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rez dans les Mémoires de Trevoux du mois de Mars 1742. M. Richer traduit ECRITS

ainfi ces deux vers

Oui l'on verra plutôt....

Du Tigre le Germain boire l'onde bruyante
Et le Parthe les eaux de la Saone dormante,
Que mon cœur, &c.

M. Mallemans, le P. Fabre, l'Abbé de la Landelle, ont donné le même fens à ces deux vers. Tous font entendre que Virgile infinuoit un changement mutuel de climat entre le Parthe & le Germain. L'Auteur de l'explication nouvelle prétend que ces Interprétes fe font trompés, faute d'avoir fait attention, 1°. A la conjonction disjonctive aut répétée: 2°. Au fens que l'expreffion pererratis amborum finibus présente à l'efprit. Pour lui, voici comment il traduit & explique ces deux vers.

Oui le Parthe exilé parcourra & traverfera, non-feulement les vaftes contrées qu'il habite., mais encore toute la Germanie ; & viendra enfin s'établir fur les bords de la Saone, c'eft-à-dire, dans les Gaules: ou bien le Germain pareillement exilé fe verra contraint d'errer dans toute la Germanie, de fe tranfporter jufqu'au pays des Parthes, de la par

POUR ET

CONTRE

VIRGILE

courir entiérement, & de venir fonder ECRITS un nouvel empire dans cette partie du POUR ET monde que le Tigre arrofe, c'est-àdire, dans l'Affyrie, ou dans la Méfo- . potamie, avant que, &c.

CONTRE

VIRGILE.

L'anonyme donne de cette explication des preuves qui paroiffent fondées: vous pouvez les voir dans fon Ecrit: le Journal qui les contient eft entre les mains de tout le monde.

En finiffant ce qui regarde Virgile, il faut au moins vous dire un mot d'une accufation ridicule formée contre ce Poëte, & qui eft déja ancienne. On a accufé ce grand homme d'avoir été un grand magicien. Les Journalistes de Treyoux qui ont rappellé cette extravagante accufation, en la condamnant, Mem. de conjecturent que Thevet, qui vivoit fous Henri III. eft le premier qui ait avancé une opinion fi abfurde. Ces Sçavans fe font trompés. Cette opinion est beaucoup plus ancienne, comme Naudé l'a démontré dans le chapitre vingtuniéme de fon Apologie pour tous les grands perfonnages qui ont été fauffement Joupçonnés de magie. Ce chapitre eft tout

Trev. Juin 1740. pag. 1043.

entier fur cette matiére.

Vous y verrez entre autres, que l'Anglois Gervais de Tillebery qui vivoit

que

ECRITS

POUR ET CONTRE

au commencement du treiziéme fiécle, a enfeigné l'opinion abfurde dont il s'agit dans fes Otia Imperialia, ouvrage définir un tiffu d'imperti- VIRGILE. l'on peut nences. Quoique cet Auteur fût indigne de croyance, l'imputation faite à Virgile ne laiffa pas de s'accréditer dans ces tems ténébreux ; & beaucoup d'au tres Ecrivains ont répété depuis la même abfurdité. Vous pouvez voir ce détail dans le chapitre de Naudé que je viens de citer, & dans le Journal Helvetique du mois de Mars 1741. où l'on abrege ce que Naudé a rapporté.

L'Auteur de ce Journal ajoûte aux preuves de ce Critique, que l'on voit dans la Bibliotheque de Genêve un manufcrit intitulé: La fleur des Hiftoires, & qui eft au plûtard du commencement du quinziéme fiécle, dans lequel on trouve auffi un long chapitre fur les prétendus prodiges magiques de Virgi le. Vous ne ferez pas mal de lire l'article de ce Journal, où il y a des traits curieux fur le fujet en question. L'Auteur y examine, après Naudé, ce qui avoit pu avoir donné lieu à faire regarder Virgile comme un magicien, & il croit que cette opinion que l'on a eue de ce Poëte, pourroit être venue de la

ECRITS

POUR ET

CONTRE

lecture de fa huitiéme Eglogue qui a pour titre l'Enchantement, parce que le Poëte y décrit plufieurs opérations VIRGILE. magiques, & que ce n'est d'un bout à l'autre que charmes & enchantemens. Des ignorans, dit le Journaliste, auront pû imaginer qu'il falloit avoir pratiqué foi-même cet art, pour en faire des defcriptions fi détaillées ; ils étoient difpenfés de favoir que cette Eglogue eft prefque toute tirée d'ailleurs, & que peu s'en faut que ce ne foit une fimple traduction de Théocrite : & ils n'avoient pas affez de jufteffe d'efprit pour fe convaincre que ce n'eft pas être magicien que de décrire des enchantemens. Seneque, fans être magicien, n'a-t'il pas rapporté ceux de Medée, Horace ceux de Canidie, & Homere, avant eux, ceux de Circé?

Chap. VII. 37. 13.

Malgré tout ce que Naudé dit fur ce fujet, le fieur Gaffarel dans fes curiofités inoüies prend le parti de Gervais de Tillebery contre Naudé même, mais par des raifons qui ne feront aucune impreffion fur un efprit fenfé. C'est ce que remarque Bayle dans fon Dictionnaire, où il y a un article curieux de Virgile que vous ne devez pas négliger.

M

Aucun des Auteurs que je viens de

POUR ET

CONTRE

citer n'a fait mention d'un vieux Roman intitulé, Les faits & dits de Virgi- ECRITS le, où ce Poëte eft encore accufé de nécromancie. On ne perd rien au refteà VIRGILE. ignorer un pareil écrit plein de fadaifes & d'impertinences: toute l'idée qui m'en eft restée, car ce livre ne m'eft point préfent, c'eft que Virgile eft le héros de ce Roman. On l'y donne pour. fils d'un Empereur Romain ou d'un grand Seigneur, qu'un ufurpateur avoit chaffé & mis à mort. La veuve, ajoûtele Romancier, réduite à un état fort miférable, avoit envoyé fon fils étudier dans une Univerfité d'Espagne; & dans la fuite, jugeant que ce fils étoit capable d'exécuter les deffeins qu'elle ar voit conçus pour recouvrer fes Etats, elle le fit revenir.

Je me fouviens que l'Auteur du Roman infifte fur ce que Virgile avoit fait des études profondes, furtout dans la Nécromancie: qu'il s'étoit introduit à la Cour de l'Empereur de Rome où il avoit fait mille prodiges, tous ridicules, & qui femblent néanmoins racontés férieufement; & qu'enfin il avoit trouvé le moyen de fe rétablir dans les Etats dont il étoit héritier. Je ne me rappelle plus le tems où ce Roman a

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