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rage à fa petite armée, qui étant venue aux mains, attaqua les Allemans avec tant de valeur, que la victoire fut longtemps balancée, mais enfin le nombre l'emporta; le Roy Jean & fon Général cédérent le champ de bataille, & firent une retraite honorable au de-là de la Teïffe, fur les ponts que le Roy avoit fait jetter fur cette rivié

re.

Tandis que les ennemis battoient la Fortereffe de Tockai le Roy ayant reçû de nouvelles troupes de Tranfilvanie, réfolut de tenter un nouveau combat ; mais quelque effort qu'il put faire, fes troupes peu nombreuses & mal difciplinees pliérent, fa cavalerie fut mise en déroute, & l'infanterie inveftie, fut taillée en piéces, ou mife en fuite; Bode qui étoit à la tête fit ferme prefque feul, pour favorifer la

retraite de fon Roy; préferant une mort honorable, à une fuite honteufe; mais ayant été reconnu il fut investi & fait prifonnier. Le Roy Jean repassa la Teiffe & fe retira en Pologne.

Avant que de fuivre la fortune de ce Roy malheureux, qui va nous remettre dans nôtre fujet, celle de fon Général François Bode,eft d'un exemple trop mémorable pour n'être pas rapportée. Ayant été fait prifonnier, il fut conduit à Vienne & préfenté à Ferdinand, comme le plus glorieux trophée de la profperité de fes armes. Ce Prince préyenu de fon expérience & de fa valeur, n'oublia ni careffes ni promeffes pour le gagner, mais il trouva un homme incorruptible, qui lui répondit, qu'il feroit « indigne de fon eftime & de fes graces, s'il étoit capable de « manquer à la religion du fer-a

»ment qu'il avoit fait à son Roy. Ferdinand & toute fa Cour admirérent cette fermeté ; cependant ce Prince le fit enfermer dans une étroite prifon, & quand il eut jugé que la mifere auroit abatu ce grand courage, il envoya encore le tenter, mais on trouva un cœur infléxible: enfin Ferdinand lui fit offrir la liberté, pourvû qu'il donnât fa parole de ne plus porter les armes pour le parti du Roy Jean; mais ce grand homme répondit, que fon honneur & fon devoir lui avoient toûjours été plus chers que la vie, & qu'il refufoit la liber»té à des conditions fi honteufes. Ferdinand, fuivant les maximes de fa politique, laiffa mourir de faim & de mifere ce grand homme, comparable à ces Heros de l'antiquité, qui par leur fidelité & leur conftance, ont rendu leurs noms immortels.

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Le Roy Jean arrivé à la Cour de Sigifmond Roy de Pologne fon beau pere,n'y trouva pas les fecours qu'il en avoit efperé. Sigifmond lui promit un azile asfùré dans fes Etats, même la liberté de s'y ménager des amis & les affistances qui lui feroient utiles, mais qu'il ne pouvoit armer en fa faveur, pour ne pas violer le ferment & la foi des traitez de paix & d'union, qu'il avoit juré folemnellement avec la maifon d'Autriche.

Cette déclaration auroit défolé le Roy Jean, s'il n'avoit trouvé deux amis effectifs qui entrérent avec chaleur dans fes interêts. Le premier fut Jean Tarnovifki, Palatin de Cracovie, & l'autre fut l'Abbé George Martinufius, dont nous allons reprendre l'hiftoire, que nous n'avons interrompuë que pour mieux faire juger, par l'état déplorable de la

Hongrie & des affaires du Roy Jean, combien il lui a été glorieux d'en rétablir l'autorité légitime, & d'en foûtenir la Cou

ronne.

Jean Tarnovifki, Palatin de Cracovie, Grand Marêchal du Royaume, auffi illuftre par fes vertus que par fes grands biens, fut le premier qui reçût chez lui le Roy Jean, il le traita en ami & en Souverain, il lui céda fa maison, l'y fit traiter avec magnificence, & lui attira une Cour auffi nombreuse & auffi choiste que s'il eut été dans fon Royau me; enfuite il vint à l'effentiel : après plufieurs conférences fur

les moyens dont Jean pouvoit fe fervir pour rentrer dans fon Royaume & en chaffer Ferdinand, il n'en fut point trouvé, dans les conjonctures préfentes, de plus prompt & de plus affuré, que d'avoir recours à la pro

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