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faits le Duc de Valois pour fecourir Tournay, auroient pu l'engager malgré lui dans une bataille, & on lui avoit ordonné de l'éviter. Par toutes ces raifons, le Duc de Valois prit le parti de refter dans fon pofte; d'où, en fauvant la Picardie, il rempliffoit pleinement le feul objet dont il étoit chargé. Tournay fut pris & foumis par une citadelle.

que

Fleurang.

Mém. de Du Bellay a liv. I.

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Cependant le Duc de Longueville, Mém. de prifonnier à Londres, voulut rendre fa captivité plus utile à fon Roi ne l'avoient été fes armes. Il lut dans le cœur des Anglois leur mécontentement secret, leur fourde indignation contre l'Empereur qui les avoit fi mal fervis, & contre le Roi d'Efpagne qui les avoit plufieurs fois trompés; car il falloit qu'il trompât, la fraude étoit fon élément; mais les Anglois fe laffoient d'être dupes, ils ne vouloient plus être feuls chargés d'une guerre plus. coûteufe qu'utile. Leur Roi qui avoit pris les armes par caprice ne demandoit qu'à les quitter par un caprice nouveau. La volupté Lui offroit des plaifirs plus féduifans

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que la gloire, fes Maîtreffes l'enchainoient dans fon Ifle. Le Duc de Longueville profita de ces difpofitions; il parla de paix, on l'écouta favorablement; Henri VIII avoit une fœur dont la beauté faifoit l'ornement de la Cour d'Angleterre & l'embarras du Roi fon frere. Il la voyoit ardemment recherchée par tous les Seigneurs Anglois dignes d'afpirer à fa main, mais il ne vouloit point la marier dans le Royaume,de peur d'exciter un jour des guer res civiles, fuite alors trop ordinaire des mariages des Princeffes du Sang royal en Angleterre. La place étoit prise en Ecoffe par une fœur aînée. Ce n'étoit point alors l'ufage de marier les filles de Rois hors de l'Ifle, & fur ce fondement Marie avoit été refufée à plufieurs Princes étrangers; mais l'ufage à cet égard pouvoit être réformé. Henri VIII, qui aimoit les chofes extraordinaires, fut flatté de l'honneur de placer pour la premiere fois (1) une Princesse Angloise sur

(1) Marie d'Angleterre eft le feul exemple d'une Princeffe Angloife devenue Reine de France fous la

le Trône de France. On propofa donc de cimenter l'union des deux Peuples par le mariage de cette Princeffe avec Louis XII. Ce projet pouvoit encore fouffrir quelque difficulté. Louis XII avoit réfolu de pleurer toujours Anne de Bretagne & de ne la remplacer jamais il avoit 52 ans, fon tempérament étoit affoibli, & les infirmités, fruit des erreurs de fa jeuneffe, l'accabloient avant le tems. Ses Médecins, foit à l'inftigation de la Comteffe d'Angoulême,

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troifiéme Race. Bathilde, qui fous la premiere, avcit époufé Clovis II & en avoit en trois fils, étoit Angloife, c'est tout ce qu'on en fçait. On avoit vu fur la fin de la feconde, Ogine, fille d'Edouard I, regner avec Charles le Simple. C'eft cette Ogine, qui, pendant la détention de fon mari au Château de Peronne, fe retira en Angleterre auprès d'Aldestan fon frere & y emmena fon fils Louis, qui en eut le furnom de d'Outremer, lorsqu'il revint regner fur les François. Marie eut avec Ogine une conformité finguliere. Toutes deux avoient été d'abord mariées par raifon d'Etat ; toutes deux devenues maîtreffes de leur fort, fe remarierent par inclination. Ogine époufa Herbert Comte de Troyes; Marie épouta le Duc de Suffolk. Au refte, comme nos Rois ne defcendent ni de Bathilde nid'Ogine, & comme Marie n'eut point d'enfans de Louis XII, on peut dire que la Maison de France n'a pas une goutte de fang Anglois direetement reçue.

foit par le devoir de leur charge, s'étoient déclarés contre un nouveau mariage; mais il étoit bien difficile de refuser une paix nécessaire lorfqu'il n'en coûtoit que d'époufer une femme aimable. Louis même redevint fenfible à l'espoir de donner un Abr. Chro- héritier au Trône; le Duc de Vamolog.

lois qui, comme dit Mezeray, avoit déja le pied fur les marches du Trône, vit fes espérances s'affoiblir, & la Comteffe d'Angoulême put alors regretter Anne de Bretagne : le Roi fe refroidit infenfiblement pour fon gendre, il fe repentit de l'avoir mis en poffeffion du Duché de Bretagne, le premier Préfident Duprat, auteur de ce confeil, fut difgracié. François l'en dédommagea bien dans la fuite.

Marie d'Angleterre partit pour la France, & fon amant fut chargé de la mener à fon mari. Cet amant étoit Charles Brandon Duc de Suffolk, heureux favori de Henri VIII & de Marie. Il étoit fils de la nourrice du Roi d'Angleterre ; ce premier Mém. de titre avoit commencé fa fortune; fa figure

Fleurang.

figure & fon adresse dans toute forte d'exercices avoient fait le refte. Les femmes l'avoient protégé, fon Maître l'avoit goûté; les faveurs de la Cour répandues fur lui, avoient fait oublier l'obfcurité de fon origine. Henri VIII lui avoit donné le titre de Duc (1) de Suffolk, en haine du véritable Duc de Suffolk, alors réfugié en France, & dont on aura occafion de parler dans la fuite. Brandon avoit ofé porter fes vœux jufqu'à la Princeffe, & fa témérité n'avoit point été malheureuse; le Roi en avoit ri, fa foeur l'avoit foufferte; on avoit même trouvé bon qu'il accompagnât la nouvelle Reine en France. Sa conduite y fut fi difcrette, que Louis XII ne foupçonna rien, mais des yeux plus perçans découvrirent le myftere.

La Reine arrive en France, elle y eft reçue comme un ange de paix, comme une confolatrice néceffaire d'un Roi dont la douleur affligeoit

(1) Les Ducs, les Comtes, &c. en Angleterre ne font que titulaire;, & ne poffedent rien en vertu de ces titres.

Tome I.

C

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