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AN. 1289.

VIII. Athanafe patriar

che de C. P.

c. 5.

l'avoit fait connoître à l'empereur, qui en avoit conçu une haute eftime. Gennade refufa le fiege patriarcal, quoiqu'on le prefsât fortement de l'accepter; & entre les deux autres Athanafe fut preferé. Il s'en défendit auffi d'abord, mais enfin il parut ceder à la violence que lui faifoit l'empereur & le concile.

C'étoit un homme d'une grande vertu, mais fans litterature & fans ufage de la vie civile, exerGregor. lib. vI. cé dès l'enfance aux travaux de la vie monaftique, à l'abftinence, aux veilles, à coucher à terre propre à vivre en folitude fur les montagnes & dans les cavernes. Auffi dès fon entrée au patriarchat il parut bien different de fes prédeceffeurs. Il alloit à pied dans les rues, portoit un habit rude & des fandales groffieres faites de fa main, & vivoit dans une extrême fimplicité; mais comme il étoit dur envers lui-même, auffi manquoit-il d'humanité & de condefcendance envers les auPachym. c. 14 tres. On avança contre lui ces reproches quand l'empereur délibera fur fon élection; & on allegua pour preuve de fa cruauté qu'il avoit fait crever les yeux à un âne pour avoir mangé les her bes du jardin des moines. D'autres au contraire lui attribuoient des miracles, & difoient qu'un jour aïant amaffé des herbes il en chargea un loup qu'il rencontra, & lui commanda de les porter au monaftere. Mais on fçut depuis que c'étoit un homme nommé Loup. Toutefois l'empereur aïant balancé le bien & le mal que l'on disoit d'Athanafe, jugea que le bien l'emportoit, & se dé

termina à le faire patriarche.

AN. 1289.

C.IS.

Il le declara publiquement dans le grand palais le quatorziéme jour d'Octobre 1289. & de là Athanafe paffa à pied à fainte Sophie où peu après il reçut l'ordination. En cette ceremonie arriverent quelques legers accidens, que les Grecs fuperftitieux prirent pour des prodiges & des préfages qu'Athanafe feroit chaffé du fiege patriarcal comme fes prédeceffeurs. On remarqua entr'autres, que lorsqu'on lui mit l'évangile fur le cou fuivant la coutume, les paroles qui fe trouverent à l'ouverture du livre étoient des maledictions ; & aïant tourné quelques feuillets, on ne rencontra pas mieux. Il attira bien-tôt auprès de lui des moines c.16. de dehors, qui parurent d'une rigueur exceffive aux moines de C. P. qu'ils accufoient de relâchement: comme de ne pas obferver les deux jeûnes de la femaine, faifant deux repas, ufant de vin, d'huile, & de ragouts ; en un mot fe nourriffant comme les féculiers: quelques - uns même aïant de l'argent. Les compagnons du patriarche recherchoient fi curieurieufement toutes ces fautes, & les puniffoient fi feverement, que les plus reguliers ne fe croïoient pas en sûreté. Le patriarche Gregoire de Chipre mourut peu de temps après d'une longue maladie; &,comme quelques-uns difoient,du cha- c.19. grin de fe voir méprifé, & l'empereur défendit qu'il fût enterré comme évêque.

Jean de Grelli avoit été envoïé au pape avec quelques autres par Henri roi de Chipre & de Jerufalem, pour demander du fecours après la per

IX.

Le pape veut fefainte.

courir la terre

Sup 1. LXXXVIII.

.49.

te de Tripoli. Ils demandoient en particulier

A N. 1239. vingt galeres bien armées pour la garde de la Rain. 1189. n. 69. terre-fainte, & fournies de toutes les munitions neceffaires pour fervir un an: ce que le pape accorda, prenant cette dépenfe fur le fonds des fubfides qu'il avoit reçûs pour ce fujet ; & il envoïa ces galeres fous la conduite de l'évêque de Tripoli : mais il ordonna que quand elles feroient arrivées à Acre, le patriarche de Jerufalem & Jean de Grelli en euffent le commandement, & des troupes qu'elles portoient. C'eft ce qui paroît par la lettre du pape au patriarche du treizième SeptemId. 1290. n. 8. bre 1289. Ces vingt galeres furent armées à Venife: mais quand elles furent arrivées à Acre, les gens de folde & les pelerins, c'est à-dire, les croifez qu'elles avoient amenez étant demeurez à terre, il fe trouva à peine de quoi armer treize galeres manque d'armes, & principalement d'arba7.7. lêtres; & le fultan n'aïant point attaqué Acre, comme on creïoit en 1290. ces troupes ne firent rien de confiderable.

2.2.

Au commencement de la même année le pape Nicolas publia une bulle, où il exagere patheti quement la prife & la ruïne de Tripoli, & le péril extrême où se trouve la terre-fainte, exhortant tous les fideles à la croifade qu'il avoit ordonné de prêcher, & promettant l'indulgence pleniere & les autres graces que l'on avoit accoutumé d'accorder aux croifez, même l'abfolution des cenfures qu'ils auroient encourues. Cette bulle eft du cinquième Janvier 1290. Vers le même-temps il

Vading.1290.n.2.

en adreffa une à Nicolas patriarche Latin de Jerufalem & fon légat, par laquelle il lui ordonne d'é- AN. 1289. tablir dans les terres de fa légarion des inquifiteurs par le confeil des provinciaux des freres Prêcheurs & des freres Mineurs. C'eft qu'en Syrie & en Paleftine les défordres de la guerre attiroient l'impunité aux heretiques & aux Juifs.

X.

roi d'Angleterre. Rain 1290. n. 29.

Pour avancer l'affaire de la croifade, le pape plaintes contre la envoïa en France deux cardinaux légats, Gerard roi de France & le de Parme évêque de Sabine & Benoît Cajetan du titre de faint Nicolas, qu'il recommanda au roi Philippe par fa lettre du vingt-troifiéme de Mars: le priant de chercher avec eux les moïens de faire ceffer les plaintes portées au faint fiege dès le temps d'Honorius IV. par les églises & les prélats de France, contre les vexations des baillifs & des autres officiers du roi. Le pape Nicolas dit avoir reçu de pareilles plaintes dans les commencemens de fon pontificat, particulierement de la part de l'évêque de Poitiers & des églifes de Chartres & de Lion. L'évêque de Poitiers étoit Sup. 7. 1XXX711. Gautiers de Bruges de l'ordre des freres Mineurs, dont il a été parlé, homme exact & ferme à foutenir les droits de l'églife. Quant à celle de Lion, il fera parlé enfuite de les differends avec le roi. Les ». 17. deux légats étoient auffi chargez de retirer du roi Philippe le Bel les deniers des décimes que Philippe le Hardi fon pere avoit reçûs pour les frais de la croifade qu'il n'avoit pas executée; & ils n. 18. devoient accommoder les differends, qui commençoient à naître entre le roi de France & le roi

n. 40.

1

A N. 1290.

d'Angleterre, & qui eurent de grandes fuites. Les légats étant arrivez à Paris, y affemblerent tous Spicil. to. 2.p.8i8. les prélats du roïaume, & tinrent un concile dans l'églife de fainte Geneviève.

13,8.

tom. XI p.

1250.72. 33.

Le pape avoit auffi reçû des plaintes contre le roi Edouard touchant plufieurs entreprises sur la Id. 1189. n. 27. liberté ecclefiaftique. Il l'en avertit premierement par Guillaume de Houdon de l'ordre des freres Prêcheurs, que le roi lui avoit envoïé l'année précedente touchant l'affaire de la croifade, avoit promis de lui envoïer un nonce particulier; c'eft pourquoi cette année, il lui envoïa Barthelemi évêque de Groffetto en Toscane de l'ordre des freres Mineurs, avec une lettre, où il dit; Nous avons appris que quand nous accordons des lettres qui regardent le tribunal ecclefiaftique, on n'ofe les prefenter aux juges; & fi on le fait il vient un ordre de votre part qui défend de s'en fervir,& fouvent on prend ceux qui s'en fervent, quoiqu'ils foient ecclefiaftiques. On les emprifonne pour des fautes legeres, & on ne leur permet pas de fortir du roïaume, quand nous les mandons enfin votre cour prend connoiffance de quelques caufes qui appartiennent indubitablement au tribunal ecclefiaftique, & dont un laïque n'eft pas capable de connoître. Corrigez donc ces abus par un édit general & les faites entierement ceffer; autrement le faint fiege ne pourra se difpenfer de proceder contre ceux qui en feront coupables, felon que la juftice lui fuggerera. La lettre eft du vingtiéme Mai 1290.

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