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frente millle ducats par mois, que les Confédérés leur payeroient, de- 1515. voient entrer en Bourgogne où en Dauphiné; le Roi d'Espagne devoit

Franc. Guic

auffi entrer en Guyenne ou en Lan- ciard, 1. 12. guedoc.

Le Pape vouloit être neutre, ou du moins le paroître ; il alléguoit fon titre de Pere commun des Fidéles, mais le titre qu'il confultoit véritablement, étoit celui de Chef de la Maifon de Médicis. Tout occupé de l'aggrandiffement de cette Maifon, il vouloit d'un côté faire Laurent, fon neveu, Souverain de Florence; de l'autre, il vouloit former en faveur de Julien, fon frere, un Etat compofé des Villes de Parme & de Plaifance, que Jules II, fon Prédéceffeur, avoit prifes au Duc de Milan; & de Modene & Regge, que le même Jules II avoit prifes au Duc de Ferrare; il cherchoit d'abord pour fon frere un mariage qui lui procurât de l'appui, & qui facilitât l'exécution de ce projet; le Roi d'Efpagne lui offroit Ifabelle de Cardonne, fa parente; le Pape préféra Marguerite de

Savoye, tante de François I. Cette

1515. alliance sembloit devoir jetter les Médicis dans le parti de la France. Le Roi n'oublia rien pour leur perfuader que c'étoit leur intérêt; cependant le Pape irréfolu flottoit toujours entre la France & la Ligue, négocioit avec les deux partis, n'en embraffoit aucun. Tantôt Albert Pio, Prince de Carpi, Ambaffadeur de l'Empereur, & Jerôme de Vic, Ambaffadeur d'Efpagne, qui l'obsédoient sans ceffe, croyoient toucher au moment de l'entraîner; tantôt ils le voyoient échapper à tous les efforts de leur politique, & fe jetter entre les bras de l'Ambaffadeur de France. Cet Ambaffadeur étoit Guillaume Budé, un de ces hommes rares, dont les Lettres ont fait la fortune; le choix d'un Sçavant pour une négociation fi délicate, atteftoit l'amour des Lettres, & dans le Souverain qui l'envoyoit, & dans le Souverain auquel il étoit envoyé ; on s'étoit flatté que fes profondes connoiffances dans la Littérature grecque & latine, lui procureroient, avec la familiarité du Pape

les moyens de pénétrer fes fecrets fentimens, & de lui en infpirer de 1515. favorables à la France. Budé avoit avec lui Antoine-Marie Palavicini, Seigneur Milanois, qu'on fçavoit être agréable au Pape, mais c'étoit sur Budé qu'on avoit compté le plus. Il n'étoit pas fans talens pour la négociation; fon efprit étendu trouvoit aifément des reffources, levoit aifément des difficultés, mais il portoit dans la Cour la plus déliée de l'Europe, cette fimplicité vertueufe que donnent le filence du cabinet & le commerce des Morts. Rome alors toute fçavante & toute polie, lui prodigua les égards & les honneurs, dont on eft aujourd'hui par-tout fi avare envers les Gens de Lettres, devenus trop communs. Il crut d'abord qu'il alloit tout obtenir; mais Angler. Ep. le Pape,qui fe détermina enfin à entrer dans la ligue, à condition que cette démarche feroit fecrette, le conduifit par tant de détours, de variations, de propofitions captieufes, de réponses équivoques, qu'enfin Budé s'appercevant qu'on le joüoit, follicita fon

545.

Petr. de

Liv. 12.

rappel : » Tirez-moi,écrivoit-il, d'une 11515. » Cour pleine de mensonge, féjour » trop étranger pour moi. « On lui Guicciard, répondit de ne point perdre patience, & de négocier toujours, quelque dût être le fuccès, car la France qui oppofoit alors fineffe à fineffe, avoit intérêt qu'on la crût trompée, & que les yeux du Pape détournés fur une fauffe négociation qui l'amufoit, parce qu'il s'en étoit rendu le maître, n'apperçuffent pas un piège qu'on tendoit alors à la Ligue & aux Médicis.

Paul. Iov.

Octavien Frégofe étoit Doge de hiftoriar. fui Gênes ; il devoit cette dignité au crétemporis,liv. dit des Médicis, & particuliérement à celui de Léon X: il étoit ami intime de Julien, frere du Pape. Les Médicis ne doutoient point qu'il ne les fuivît dans le parti de la ligue; mais la reconnoiffance dont Frégofe s'étoit long-tems piqué pour les bienfaiteurs, devenoit trop dangereufe. La France avoit foulevé contre lui les Adornes & les Fiefques, qui attentoient tantôt fecretement, tantôt ouvertement à fa vie. Ces entreprises fe renouvelloient tous les jours, elles

Etoient même secondées par Maximilien Sforce, ennemi perfonnel de 1515 Frégofe, & qui avoit des prétentions fur Gênes, comme Duc de Milan. Les François voyant Frégofe allarmé, lui propoférent leur alliance, comme le feul moyen d'échapper aux périls qui le ménaçoient ; il les crut, & commença à traiter avec le Connétable par un Emiffaire fecret, tandis

que

d'un autre côté il juroit au Pape un zéle inviolable pour les intérêts de la Ligue, en faveur de laquelle il fçavoit que le Pape s'étoit fecretement déclaré. Sforce, que la haine éclairoit, avertit le Pape qu'il y avoit un Gentilhomme du Connétable de Bourbon, caché dans le Palais de Frégofe, pour conférer avec lui; le Pape qui regardoit Sforce comme un vifionnaire, lui répondit qu'il écoutoit trop fa haine pour Fregofe, & que le S. Siege répondoit de fa fidélité. Dans le même tems on apprit que Frégofe avoit remis la Cité de Génes entre les mains du Roi de France, changé le titre de Doge en celui de Gouverneur perpétuel pour le Roi,

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