Imágenes de páginas
PDF
EPUB

POLITIQUES

D E

BALTASAR GRACIAN

SUR LES PLUS GRANDS PRINCES,

ET PARTICULIÈREMENT

SUR FERDINAND LE CATHOLIQUE.

Ouvrage traduit de l'Espagnol, avec des Notes hiftoriques & critiques.

[merged small][merged small][ocr errors][subsumed][merged small]

I. f.

PREFACE.

E Traducteur de L'HOMME DE COUR, & celui de L'HOMME UNIVERSEL & du HE'R o s, se font apliqués à faire connoître la perfonne, les ouvrages & le caractére de BALTASAR GRACIAN: c'eft un Auteur dificile à entendre, plus encore à traduire, qui fe fert fouvent de la métaphore & de l'hyperbole, homme d'imagination & de fens.

Qu'il me foit permis de rapeller les paroles du Traducteur de L'HOMME DE COUR fur l'Ouvrage dont on donne icy la Traduction. C'eft, dit-il, un éloge exceffif de Ferdinand, & au fentiment de quelques Savans, le meilleur ouvrage de Gracian. Dans un autre endroit il l'apelle Une Critique Royale & un chef-d'œuvre de Politique.

1

On a coutume de louer l'Auteur que l'on traduit: l'amour propre nous fait fouhaiter que les autres ne foient pas moins touchés que nous des ouvrages pour lesquels on déclare son goût d'une maniére si positive, quand on fait tant que de les traduire. Ce n'eft point l'atrait de la nouveauté qui me féduit, mais celui de la verité qui ne veut point être trahie : cet Ouvrage de Gracian péche par l'ordre & par la méthode ; il abonde de traits brillans, mais la transition des uns aux autres eft forcée, les métaphores font outrées, les éloges qu'il fait le font encore plus, les termes font peu éxacts; l'Ouvrage, en un mot, eft dans le goût qui regnoit de fon tems en Efpagne, & ce caractére eft affez celui de fes autres Ouvrages. Mais, dirat-on, quel motif peut donc engager à le traduire ? Ces défauts n'excluent point certaines pensées remplies de fel, des fentimens qui touchent le cœur & qui élevent l'efprit, des maximes qui inftruifent: le compofé est bizarre, mais il plaît. Je me fervirois volontiers de la comparaison de l'architecture Gothique avec l'architecture des Grecs & des Romains, pour comparer le goût qui regnoit du tems de Gracian avec le goût épuré de ce fiécle : l'architecture Gothique eft chargée d'ornemens; il y a des parties détachées, qui font délicates, achevées; on y reconnoît de la hardieffe & de la légéreté, & le tout quoique barbare fur

prend, fe fait admirer. L'Architecture Romaine në manque point d'ornemens, mais les ornemens en font le moindre mérite; de la proportion de toutes les parties, de leur fymétrie, de leur ordre, il résulte une noblesse qui dans sa fimplicité laisse tout à admirer, rien à critiquer : l'éxamen des par ties ne distrait jamais de celui du tout, & aucune même ne peut être confidérée que comme relative au tout dont elle eft la partie. Le caractére de l'architecture Gothique nous donne celui des Ouvrages de Gracian: le caractére de l'architecture Romaine, nous aprend quel doit être celui d'un Ouvrage parfait.

L'Ouvrage Espagnol a pour titre : EL POLITICO DON FERNANDO EL CATOLI co, Al excelentiffimo Segnor Duque de Nochera. Je me fuis trouvé dans la même néceffité où ont êté les Traducteurs des autres Ouvrages de Gracian, de changer le titre. J'en ai substitué un autre plus propre à faire concevoir une jufte idée de ce que cet Ouvrage renferme.

.

Gracian a dédié fon Livre au Duc de Nochéra. C'êtoit François-Marie, Duc de Nochéra, Comte de Soriano, Marquis de Saint Ange, & Grand d'Espagne, qui mourut disgracié en 1642, après avoir êté Viceroy d'Aragon & de Navarre. Il def cendoit d'une branche de la famille des Caraffes, Maison illuftre du Royaume de Naples, où eft

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »