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Quand Louis XII entreprit la conquête du Milanès, il crut devoir se fortifier de l'alliance des Vénitiens; ceux-ci ne la lui accorderent qu'au prix d'un nouveau démembrement, il fallut que le Roi leur affurât le (1) Cremonez & tout le Pays fitué für la rive gauche de l'Adda. Lorfque ce même Roi ayant conquis le Milanès, voulut exercer fes droits fur le Royaume de Naples, les Vénitiens, fidéles à leurs maximes, traverferent cette expédition, fournirent fecrettement des fecours aux Arragonnois, & fans paroître prendre part à cette querelle, ils la déciderent réellement en faveur de Ferdinand le Catholique; quelques autres outrages qu'ils ajouterent à celui-là, irriterent Louis XII au point de lui faire oublier ses vériL'Abbé Du tables intérêts, & de le précipiter Bos. Hift de dans cette fatale ligue de Cambray, Cambray. qui fembloit devoir entrainer la rui

la Ligue de

ne de Venife, & qui, par les intrigues de Jules II, penfa entrainer celle de la France. Le Pape, l'Em

(1) Par le Traité de Blois en 1499.

pereur, les Rois de France & d'Arragon, & quelques petits Souverains de l'Italie, malgré l'incompatibilité des caractères, malgré l'oppofition des intérêts, s'étoient donc unis en 1508 pour arracher la balance des mains de cette fiére République, & pour lui redemander ce qu'elle avoit pris à chacun d'eux. Toute la fageffe des Vénitiens ne put prévenir cet orage, mais il ne leur fut pas difficile de le diffiper; les nœuds fragiles de cette union paffagere fe rompirent prefque d'eux-mêmes; Louis XII & fes Confédérés redevinrent ennemis; ce Roi trop fincere & trop généreux s'étant facrifié pour la caufe commune, n'en recueillit que des perfidies & des humiliations; il comprit enfin que les Vénitiens étoient les feuls alliés fûrs qu'il pût avoir en Italie, parce qu'ils étoient les feuls qui n'euffent d'intérêts trop directement contraires aux fiens. En effet, les Vénitiens habitant le fommet de l'Italie, & la bordant le long de la mer Adriatique, le trouble ou la paix des Etats intérieurs ne les in

pas

téreffoit qu'autant que l'équilibre pouvoit être détruit ; il leur importoit peu que ce fût Louis XII ou Sforce qui eût le Milanès, pourvu que le Duc de Milan, quel qu'il fût, ne poffédât point d'autre Etat en Italie. D'ailleurs les François & les Vénitiens avoient un ennemi commun, également irréconciliable pour tous deux, c'étoit l'Empereur. Les Vénitiens n'avoient prefque des Etats de terre-ferme qu'à fes dépens; car cet Empereur (Maximilien I,) étoit en même-tems le Chef de la Maison d'Autriche. A ces deux titres il difputoit aux Vénitiens d'un côté l'’Iftrie & le Frioul; de l'autre, le Padouan, le Trevifan, le Vicentin & le Veronez. Louis XII & les Vénitiens, qui n'auroient jamais dû se séparer, fe réunirent donc en 1513. Un nouveau traité (1) confirma celui de 1499, excepté que le Crémonez & la Ghiara d'Adda, cedés aux Vénitiens par le premier traité, furent

(1) signé à Blois le 13 Mars, & ratifié à Venife le 11 Avril,

réunis au Milanès; les Vénitiens & les François promirent de s'entraider à recouvrer tous les Domaines qu'ils avoient perdus: les François avoient été chaffés du Milanés ; les Vénitiens avoient été dépouillés de prefque toutes leurs poffeffions de terre-ferme par les armes des François même ; c'étoit Louis XII qui, pour exécuter le Traité de Cambrai, s'en étoit emparé & les avoit fidélement remises entre les mains de l'Empereur, d'où les Vénitiens n'avoient pu encore les tirer; on jura de ne pofer les armes que quand le Milanès auroit été rendu à la France, & les Etats de terreferine aux Vénitiens.

Cette guerre pendant le refte de la vie de Louis XII ne fut heureuse ni pour les François ni pour les Vénitiens, mais leur union ne fut point affoiblie par les difgraces; François I en arrivant au Trône, la trouva dans toute fa force, & n'eut qu'à l'entretenir.

SAVOY E.

Il femble que l'intérêt des Ducs de

Savoye étoit de traverser les vûes de la France fur le Milanès. Envain la Nature avoit-elle confié à ces Ducs la garde des barrieres qui féparent la France de l'Italie, files François établis dans le Milanès, preffant à la fois la Savoye & le Piémont du côté de la France & du côté de l'Italie, pouvoient, en cas de réfiftance, forcer ces barrieres jufqu'alors infurmontables. D'ailleurs, les François, maîtres du Milanès, ne feroient-ils pas tentés de remplir l'espace qui féparoit de cet Etat les Provinces Françoifes, & de s'emparer de la garde fi précieufe des Alpes? Enfin, fi les Ducs de Savoye eux-mêmes vouloient s'aggrandir du côté du Milanès, n'auroient-ils pas meilleur marché d'un Souverain foible & ifolé tel que Sforce, que d'une Puiffance formidable telle que les François? Malgré ces confidérations, qui fembloient devoir armer les Ducs de Savoye contre les François, on ne voit point que fous Charles VIII ni fous Louis XII le paffage par le Piémont ait jamais été refufé aux troupes Françoifes; & à l'avé

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