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eux de fujets qu'on croit plus beaux que ceux ceux de l'Hiftoire moderne, parce que les tableaux en font plus vifs & ont plus d'expreffion.

Parmi nous un Philofophe éloquent & fublime, qui a tant débité de paradoxes, parce qu'il a tant pensé, prétend que cette différence n'est pas la feule, & que l'Hiftoire moderne n'offre point en effet d'hommes ni d'événemens comparables à ceux de l'Antiquité. J'ofe croire qu'il fe trompe, & qu'on n'auroit plus ce reproche à faire à l'Hiftoire moderne, s'il l'avoit écrite.

La France a eû fon de Thou, l'Italie fon Guichardin, la Flandre fon Strada (1), l'Espagne fon Mariana; ces Ecrivains ont fui

(1) Strada étoit Romain, mais il a écrit les Guerres de Flandres.

vi les grands modèles de l'Antiquité, mais ils leur font inférieurs. On trouve pourtant chez eux des événemens & des hom

mes.

L'Angleterre fur-tout, a fon David Hume, qui reffemble d'autant plus aux grands Hiftoriens de l'Antiquité qu'il ne les imite pas. Il fçait peindre & les faits & les hommes, juger les Rois & les Nations, il met de grands tableaux dans la tête, il laiffe dans l'ame des impreffions durables.

Nous avons dans notre langue quelques morceaux d Hiftoire particulière dignes des plus beaux jours de la Gréce & de Rome. Tels font divers ouvrages de l'Abbé de S. Réal & de l'Abbé de Vertot: telle est même cette précieuse ébauche de la conjuration de Valstein par

Sarrafin,

Sarrafin, où l'on découvre une grande manière & de grands traits; tels font fur-tout les Mémoires du Cardinal de Retz, peut-être (à la forme près), le plus brillanr Modèle du genre hiftorique dans notre langue; telles font encore, la Vie de Julien par M. l'Abbé de la Bletterie, fi fagement faite & fi élegamment écrite, la Vie de Louis XI. par M. Duclos, qui montre fi fenfiblement l'influence & l'empire naturel de la Philofophie fur l'Hiftoire, &c. Nous fommes bien éloignés de vouloir exclure ceux que nous ne nommons pas, mais comment ne pas diftinguer ici cet homme, ce feul homme auquel il a été donné d'écrire en profe & en vers, dans tous les genres, avec ce charme inexprimable, qui fait que tout le monde fçait Tome I.

b

par cœur tous fes ouvrages? On a quelquefois reproché aux Hiftoriens agréables de n'avoir pas fait affez d'efforts pour s'affûrer de la vérité des faits vice d'autant plus considérable qu'il corrompt le genre hiftorique dans fa fource. Rien ne peut difpenfer l'Historien d'être comme Ciceron l'a dit de Thucydide: rerum geftarum pronunciator fincerus.

L'infidélité hiftorique naît ordinairement de deux caufes principales. La première eft l'igno rancedes faits, qu'on n'a pas affe a approfondis. A cet égard je vou drois être fûr d'avoir toujour. trouvé la vérité, je puis dumoin? me rendre le témoignage que je l'ai cherchée avec beaucoup d foin, je me flatte même qu'on trouvera dans cet ouvrage de traces affez marquées de ma

respect, de mon amour pour elle, & des efforts que j'ai faits pour la découvrir.

La feconde fource d'infidélité est la fureur des allégories, fureur qui elle-même a deux fources bien impures, l'efprit de flatterie & l'efprit de fatyre. J'ofe encore ici me rendre un témoignage qu'aucun Lecteur ne pourra me refufer, c'est que dans le règne de François 1., je ne vois que le règne de François I., dans fes Miniftres que fes Minif tres, dans fes Généraux que fes Généraux. Eh! quel particulier vivant loin des affaires & de ceux qui ont le malheur honorable de les gouverner, quel particulier peut s'affûrer de connoître affez le Gouvernement fous lequel il vit, pour ofer le juger par comparaifon & par allégorie? Rien de plus jufte que l'emblême dr

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