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quérans des inveftitures que ceux-ci faifoient valoir, s'ils pouvoient, à peu près comme on expédie dans nos Chancelleries toute forte de Lettres que l'enthérinement feul rend utiles aux Impétrans. Quelquefois même les Empereurs, lorfque leurs intérêts politiques l'exigeoient, l'exigeoient, combat

toient les droits réfultans de leurs inveftitures. L'Empereur Maximilien fournit des exemples de tous ces procédés. Il avoit donné à Ludovic Sforce une inveftiture du Duché de Milan qui s'étendoit à fes héritiers légitimes. Plufieurs années après, mais pendant la vie de ce même Ludovic & de fes deux fils, il donna une autre inveftiture du même Duché à Louis XII, non- feulement pour lui & fes héritiers mâles, mais, encore pour Madame Claude sa fille aînée, & pour les enfans qui naîtroient d'elle; dependant il traverfa conftamment les expéditions que Louis XII & François I firent dans le Milanès en vertu de cette inveftiture. Il fit lui-même, comme on le verra dans la fuite, une irruption dans ce Du

ché; il méconnut alors les droits de tous ceux qu'il avoit inveftis, & fomma les habitans de ne se soumettre qu'à, lui. Quelle étoit donc aux yeux de cet Empereur la valeur des inveftitures ainfi proftituées, combattues & décréditées par lui-même? on le voit bien. C'étoit un objet de trafic, & rien de plus.

Brantôme, ignorant agréable, bon conteur d'anecdotes fouvent fufpectes, mais mauvais écrivain de droit Public, prétend détruire d'un feul trait & les droits des Viscontis, & ceux des Sforces & ceux des d'Orléans, en difant que c'étoient autant de tyrans qui avoient ufurpé le Milanès fur l'Empire. C'eft comme fi on difoit que la Gaule n'appartient point aux defcendans des Francs parce que les Francs en ont chaffé les Romains. De plus, la raifon dont fe fert Brantôme, prouveroit que tous ces Prétendans avoient des droits légitimes, puifque tous avoient obtenu l'inveftiture de l'Empereur.

A travers la foule des droits politiques, droits réels ou chimériques

au gré de la force & des conjonctures, il y en a deux qu'on diftingue toujour à un caractere plus puiffant & plus univerfel que tous les autres; ce font les droits du fang & ceux des traités ; c'eft qu'ils appartiennent au droit naturel. La Maison d'Orléans les réunissoit; auffi François I à fon avenement au Trône, ne balançat-il point à prendre avec le titre de Roi de France celui de Duc de Milan.

GÊNES.

François I avoit auffi fur l'Etat de Gênes des droits qu'il ne prétendoit point négliger. Les Génois étoient depuis long-tems le peuple de l'Europe le plus malheureux par fon inconftance & par fes divifions; les Nobles étoient tyrans, les Bourgeois féditieux; les principales familles fe difputoient le Gouvernement, & déUbert. Fo- chiroient à l'envi le fein de la République fous prétexte d'affurer fa liberté d'un côté les Spinola & les Doria; de l'autre, les Fiefque & les Grimaldi, toujours rivaux, toujours

lietta hiftor.

Genuenf,

:

armés, étoient tour à tour perfécutés, opprimés, chaffés les uns par les autres; le parti vaincu appelloit des vengeurs & des tyrans étrangers; l'autorité toujours ufurpée paffoit au plus puiffant, au plus heureux : toutes les factions politiques & religieufes fe nourriffoient de ces haines inteftines; toutes les formes de Gouvernement étoient effayées : on en compte près de douze différentes,fucceffivement établies dans un efpace d'environ trente ans. Quelquefois le peuple reprenoit par des coups violens une partie de fa liberté pour reperdre avec plus d'horreur; il Ubert. Focontenoit un moment les Nobles, il fe faifoit gouverner par des Magiftrats Plébéiens, que bien-tôt leur foibleffe ou leurs diffentions replongeoient dans l'efclavage des Nobles. Les Boccanegres, les Adornes, & les Frégoles, ne furent pas plus unis entre eux que les Spinola & les Doria ne l'avoient été avec les Fiefque & les Grimaldi. Une alternative funefte d'Ariftocratie & de Démocratie, une impuiffance malheureufe de

la

liette hiftor. Genuens,

fouffrir & le joug & la liberté, accumuloient fur les Génois tous les maux de la tyrannie & de l'anarchie; enfin après avoir pris pour Maîtres tous leurs principaux Citoyens, & plu fieurs Souverains de l'Europe, ils s'étoient donnés à Charles VI. Le premier traité des Génois avec la France eft de 1392; il n'étoit que l'ouvrage des Nobles qui cherchoient de l'appui contre le Peuple, & le Peuple s'en vengea par des ravages; mais en 1396, tous les Ordres de l'Etat réunis conférerent à Charles VI & à fes Succeffeurs, l'autorité fouveraine & lui prêterent ferment de fidélité. Antoine Adorne, alors Duc ou Doge populaire de Gênes, en fut fait Gouverneur pour le Roi. On y envoya quelque tems après le Maréchal de Boucicaut. Celui-ci en arrivant à Gênes, y trouva partout des traces effrayantes de l'Anar hie qui l'avoit défolée. Tout y préfentoit l'image de la deftruction; des Nobles humiliés & bannis, une populace infolente, livrée aux plus grands excès ; des voleurs & des

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