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l'abfolution. Cette hoftie fenttouva tellement corrompuë,qu'elle n'avoit plus aucune apparence de pain, & reffembloit plus par fa noirceur & fa confiftence à un morceau de teriaque. Le prêtre celebrant en fut effraïé & faifi de tremblement, Il confulta avec les affiftans ce qu'il y avoit à faire; & ne pouvant fe refoudre à prendre & confumer cette particule fi degoutante, ni achever la meffe fans mettre dans le ciboire celles qu'il venoit de confacrer. Il refolut enfin de l'avis commun, de jetter la particule corrompue dans le lieu deftiné à de pareils ufages, que les Grecs nomment le four facré & nous la pifcine. Cette hiftoire fert au moins à montrer le grand refpect des Grecs pour l'eucha

riftic.

L'empereur ne put venir à bout de réunir les deux partis, ni fes exhortations, ni par par fe's

AN. 11284.

XIV. Epreuve par le feu entre les fchif

matiques.

raifonnemens. Les Arfenites en revenoient toû-
jours à demander quelques miracles pour les af- 21.
furer de la volonté de Dieu: croïant que s'ils ce-
doient aux raisons humaines, on les accuferoit
d'opiniâtreté pour y avoir resisté si long-temps.
Le patriarche ne voulut point y confentir expref- 12.
fément, mais l'empereur fit convenir les deux
partis, que les Arfenites écriroient dans un vo- n.greg
lume leurs plaintes & ce qu'ils croïoient necef-
faire pour parvenir à la paix ; & que les Jofe-
phites écriroient de leur côté leurs défenfes.
Que l'on allumeroit un grand feu, où l'on met-
troit les deux volumes; & que fi l'un des deux

les auteurs de

s'y confervoit fans brûler, les deux partis reAN 1284 connoîtroient que Dieu fe feroit declaré pour cet écrit: que fi tous les deux brûloient, les deux partis fe réuniroient encore, jugeant que le feu auroit confumé le fujet de Sup. I. LXXXIV, leur divifion. Nous avons vu que l'épreuve par le feu, au moins par le fer chaud, étoit encore en usage chez les Grecs vingt-cinq ans aupara

n.61.

yant.

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L'empereur, qui n'épargnoit rien pour procurer l'union, fit fabriquer exprès un brafier d'argent; & comme on étoit à la femaine fainte-il marqua pour le jour de l'épreuve le famedi faint, qui cette année étoit le huitième d'Avril. Les deux partis fe preparerent à cette action par plufieurs prieres, & le jour étant venu, ils mirent leurs livres entre les mains de perfonnes pieufes publiquement & en prefence de l'empereur. Ces perfonnes non fufpectes jetterent les livres dans le feu : les parties intereffées faifoient des prieres ardentes, afin que Dieu fe declarât en leur faveur mais le feu fit fon effet naturel; les deux volumés brûlerent comme de la paille, & en moins de deux heures, il n'en refta que la cendre. Alors les Arfenites témoignerent à l'empereur qu'ils fe foumettoient au patriarche Gregoire, & le prince tranfporté de joïe, les lui mena fur le champ marchant avec eux à pied, nonobftant la neige qui tomboit. Ils reçurent de lui des eulogies, & même la fainte communion, enforte qu'ils paroiffoient entierement re

venus de leur fchifme: mais dès le lendemain qui étoit le jour de Pâques, leur ardeur pour l'union commença à fe refroidir; ils crurent avoir été furpris, & s'étant à peine contenus pendant ce jour-là, le lundi prefque tous reclame

rent.

AN. 1284.

L'empereur voïant qu'il avoit travaillé en vain, affembla les principaux d'entre les Arfenites pour leur parler, & leur demanda ce qu'ils penfoient du patriarche Gregoire. Ils furent embaraffez: car il étoit étrange de ne le pas reconnoître pour triarche, après avoir reçû la communion de fa main; & le reconnoiffant il n'étoit pas honnête de chercher des pretextes de fcandale pour refufer de fe réunir à lui. Enfin ils avoüerent qu'il étoit patriarche. Alors l'empereur le fit paroître, car il le tenoit caché tout proche revêtu pontificalement; & Gregoire fe voiant reconnu par les Arfenites, commença à leur reprocher d'avoir manqué à leurs promesses, emploïant ces paroles de faint Pierre: Ce n'eft pas aux hommes que vous v. 4; avez menti, c'eft à Dieu ; & auffi-tôt il prononça contr'eux excommunication, croïant ramener Fa par-là ceux dont la confcience étoit la plus tendre. Mais ce procedé les aigrit davantage, & ils fe retirerent fans fe foucier de l'excommunication. Il en demeura toutefois quelques uns, dont l'empereur & le patriarche fe réjoüirent, comme s'ils les avoient tous, ramenez. Ceux-ci demanderent outre ce que l'on avoit déja fait contre le parti oppofé, que tous ceux qui avoient été ordonnez

par Jean Veccus dans C. P. fuffent interdits pour AN. 1284 toûjours, ceux qui étoient hors de la ville fufpendus pour un temps; fi ce n'étoit les perfecuteurs qui devoient être interdits pour toûjours : que les autres après le temps de la fufpenfe ne puffent être promus à un ordre fuperieur, quelque progrès qu'ils fiffent dans la vertu. Après qu'on eût rédigé ces conditions par écrit, ils fe retirerent.

XV.

Andronic de Sardis difgracié.

Andronic métropolitain de Sardis principal auteur de tous ces maux fut accufé par le moine Galaction son disciple, d'avoir mal parlé de l'empereur, auquel il étoit d'ailleurs fufpect de plus Pach.c.23. grands crimes. Il fut donc traité comme coupable de leze-majesté. Premierement on le chargea d'injures & de reproches, de ce qu'étant moine il avoit ofé quitter fon habit & reprendre le rang d'évêque; & après plufieurs autres infultes, on le frappa à coups de poing & le pouffant rudedement, on le jetta hors du lieu de l'affemblée. Ce qui lui fut le plus fenfible, c'est ce que lui fit Nicandre évêque de Lariffe qu'il avoit déposé, comme aïant été ordonné par Jean Veccus. Celuici voïant Andronic chaffé honteusement, prit un capuce de moine qu'il lui mit fur la tête : Andronic le jetta, Nicandre le remit, ce qui aïant recommencé plufieurs fois excita la rifée des fpec

XVI. Mort de Charles roi de Sicile

Nic. pec. lib. 1.

tateurs.

Charles roi de Sicile, autrefois la terreur des Grecs, mais alors accablé de chagrin pour tant c. 29 7 Villani. de pertes, & particulierement pour la prife de Duchefne p. 543. fon fils, mourut à Fogia en Poüille le feptiéme

VII.C. 94.

:

AN. 1285.

de Janvier 1285 En recevant le viatique, il témoigna une grande contrition & dit avec grand refpect Sire Dieu, comme je croi vraïement que vous êtes mon Sauveur, ainsi je vous prie d'avoir pitié de mon ame; & comme je fis l'entreprise du roïaume de Sicile, plus pour servir la fainte églife que pour mon profir, ainfi vous me pardonniez mes pechez. Il avoit vécu soixante-cinq ans, & en avoit regné dix-neuf- & fut enterré à Naples dans l'églife métropolitaine par le legat Gerard de Parme affifté de plufieurs prelats du roïaume. Comme Charles II. fon fils aîné & fon fucceffeur étoit prifonnier en Catalogne, le pape Martin prit foin de la conduite du roïaume & en écrivit ainfi au legat Gerard. Dès le Rain. 1285. n. 3. temps que le défunt roi Charles s'acheminoit à Bourdeaux, il nous remit par fes lettres patentes la direction de son roïaume, pour y réformer les abus dont fe plaignoient les églifes, les communautez & les particulies ; & en dernier lieu, dant la maladie qui l'a enlevé en peu de jours, il nous a confirmé ce pouvoir par d'autres lettres patentes. Or en vertu des premieres, nous vous avons chargé de vous informer exactement de l'état du roïaume; & aïant reçû votre réponse, nous avons commencé à chercher les moïens les plus efficaces pour y rétablir la tranquilité, & nous nous propofons de continuer jufques à ce que nous en voïons l'effet. La lettre eft du onzième de Février.

pen

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