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Mezerai,

pu obtenir des graces qu'ils croyoient dues à leurs fervices, s'en vengerent d'une maniere infolente; ils enhardigrande hift. rent les Comédiens qui pouffoient alors jufqu'à un excès fcandaleux la licence des emblénes, à repréfenter dans je ne fçais quelle groffiere farce, le Roi avec un visage pâle & des yeux avides, fixés fur un vafe rempli d'or. Le Roi fe reconnut & fe contenta de dire : J'aime mieux voir les Courtisans rire de mon avarice, que de voir mon peuple pleurer de mes dépenses.

Guicciard,

liv. 12.

Ce reproche injufte d'avarice n'a été que trop répété, foit par la calomnie, foit par l'erreur fon écho. » Car telle eft, dit fenfément Guichardin, »la corruption des hommes, » que la prodigalité dans les Rois, quoiqu'inféparable de la vexation, » eft plus admirée qu'une fage ceco» nomie qui craint de fouler les » peuples.

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Louis voyoit avec inquiétude dans le Duc de Valois le germe de cette prodigalité, mere de la vexation. Ah! -difoit-il quelquefois en foupirant, nous travaillons en vain, ce gros garçon gâtera tout.

Louis XII, dit-on, n'étoit pas habile; fes alliés, fes ennemis le tromperent toujours impunément; il s'enchaînoit par des traités que lui feul exécutoit; il fe ruinoit par des guerres dont le profit n'étoit jamais pour lui. Il eft vrai que Louis XII eut trop d'honneur pour le fiécle où il

vivoit. Louis XI avoit introduit dans

l'Europe une politique pleine d'artifice, c'étoit la fraude érigée en fyltême : Maximilien, autrefois fon ennemi, fe piquoit de l'imiter, Ferdinand de le furpaffer. Louis XII ne crut point devoir féparer la politique de la plus exacte probité. Peuton lui faire un crime d'avoir eu plus de juftice que. Maximilien, plus de bonne foi que Ferdinand?

gue de Cambray.

Mém. de

Du Bellay,

liv. J.

Il faut avouer pourtant que ce Roi Dubos, Lifi prompt à oublier fes injures perfonnelles, fentit quelquefois trop vivement celles de l'Etat ; il fe laiffa égarer par un reffentiment aveugle contre les Suiffes & fur-tout contre Les Vénitiens, fes alliés néceflaires, qui avoient eû à l'égard de la France des torts que la politique devoit dif fimuler.

Mezerai

Arnold.

Ferron.

L'efprit de Louis XII n'étoit pas

grande hift., indigne de fon cœur; on en peut juger par le recueil que nous avons de fes Lettres. Ferron rapporte plufieurs de fes bons mots, car il avoit le talent d'en dire, & peut-être le foible d'aimer à en dire. Plufieurs de ces mots font aujourd'hui oubliés ou méprifés, & ne font plus guéres que dans la bouche du peuple, parce que la langue a changé, & que les idées ont vieilli. Quelques-uns pourtant confervent encore tout leur fel, & ont à la fois de l'image & de la penfée.

C'eft lui qui a dit le premier (& il en étoit la preuve) que l'amour eft le tyran des Vieillards & le Roi des jeunes gens.

La plupart des Gentilshommes de mon Royaume, difoit-il encore, font comme Actéon & Dioméde, mangés par leurs chevaux & par leurs

chiens.

Dans un tems où il étoit mécontent des Vénitiens, il donnoit une audience à leurs Ambassadeurs. Ceux-ci ayant beaucoup vanté

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la fageffe de leur République, le Roi répondit : J'oppoferai un fi grand nombre de foux à vos Sages › que toute leur fageffe en fera déconcertée. Mais le meilleur mot qu'un Roi pût dire, c'eft celui que difoit fouvent Louis XII: qu'un bon Pafteur ne fauroit trop engraiffer fon troupeau. C'est le vœu que Henri IV exprimoit en termes encore plus populaires.

Louis XII aimoit l'ordre & la décence autant que la juftice & l'humanité. Ayant fçu qu'on avoit trouvé un jour deux Magiftrats jouant à la paume dans un jeu public, il leur reprocha vivement cet oubli des graves bien-féances de leur état, & les menaça, s'ils y retournoient jamais, de les mettre au rang de fes palefreniers.

Tel fut ce Monarque, dont les François ne prononcent encore le nom qu'avec des regrets & des foupirs; d'autres regnes ont rendu la France plus brillante par les Arts ou plus redoutable par la Guerre, aucun ne l'a rendue plus heureuse par la

douceur du gouvernement, par les mœurs & par les vertus; tout le monde s'empreffoit d'imiter un Maître adoré; il avoit mis les vertus à la mode; mode heureuse, mais par malheur auffi changeante que les autres, & qui revient moins fouvent. Hift. de Il ne courut onques du regne de nul des autres fi bon temps qu'il a fait durant le fien, dit Saint Gelais de Montlieu.

Louis XII.

7515.

Mém. de

liv. 1.

François I. réunit Louis XII à fa chere Anne de Bretagne dans un tombeau de marbre blanc qu'il leur fit ériger à Saint Denis.

Tous les cœurs fe tournerent bientôt vers ce jeune Roi, en qui tout annonçoit un héros. Il fut facré à Reims le 25 Janvier par l'Archevêque Robert de Lenoncourt. Jamais Du Bellay, Roi ne monta fur le Trône avec des applaudiffemens fi univerfels, & ne fit naître de fi flatteufes efpérances. On aimoit en lui le gendre & l'ami de Louis XII; on l'aimoit pour luiFrancife. même indépendamment de ces tiguil. Com- tres; on s'attendoit à voir revivre les mentar. rer. vertus de fon Prédéceffeur, embelGallicar. 1. lies d'un éclat qui avoit manqué au

Belcar. Pe

as. an. Isis.)

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