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mourir. Ses lettres le peignirent à la 1518. Cour comme un chef de factieux, comme un fujet mal foumis, dont la fiére indépendance choquoit trop ouvertement l'autorité du Roi.On lui fit un crime d'avoir accepté pour lui & pour toute fa famille un droit de Bourgeoifie parmi les Suiffes. On affecta de regarder cette efpece d'affociation avec une République étrangere, comme incompatible avec les fermens & les devoirs d'un fujet. Il vouloit, difoit-on, fe fortifier contre fon Prince de l'appui de cette Nation. Une telle démarche cachoit des projets ambitieux. On s'en prit auffi à lui de ce que fon frere & fes neveux s'éGuicciard. toient engagés au fervice des Vénitiens. Tous ces chefs d'accufation, apparemment groffis par la Comteffe de Château - Briant, infpirerent au Roi de fortes préventions contre Trivulce.

Liv. 13.

Trivulce étoit prompt, fier & senfible, il apprend qu'on le noircit dans l'efprit de fon Maître, il part en pofte, il traverse à quatre-vingt ans au milieu de l'hiver les glaces & les

neiges des Alpes. Pendant fon abfence, Lautrec fait arrêter à Vige- 1518. vano la veuve & les enfans du Comte de Mufocco fon fils ; cependant Trivulce arrive à la Cour pour fe juftifier, ne croyant pas qu'un regard de la Comteffe de Château-Briant pût effacer quarante années de fervice. On refufe de le voir & de l'entendre. Ce malheureux & refpectable vieillard, outré de défefpoir, fe fait porter en chaife dans un endroit où le Roi devoit paffer. Dès qu'il l'apperçut, il s'écria: Sire, daignez accorder un moment d'audience à un homme qui s'eft trouvé en dix-huit batailles rangées pour le fervice de vos Prédéceffeurs & pour le vôtre. Le Roi furpris jette un coup d'œil, reconnoît Trivulce, détourne la tête & paffe fans répondre. Ce trait de mépris perce le cœur de Trivulce; la fiévre le faifit, le dépit & la douleur le confument, il rentre chez lui & fe met au lit pour n'en plus relever.

Le Roi n'étoit pas fait pour la cruauté, il ne tarda pas à fentir qu'un accueil fi dur n'avoit pas dû

1518.

16.n. S:

être le prix de tant de fervices; il envoya vifiter Trivulce, & lui fit faire quelques excufes: Je fuis bien fenfible aux bontés du Roi, répondit Trivulce, mais je l'ai trop été à fes rigueurs. Il n'y a plus de remede. Il mourut, laiffant à François I le re

Belcar. liv. gret éternel d'avoir caufé la mort d'un de fes meilleurs fujets. Il fut enterré au Bourg de Châtres fous Montlehery, où il avoit trouvé la Cour & où il étoit mort, on grava fur fa tombe une épitaphe qui exprimoit fon caractère actif:

Hic quiefcit qui nunquam quievit.

Cette avanture mit dans le cœur des Milanois des difpofitions fâcheufes à l'égard du Gouverneur, à l'égard du Roi même & de la Nation Françoife; fur-tout lorsqu'on vit la mort du malheureux Trivulce procurer le bâton de Maréchal à Thomas de Foix, dit Lefcun, (1) frere du

(1) Le Maréchal de Châtillon avoit été nommé extraordinairement les Décembre 1516, à condition que cet Office créé pour lui, feroit éteint dès qu'il en vaqueroit un autre'; cependant la mort de

Maréchal de Lautrec; mais ces difpofitions n'éclaterent que long-tems 1518. après, & le Roi affuré à la fois du Pape,de l'Empereur & du Roi d'Epagne par des traités, & plus encore par l'impuiffance où ils étoient de lui nuire, demeura pour lors poffeffeur paifible de la Lombardie.

CHAPITRE V.

Traité avec l' Angleterre. Projet avorté
d'une Croifade contre les Turcs.
Projet chimérique de l'Empereur.
Guerre du Dannemarck.

IL reftoit pourtant encore à François

I un ennemi couvert & dangereux, celui qui par fon argent & fes intrigues avoit le plus contribué à mettre

Trivulce ayant donné au Maréchal de Châtillon la place qu'il attendoit, de Foix eut celle du Maréchal de Châtillon le 6 Décembre 1518, ce qui n'empêcha pas qu'à la mort du Maréchal de Châtillon Montmorenci n'eût fon bâton. Ainfi il y eut cinq Maréchaux de France, dont deux étoient deux freres (les deux de Foix): faveur distinguée, dont on a indiqué la fource,

les armes à la main à l'Empereur, 1518. c'étoit le Roi d'Angleterre, mais cet ennemi étant seul, ne demandoit qu'à traiter, & on traita plus utilement avec lui qu'on n'avoit fait avec le Pape.

Les François voyoient avec chagrin depuis 1513.la ville de Tournay entre les mains des Anglois. Les Anglois de leur côté étoient affez emGuicciard. barraffés de cette Place. Sa fituation

Nv. 13.

au milieu d'un pays étranger & ennemi, loin des Places qu'ils poffédoient fur la côte maritime de Picardie, les obligeoit à entretenir une garnifon confidérable, & les avoit engagés dans de grandes dépenfes pour la conftruction d'une citadelle. Mem. de Ils paroiffoient donc affez difpofés à Du Bellay, rendre cette ville, moyennant de l'argent. Tout dépendoit de gagner le Cardinal Volfey, on le gagna. Le jeune Amiral de Bonnivet, frere de Boify, qui partageoit alors avec les de Foix la faveur de fon Maître, partit pour Londres en qualité d'Ambassadeur extraordinaire.

liv. 1.

De tous les jeunes Seigneurs qui

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