du ral de lui donner un religieux capable d'y entendre les confeffions. Il lui amena frere Auguftin en plein AN. 1298. confiftoire ; & les cardinaux voïant la pauvreté de son habit & l'austerité de son visage, demandoient de quelle forêt on l'avoit amené. Il vint aux pieds pape fans fçavoir de quoi il s'agiffoit : mais voïant que le pape lui impofoit les mains pour le faire fon penitencier, il pleura fi amcrement, qu'il attira les larmes du pape & des cardinaux. A mefure qu'ils le connurent davantage, ils concurent pour lui beaucoup d'affection & de refpect; & il exerça cette charge de penitencier environ vingt ans , ayant toûjours le cœur à fa chere folitude. Son zele pour la juftice l'engageoit à ufer quelquefois envers le pape & les cardinaux, non feulement de prieres, mais de réprimendes ; & ils les écoutoient patiemment, tant ils avoient de veneration pour lui. Car fes confeils étoient reçûs comme ve- o.15.p.620. nant du ciel. Il étoit encore en cour de Rome quand on tint à Milan le chapitre de fon ordre, où quoi qu'abfent il fut élû general tout d'une voix: mais il n'auroit point accepté l'élection, s'il n'y eût été contraint par le pape Boniface. Il exerça sa charge avec beaucoup d'humilité, de charité, de fermeté & de zele; mais il ne la garda que deux ans. Car encore que fuivant l'ufage de l'ordre, le chapitre general ne fe tînt que tous les trois ans, il en assembla un à Naples le premier jour de Mai 1300. où quelque inftance que lui fiffent fes confreres, de continuer à les gouverner, ils ne pu . rent l'obtenir. S'étant ainsi déchargé du genera A N. 1298. lat, il ne retourna pas en cour de Rome, mais droit à fa folitude, c'eft à dire, à l'hermitage de faint Leonard près de Siene, où avec quelque peu de freres il ne s'occupoit que de Dieu feul. Toutefois fa réputation lui attiroit des vifites même de loin, de plufieurs perfonnes qui venoient recevoir fes inftructions & la confolation dans leurs peines. Au bout de neuf ans il mourut faintement dans cette retraite le Lundi de la Pentecofte dixneuviéme de Mai 1309. LIX. Mort d'Adolfe. Albert roi des Romains. Chron. Colm.ap. Rain. n. II. le que En Allemagne trois électeurs, l'archevêque de Maïence, le duc de Saxe & le marquis de Brandebourg, voïant le roi des Romains Adolfe de Nassau ne vouloit pas fuivre leurs confcils dans gouvernement du roïaume, refolurent de le dépofer & d'appeller Albert duc d'Autriche fils de l'empereur Rodolfe. Par leur confeil Albert envoia à Rome folliciter auprès du pape la dépofition d'Adolfe, comme incapable de l'empire; mais Adolfe y envoïa auffi de fon côté, & le pape Boniface declara à fes envoiez qu'il n'auroit point d'égard aux pourfuites d'Albert ni des électeurs ; & ajouta: Dites hardiment au roi qu'il n'a qu'à venir, & je le facrerai empereur. La veille de la faint Jean vingt-troifiéme de Juin 1298. les trois électeurs étant à Maïence affemblerent le peuple au fon des cloches & vinrent à l'églife, où le tournant vers l'autel, ils dirent avec ferment: L'empire étant vacant il y a fix ans,nous élumes canoniquement pour roi des Ro i par mains Adolfe de Naffau, n'en connoiffant point alors de plus digne. D'abord il s'eft gouverné fa- AN. 1298, gement; mais peu de temps après, il a fuivi de mauvais confeils, & fe trouve deftitué de richeffes & d'amis, outre plufieurs autres deffauts. Nous l'avons fait fçavoir au pape,lui demandant le pouvoir de le dépofer & d'en élire un autre. On nous a dit que nos envoïez l'ont obtenu, quoique les envoïez d'Adolfe difent qu'il l'a refufé. Donc l'autorité qui nous a été donnée, nous dépofons Adolfe comme incapable, & nous élifons pour roi des Romains le feigneur Albert, duc d'Autriche. Enfuite on chanta le Te Deum. Albert cependant s'avançoit avec une armée pour fe faire reconnoître. Adolfe s'avançoit de fon côté avec de plus grandes forces, & s'étant rencontrez près de Spire il y eut un combat où Adolfe fut tué le fecond de Juillet. Enfuite Albert fe rendità Francfort, où il fut élu roi des Romains par tous les Hist. Außtr.p.341š électeurs la veille de faint Laurent neuvième jour d'Aouft, & incontinent après couronné à Aix-laChapelle. pape Annal. Steron LX. Promotion da Au commencement de l'avent de cette année Boniface fit fix cardinaux : fçavoir cardinaux. 1298. le Gonfalve Rodrigués Efpagnol archevêque de To- Rain. n. iz. lede, cardinal évêque d'Albane, qui mourut le Onufr.p.193. feptiéme Novembre de l'année fuivante. Thieri Ugh. . 1. p. 3098 Rainier d'Orviete élu archevêque de Pise, fut fait cardinal prêtre du titre de fainte Croix en Jerufalem. Nicolas Bocafin de Trevife neuviéme ge- Ibid. p. 244. neral des Freres Prefcheurs, fut cardinal prêtre Vading. n. 4. du titre de fainte Sabine, & depuis pape. Gentil AN. 1298. de Montefiore de l'ordre des freres Mineurs, maître du facré palais, fut cardinal prêtre du titre de faint Silveftre. Les deux derniers furent cardinaux diacres. Luc de Fiefque noble Genois, du titre de fainte Marie in via lata ; & Ricard Petroni de Siene, du titre de faint Eustache. Il étoit jurifconfulte fameux & vicechancelier de l'église LXI. Sexte des Dccretales. Romaine. Ce dernier cardinal fut un des trois docteurs dont le pape Boniface se fervit pour la compila tion du Sexte des Décretales. C'eft le recueil des conftitutions des papes, publiées depuis la colleSup. l.1xxx.n.46. &tion de Gregoire IX. fçavoir du même Gregoi Pith, not. ad Tit Bern. Guid, re & d'Innocent IV. d'Alexandre IV. d'Urbain IV. de Clement IV. de Gregoire X. de Nicolas III. & de Boniface lui-même. Il fit choifir entre toutes leurs conftitutions celles qui parurent les plus utiles pour être fuivies dans les jugemens & enfeignées dans les écoles : on en retrancha, on changea ce qu'on jugea à propos ; & comme les Décretales de Gregoire IX. étoient divifées en cinq livres ; ce nouveau recueil fut nommé le Sexte, c'est-à-dire, le fixiéme ; & toutefois il eft encore divifé en cinq. Boniface emploïa à ce travail Guillaume de Mandegot archevêque d'Embrun, Berenger de Fredol évêque de Beziers, & Richard de Sienne. C'eft ce que porte la bulle mise en tête du Sexte, & adreffée aux univerfitez de Bologne, de Padoue, de Paris & d'Orleans. Ce livre fut publié le troifiéme jour de Mars, à la fin de l'an 1298. c'cft-à-dire en 1299. avant Pâques. A N. 1298. LXII. 23. Le pape Boniface ne manqua pas d'y faire inferer fous le titre des schifnatiques une bulle qu'il avoit publiée contre les Colonnes le jour de l'Af cenfion quinziéme de Mai 1298. par laquelle il confirmoit les trois de l'année précedente. Il fit J.Vill. v. c. 21. auffi abattre les palais & les maifons qu'ils avoient Rain. 1298. n. 27. dans Rome; & pour les chaffer de Paleftrine & de leurs autres places, il fit prêcher la croisade contre eux avec la même indulgence que pour Terre-fainte. Le pape assembla ainsi une armée où il envoïa pour légat le cardinal Mathieu d'Aquafparta évêque de Porto. L'armée affiegea Nepi, qui fe rendit à compofition, & au mois de Septembre de la même année 1298. les Colonnes traiterent d'accommodement; & étant venus à Rieti où le pape tenoit fa cour, ils fe jetterent à fes pieds & lui demanderent mifericorde. Il leur pardonna & leva l'excommunication; mais il voulut qu'ils lui rendiffent la ville de Paleftrine, & quand il en fut le maître il la fit abattre & ruiner entie rement. Enfuite il donna une bulle, par laquelle, pour punir cette ville de fa revolte, il la prive du droit de cité & de communauté, de la dignité d'évêché & de cardinalat, & deffend de l'habiter à l'avenir. Mais pour conferver l'ancienne inftitution des fix évêchez de cardinaux, il declare qu'il a fait bâtir près du lieu où fut Palestrine, une ville nouvelle, |