que conformément au Réglement du 12 Novembre 1669, Monfieur le Comte de Toulouse, Amiral de France, jouira des amendes & confifcations, & de tous autres droits de Juftice dans tous les Sieges particuliers d'Amirauté, & de la moitié de ceux des Tables de Marbre, & qu'en conféquence onze cens Sequins confifquez & les amendes prononcées contre le Dou & Reyne feront payées audit Sieur Amiral, comme auffi les confifcations & amendes adjugées depuis le jour de fes provifions.

Du treizieme Décembre 1687. EXTRAIT DES REGISTRES DU CONSEIL D'E’TAT.

UR la Requête préfentée au Roi étant en fon Confeil, par Louis Alexandre de Bourbon, Comte de Toulouse, Amiral de France;

contenant que les nommez le Dou & Reyne s'étans expofez à faire un commerce de Sequins d'un faux Coin & faux Alloy, le Conful de la Na

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